DossierPrésentation

Le développement des territoires dans un contexte de restructuration de l’État[Record]

  • Guy Chiasson and
  • Juan-Luis Klein

…more information

  • Guy Chiasson
    Université du Québec en Outaouais, Codirecteur du Centre de recherche sur le développement territorial (CRDT)
    guy.chiasson@uqo.ca

  • Juan-Luis Klein
    Université du Québec à Montréal, Directeur du Centre de recherche sur les innovations sociales (CRISES)
    klein.juan-luis@uqam.ca

Depuis la Deuxième Guerre mondiale, les politiques et les recherches sur le développement des régions ont changé d’étiquette. Dans les années 1960 et 1970, on parlait surtout de développement régional, alors que dans les années 1980 et 1990 on faisait référence principalement au développement local. Depuis les années 2000, le terme privilégié est celui de développement territorial. Cette évolution ne comporte pas que des dimensions sémantiques puisque chacun de ces vocables renvoie à des compréhensions différentes à propos de qui porte la responsabilité du développement à l’échelle la plus proche des citoyens ou encore à des visions différentes des objectifs à atteindre (Pradella et Verger, 2012). Le développement régional attribue le rôle central à l’État et vise surtout le rattrapage des régions considérées comme en retard. Le développement local promeut le rôle des acteurs locaux et cible la prise en charge des communautés locales. Enfin, le développement territorial insiste sur l’interrelation entre divers acteurs dont les responsabilités se situent à différentes échelles et où l’innovation, aussi bien technologique que sociale, s’inscrit dans des processus institutionnels sillonnés à l’échelle locale (Torre, 2015). Aussi, l’insertion des communautés locales dans des processus de développement relève-t-elle de la gouvernance locale et des interrelations entre le local, le régional, le national et l’espace international (Klein et al., 2016). De nouvelles formes de collaboration et de conflit prennent place entre les communautés et l’État (Douillet, 2005; Zirul et al., 2015) et ce sont les capacités territoriales développées localement qui permettent aux acteurs locaux de mettre en valeur leurs ressources au profit de leur communauté (Loubet, Dissart et Lallau, 2011; Glon et Pecqueur, 2016). Alors que les travaux scientifiques orientés vers le développement local ont largement concentré leur attention sur les dynamiques de proximité entre acteurs locaux et ont parfois délaissé le rôle de l’État, les travaux qui mobilisent la notion de développement territorial, qui prennent une importance croissante, amènent à reconsidérer l’État comme un acteur important. Dans cette perspective territoriale, il faut interroger le lien entre les dynamiques territoriales et l’État, liens qui peuvent être traversés par la tension ou par la coordination. Les articles de ce numéro d’Économie et Solidarités se situent globalement dans cette perspective où l’on considère important, d’une part, de rappeler que l’État joue un rôle crucial dans le développement des communautés à travers ses divers programmes, politiques et stratégies et, d’autre part, de mieux cerner les lieux où s’imbriquent les actions étatiques et celles menées par la société civile dans les territoires. Cet effort de mieux comprendre l’interrelation entre l’État et les dynamiques territoriales est d’autant plus nécessaire dans le contexte contemporain que plusieurs gouvernements réaménagent les modalités de l’intervention publique à l’endroit des territoires. Le cas du Québec vient immédiatement à l’esprit, alors que le gouvernement a amorcé, en 2015, une importante réforme de la gouvernance des territoires qui a mené à la disparition des conférences régionales des élus (CRÉ) et des corporations de développement économique communautaire (CDEC), ainsi qu’au réaménagement des centres locaux de développement (CLD), modifiant d’ailleurs le rôle des municipalités régionales de comté (MRC). On pourrait également mentionner, à titre d’exemple, le redécoupage des régions françaises à la fois sur le plan des limites spatiales et des compétences. Ces deux séries de réformes ne sont que deux exemples parmi un ensemble de réorganisations étatiques qui, dans certains cas, s’inscrivent dans la stratégie du New Public Management (Merrien, 1999) mais qui donnent aussi lieu à la promotion de ce que des chercheurs ont désigné comme le New Public Value (Lévesque, 2013). Ces stratégies ont clairement des incidences sur les rapports de …

Appendices