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À l’automne 2020, s’est tenu le colloque international de Muséologie sociale, participative et critique organisé par le Musée de l’Éducation Gabriela Mistral. Quarante-huit ans après la fameuse Table ronde de Santiago du Chili (1972), cette rencontre réunissant praticiens et théoriciens de la muséologie nous conduit à ce constat : les jalons de la nouvelle muséologie posés il y a près de cinquante ans s’incarnent aujourd’hui dans les pratiques de plusieurs institutions muséales d’Amérique du Sud et d’ailleurs.

En 1972, la convention issue de la Table ronde de Santiago du Chili, voit en effet le jour. C’est un revirement important pour les musées, accusés alors d’être des institutions poussiéreuses et déconnectées de la réalité, soit par leur apologie nostalgique d’un passé révolu, soit par leur mise en valeur des trésors culturels européocentristes des élites dirigeantes. Dans sa conférence souvenir de cet événement fondateur de la nouvelle muséologie, Hugues de Varine en rappelait la nature révolutionnaire pour l’époque, dont l’objectif était de redéfinir le rôle social du musée. En effet, il était question pour la première fois de s’intéresser au musée comme acteur de changement social, notamment grâce à la collaboration avec les communautés locales.

En introduction des Actes du colloque, Orellana Rivera et Girault (2020, p. 43) rappellent le contexte de la trajectoire de la muséologie en Amérique latine :

Toutes ces actions, qui sont le résultat d’expériences réalisées initialement en Amérique latine, sont basées sur différents scénarios issus des situations sociopolitiques des années 1960, 1970 et 1980 (révision et réaction aux canons culturels européens, dictatures militaires et processus de transition vers la démocratie, etc.) qui ont conduit à l’essor de nouveaux courants théoriques (nouvelle muséologie, muséologie sociale et muséologie critique).

Près d’un demi-siècle plus tard, le colloque de l’automne 2020 fut donc l’occasion de constater les impacts réels de cet événement fondateur, non seulement sur les pratiques au sein des institutions, mais également sur la réflexion théorique.

Les actes sont divisés en quatre sections thématiques. La première section aborde la question des obstacles aux pratiques participatives dans les musées, telles que ceux liés à l’organisation du travail ou à un contexte post-régime dictatorial. Le deuxième bloc quant à lui, laisse la parole aux initiatives qui ancrent le musée dans une dynamique de muséologie participative, faisant appel à des études de cas spécifiques. En troisième partie, présente et discute l’expérience de musées engagés dans des mouvements sociaux et solidaires. Le but : donner une voix à travers le musée, à certaines populations marginales et/ou victimes de discrimination, comme les prisonniers, les migrants ou les membres issus de la communauté LGBTIQU+. Finalement, la quatrième et dernière partie intitulée « La participation des communautés à la politique d’acquisition et de requalification des collections » est consacrée à la place de différentes communautés autochtones des Amériques dans la mise en valeur au musée des patrimoines dont ils sont porteurs.

Comme le soulignait Yves Bergeron en conférence d’ouverture du colloque, les différentes propositions réunies dans ces actes font aussi écho aux vives discussions autour de la définition de musée de l’ICOM cristallisées à Kyoto (2019). Au regard de préoccupations environnementales, il est évident pour une faction grandissante d’acteurs au sein de la muséologie que le développement de la culture passe aujourd’hui par la participation des communautés au sein des institutions muséales. Les principes de la nouvelle muséologie sont toujours d’actualité, et ses racines bien vivantes en Amérique du Sud.

Les actes du colloque sont en libre accès : www.museodelaeducacion.gob.cl/648/articles-98247_archivo_01.pdf