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Le gouvernement du Canada, en dévoilant récemment sa troisième Stratégie fédérale de développement durable, a réaffirmé son adhésion à un concept qui est devenu une sorte de mot d’ordre au fil des années[1]. Ici comme ailleurs, le développement durable s’est imposé à mesure que les principaux textes internationaux précisaient sa nature et ses implications, à commencer par le rapport Brundtland de la Commission mondiale sur l’environnement et le développement de 1987. On lui doit une définition du développement durable immanquablement citée aujourd’hui encore, soit « un développement qui répond aux besoins du présent sans compromettre la capacité des générations futures de répondre aux leurs ». La Conférence des Nations unies sur l’environnement et le développement, qui s’est tenue à Rio en 1992, a ensuite produit l’Agenda 21, un plan d’action pour le XXIe siècle qui établit le caractère essentiel de la protection de l’environnement, de la justice sociale et de la croissance économique. Ces trois « piliers » du développement durable, interdépendants et indissociables, sont au fondement de toute résolution en la matière.

Cependant, d’autres avancées se sont basées plus spécifiquement sur la culture. Appréciée à l’aune du développement durable depuis le tournant du siècle, elle a été investie d’un rôle particulier qui ne la confine plus aux piliers social et économique. Hawkes (2001) a postulé qu’elle forme en effet un quatrième pilier à part entière dans la mesure où la durabilité repose aussi sur la vitalité de la culture en tant que système de valeurs sans lesquelles les sociétés se délitent ; le bien-être, la créativité, l’innovation et la diversité sont en l’occurrence des éléments primordiaux. C’est pourquoi, depuis 2004, un Agenda 21 de la culture enjoint des villes et des gouvernements locaux du monde entier à développer leur secteur culturel et à intégrer la culture au coeur de leurs politiques, celle-ci étant un gage de paix, d’inclusion, de tolérance, d’équité et de progrès. L’UNESCO promeut cette idée jusque dans ses textes contraignants[2]. Outre la convention de 2005 sur la diversité des expressions culturelles, celle de 2003 sur le patrimoine culturel immatériel souligne l’existence de liens étroits entre ce patrimoine et le développement durable en ce qu’il freine l’homogénéisation culturelle, améliore la répartition des richesses et procure un sentiment de continuité, d’identité et de fierté propice à la viabilité des communautés qui le portent. La Convention s’efforce d’encadrer juridiquement l’actualisation de ces liens au moyen de certains « principes de développement durable » reconnus dans le droit international (Guèvremont 2014).

Ces quelques grands jalons démontrent qu’il s’est produit une prise de conscience décisive au niveau mondial. À l’échelle nationale toutefois, ils ne disent pas quels gestes concrets sont posés en faveur d’un développement soutenu par la culture. La Convention pour la sauvegarde du patrimoine culturel immatériel a inspiré des études qui en offrent un aperçu dès lors qu’elles touchent aux décisions des gouvernements et aux mesures de soutien relatives à ce patrimoine, vu par l’UNESCO comme le « garant du développement durable » ; on sait comment son émergence a été traitée par les États-Unis (Kurin 2014), l’Australie (Leader-Elliott et Trimboli 2012), le Canada (Pocius 2014) et certaines provinces comme la Nouvelle-Écosse (MacKinnon 2012) ou le Québec (Bergeron 2013), pour ne citer que quelques exemples. Mais considérer l’implication d’un État dans le champ culturel et tenir la durabilité pour son corollaire implicite ne suffit pas. Il est possible d’aborder le problème sous un autre angle. En examinant plutôt la présence effective de la culture dans les démarches officielles de développement durable, on peut mesurer l’imbrication de ces deux concepts au niveau institutionnel. À cet égard, le cas du ministère du Patrimoine canadien (Patrimoine canadien/Canadian Heritage) mérite d’être interrogé, car après avoir longtemps réfléchi à la juste place qui devait lui revenir dans ce qu’il a appelé la « mosaïque du développement durable » (Patrimoine canadien 2004), il a peu à peu délaissé l’étude et la promotion de ses enjeux sociaux et culturels. Au contraire du gouvernement québécois par exemple, qui s’est doté d’instruments dont on peut dire, sans préjuger de leur impact réel, qu’ils expriment une conviction claire sur le sujet[3], le gouvernement canadien donne l’image d’un développement durable davantage synonyme de croissance écologiquement responsable. Les expériences de Patrimoine canadien témoignent donc des limites de la perspective fédérale alors même que la tendance est au rapprochement entre le développement et la culture en général (Bandarin, Hosagrahar et Albernaz 2011), et entre le développement et le patrimoine culturel en particulier (Pereira Roders et van Oers 2011).

Pour bien comprendre la position de Patrimoine canadien sur cette question, il faut d’abord connaître ses fonctions, ce qui pose en retour le problème de son appellation. Certains intervenants ont admis leur perplexité face au nom du ministère (Canada 1994 : 6416 ; Canada 1999 : 1555 ; Pocius 2014), sachant qu’il renvoie à des domaines variés : les musées et collections, les arts de la scène, la musique, l’édition, l’industrie du film, la radiotélédiffusion, les langues officielles, le sport, les festivals, les symboles nationaux, les célébrations et commémorations historiques, les cultures autochtones, les visites royales, le cérémonial d’État, les droits de la personne… L’étendue du ministère et du portefeuille du Patrimoine canadien[4] se traduit par un détournement apparent du terme « patrimoine », surtout depuis que le patrimoine naturel et les lieux historiques nationaux ne relèvent plus d’eux ; leur gestion incombe plutôt à l’agence Parcs Canada, revenue dans le giron d’Environnement Canada après une courte période sous l’égide de Patrimoine canadien. Un survol de l’histoire institutionnelle du ministère montrera que ces changements ont entretenu un flou terminologique qui était en germe dès avant sa création. Ils ont de plus influencé ses orientations en matière de développement durable, comme l’expliquera une lecture critique de ses stratégies triennales et d’autres documents publiés ou obtenus en vertu de la Loi sur l’accès à l’information.

Un ministère tout-en-un ?

Des signes avant-coureurs

Bien que le gouvernement fédéral se soit impliqué de longue date dans le champ culturel et patrimonial (Saint-Pierre 2007), il suffit de retourner quelque vingt-cinq ans en arrière pour retracer la genèse de Patrimoine canadien. En octobre 1990, plus de 230 spécialistes se sont rassemblés à Edmonton à l’occasion d’une grande consultation nationale. Intitulée « Le patrimoine dans les années 1990 : vers une stratégie du gouvernement du Canada », la conférence devait faciliter l’élaboration d’une stratégie d’ensemble relative au patrimoine, un secteur passablement malmené par les dédales de l’administration publique, les contraintes budgétaires et des clivages culturels – la crise d’Oka occupait encore les esprits. Deux constats en particulier ressortent du compte rendu des travaux.

Premièrement, les spécialistes ont dénoncé le manque de cohésion dans les politiques ainsi que les « problèmes de coordination, de rationalisation, d’intégration et de communication », entre autres au sein du gouvernement (Communications Canada 1990 : 33). La conférence elle-même mettait en évidence la fragmentation de la gestion fédérale du patrimoine, car elle était coparrainée par le défunt ministère des Communications, en charge des affaires culturelles, et par le ministère de l’Environnement, responsable de Parcs Canada – appelé alors le Service canadien des parcs. Selon le président de la conférence,

que les deux ministères fédéraux les plus impliqués dans les politiques et les activités du patrimoine se soient liés pour mettre sur pied cette conférence nationale est un signe évident de l’importance qu’accord[ait] le gouvernement du Canada à la nécessité d’une stratégie fédérale recouvrant toutes les activités fédérales dans ce domaine.

Communications Canada 1990 : 30

Cette nécessité n’a pas échappé aux panélistes. Ils ont suggéré à plusieurs reprises de remédier aux difficultés liées au manque de concertation par la création d’une structure ad hoc, comme un conseil du patrimoine, un poste d’ombudsman, une composante permanente chargée des questions patrimoniales dans les ministères et les agences, un comité spécial du cabinet, un ministère ou encore un « super-ministre » qui aurait coordonné l’élaboration des lois, politiques et programmes susceptibles d’affecter le patrimoine, en plus d’agir à titre de médiateur entre les organes gouvernementaux et entre ceux-ci et la population[5]. Aucune des options n’a été expressément recommandée à l’issue de la conférence d’Edmonton, mais toutes reflétaient le besoin d’une meilleure harmonisation à l’échelle nationale.

Cependant, un deuxième constat laisse entrevoir un des pièges de cette harmonisation : il a été impossible de définir le patrimoine. Le plus fort consensus voulait que toute définition officielle doive être large et souple, puis accentuée par des priorités précises. Quelques groupes de discussion ont énuméré des éléments qui devraient en faire partie : l’environnement naturel et architectural, la culture intellectuelle autant qu’orale et populaire, les arts du spectacle, la vie spirituelle, les sciences et la technologie, selon certains participants ; des « ressources » comme les galeries, les peintures, les arts visuels et littéraires, le théâtre, la danse et les traditions, selon d’autres. Le président, bien conscient de la diversité des avis exprimés par les défenseurs d’intérêts disciplinaires multiples, a résumé le débat que les experts du gouvernement devraient éclaircir à leur tour.

Des participants affirmeront que le patrimoine est d’abord fait de réalités physiques tangibles ayant marqué notre histoire, mais seront confrontés immédiatement avec l’opinion contraire qui met l’accent sur les intangibles (idées, valeurs, coutumes, traditions, croyances, langues). Un conférencier soutiendra que le patrimoine, c’est d’abord la personne alors qu’un autre dira que c’est tout ce que l’on chérit. On aurait pu même affirmer que le patrimoine, c’est la culture.

Communications Canada 1990 : 32

La formule n’est pas anodine. Elle a certes été dite plus ou moins sérieusement à l’époque, mais de fait, confondre la culture et le patrimoine est un raccourci qui sera utilisé quelques années plus tard à la faveur d’une conjoncture marquée par la dégradation des finances publiques.

La restructuration de 1993

En 1993, dans le but de rationaliser la bureaucratie et de réduire les dépenses, le gouvernement progressiste-conservateur de Kim Campbell a entrepris une refonte du secteur public. De trente-deux, le nombre de ministères est passé à vingt-trois. Le nouveau ministère du Patrimoine canadien a absorbé en tout ou en partie celui des Communications, celui du Multiculturalisme et de la Citoyenneté, celui de la Condition physique et du Sport amateur, le Secrétariat d’État et Parcs Canada. Certains députés n’ont pas manqué de critiquer cette fusion à l’origine d’un ministère « fourre-tout » assumant un « fouillis de responsabilités » (Canada 1994 : 6467, 6425). Mais aux yeux des officiels fédéraux, les programmes du ministère et les organismes du portefeuille du Patrimoine canadien avaient un dénominateur commun : ils contribuaient tous à « bâtir un Canada fier et fort » (Patrimoine canadien 1997 : 3) en protégeant son patrimoine, en favorisant son dynamisme et sa prospérité économiques, en encourageant l’émergence et la diffusion d’expressions artistiques et de contenus culturels, ou encore en rapprochant ses habitants par des expériences et des valeurs communes qui stimulent leur sentiment d’appartenance à la nation canadienne.

Quelles que soient les raisons derrière le choix du vocable « patrimoine »[6], l’éventail des responsabilités dévolues à Patrimoine canadien faisait de lui une structure fédératrice, quitte à ce qu’il absorbe la culture dans le patrimoine – comme si l’extension ou l’imprécision de la notion de patrimoine l’avait autorisé à ériger la culture en patrimoine. Le télescopage transparaît dans une allocution prononcée à la Chambre des communes par le ministre Michel Dupuy, premier titulaire de cette fonction « tentaculaire[7] ». Il y explique que si le nom de son ministère soulève des réserves, elles se dissipent quand le patrimoine est compris dans son acception la plus large. Pourtant, la définition qu’il en donne, à savoir « l’ensemble des signes qui font que chacun de nous se reconnaît en tant qu’individu appartenant à un groupe, voire à un pays » (Canada 1994 : 6416), est tout indiquée pour désigner les cultures, notamment nationales en l’occurrence.

Plutôt culture que patrimoine

La culture doit ici s’entendre au sens large. À une certaine époque, d’aucuns auraient renommé le ministère des Communications « ministère de la Culture » (Comité d’étude de la politique culturelle fédérale 1982 : 44), mais c’est Patrimoine canadien qui en a adopté une définition non limitée aux arts, à l’industrie culturelle et au patrimoine (Schafer 1995 : 4). À l’instar du ministère homologue d’autres États, il la veut globale et fidèle à une certaine conception de la nation, si bien qu’il soutient également le bilinguisme, la pratique sportive, les droits de la personne, la condition féminine, les cultures autochtones et le multiculturalisme. Une étude interne, mentionnant au passage l’ambiguïté des termes, confirme que le ministère envisage bien la culture comme un tout élargi.

Certains pays ont des ministères du « patrimoine » tandis que d’autres ont des ministères de la « culture », mais en général, leur rôle, leurs responsabilités et leurs préoccupations se recoupent. Au ministère du Patrimoine canadien, notre définition de la culture tend à être plus large, pour inclure « les idées, les valeurs et les systèmes de croyances auxquels tiennent les gens, les normes et les règles sociales qu’ils suivent, de même que leurs schémas de comportement, et jusqu’aux produits matériels qu’ils créent »[8].

Mandeville 2005 : 12, traduction libre

Étant donné que Patrimoine canadien est en fait un ministère pour la culture canadienne allant de pair avec ses pendants provinciaux et territoriaux, justifier sa dénomination a posteriori suppose de nuancer l’articulation du patrimoine et de la culture. La plupart des spécialistes conviendront que le premier est le fruit d’une sélection, d’une transmission et d’une valorisation de certains éléments de la seconde que l’on continue de s’approprier dans le présent ; le patrimoine est un produit de la culture, et la culture engendre continuellement un patrimoine en puissance. Mieux, il en fait partie intégrante en tant que référence qui la conforte, en tant que source d’inspiration qui la nourrit et la renouvelle grâce à l’utilisation ou à la recréation – voire au refus – dont il est l’objet dans le processus créatif et dans l’expérience quotidienne. Que l’on insiste sur le patrimoine qui imprègne la culture présente ou sur la culture qui puise ses sources dans le patrimoine, ce n’est que lorsque les deux sont replacés dans un « continuum » (Patrimoine canadien 2001a : 4) traversé par des représentations identitaires que le nom de Patrimoine canadien fait sens au regard des arts, de l’industrie culturelle et de l’assortiment de valeurs et de principes qu’il défend. Selon le point de vue totalisant préconisé au départ, il allait de soi que les patrimoines immobilier et naturel rejoignent non seulement le patrimoine mobilier et celui qu’on qualifie maintenant d’immatériel, mais aussi les manifestations de la culture qui peuvent devenir patrimoniales ou qui, à tout le moins, forment le terreau d’un patrimoine représentatif des aspirations et de l’identité canadiennes ; les intérêts de Patrimoine canadien touchent simultanément au passé, au présent et à l’avenir parce que ce « navire amiral de l’identité canadienne » devait former « un tableau qui illustre avec éclat ce que nous avons été, ce que nous sommes aujourd’hui et ce que nous voulons devenir » (Canada 1994 : 6416). Aussi les frontières se trouvent-elles brouillées. Un glissement de la culture vers le patrimoine se déclenche en suggérant que la culture est une richesse qui, héritée, partagée et transmissible par les Canadiens, peut fortifier leur identité en l’inscrivant autant dans le temps que dans la collectivité.

En somme, bien des choses peuvent se rattacher au patrimoine sans toutefois en être. À y regarder de plus près, le ministère fait lui-même la différence puisqu’il dédouble l’usage du mot. Il l’applique plus exactement à son Groupe du patrimoine. Ce qu’il vise directement à travers ce groupe, ce sont les objets et collections qui profitent de l’expertise et des outils du Réseau canadien d’information sur le patrimoine et de l’Institut canadien de conservation, ceux dont l’exportation et l’importation sont réglementées par la Direction des biens culturels mobiliers, ceux qui bénéficient de l’aide financière qu’accorde la Direction des politiques et des programmes du patrimoine par l’entremise du Programme d’aide aux musées et du Programme d’indemnisation pour les expositions itinérantes au Canada et, finalement, les établissements du patrimoine ciblés par les enquêtes de cette direction. Par ailleurs, même si le Canada ne reconnaît guère le patrimoine immatériel défini par l’UNESCO, et même si les démarches de Patrimoine canadien pour l’intégrer dans une politique cohérente ont avorté au début des années 2000 (Pocius 2014), le ministère le soutient tout de même indirectement grâce à son appui aux arts du spectacle, aux festivals, aux musées, aux cultures autochtones, etc.

Patrimoine canadien sans Parcs Canada

Le patrimoine et l’environnement

Pourquoi consacrer tant d’attention à l’emploi d’un mot ? Parce qu’au-delà des apparences, un partage significatif se dessine à présent dans le champ patrimonial fédéral. Patrimoine canadien se charge, à quelques exceptions près[9], des patrimoines mobilier et immatériel tandis qu’à Parcs Canada reviennent les patrimoines immobilier et naturel. Leur rapprochement sous le signe de la culture et de l’identité n’a pas fait long feu. Parcs Canada est associé de près à des préoccupations écologiques dont Patrimoine canadien n’est pas porteur, ce qui explique pourquoi des environnementalistes ont regretté sa migration d’Environnement Canada vers Patrimoine canadien (Hildebrandt 1995 : 29). En 2004, les députés ont ensuite salué unanimement le projet de loi entérinant le renversement de cette décision dans une période jugée critique quant à l’intégrité écologique des parcs nationaux (CIEPNC 2000). On avait d’ailleurs déjà reconsidéré une première fois le statut de Parcs Canada quand le programme est devenu en 1998 un organisme de service rattaché au portefeuille du Patrimoine canadien et non plus au ministère. Depuis, celui-ci est dissocié du vaste réseau des parcs nationaux et réserves de parc national, aires marines nationales de conservation, rivières du patrimoine, canaux historiques, lieux d’importance historique nationale, édifices fédéraux du patrimoine et gares ferroviaires patrimoniales.

À cause de ces revirements, Patrimoine canadien a très tôt été privé des patrimoines représentant son meilleur atout en matière de développement durable. Puisque sauvegarder les ressources existantes pour le bien des générations actuelles et futures est une idée constitutive à la fois du patrimoine et du développement durable, les liens solides entre celui-ci et Parcs Canada étaient faciles à concevoir. Ils sont explicités depuis au moins 1994 dans ses Principes directeurs et politiques de gestion. Ce document cautionné par Patrimoine canadien invoque la Convention sur la diversité biologique pour expliquer combien il est crucial que Parcs Canada préserve les aires naturelles protégées et les lieux historiques, puis sensibilise la population qui les fréquente. Sans une utilisation durable de toutes ces « ressources patrimoniales », tant naturelles que culturelles[10], la sauvegarde à long terme de la biodiversité et des écosystèmes ne saurait en effet être garantie.

Des patrimoines complémentaires

En plus de la durabilité environnementale, Parcs Canada favorise la durabilité sociale. Bien qu’elle ne soit pas nommée dans ses principes directeurs, elle est toujours présente en filigrane. Par exemple, Parcs Canada parle volontiers d’identité nationale en tant qu’elle est exprimée par le patrimoine sous sa supervision. Or la charge identitaire inhérente à ce patrimoine le rend précieux pour le développement durable. Du fait de l’appropriation renouvelée qu’ils suscitent, les sites naturels et les lieux historiques demeurent des marqueurs, des repères qui assoient et réactualisent dans les mémoires une identité collective historiquement légitimée par leur transmission. Ils ont alors le pouvoir de raffermir le tissu social tout en éveillant un sentiment d’attachement au lieu et au territoire (Dris 2012 : 14) propice à leur conservation. Lorsqu’on lit dans les publications officielles qu’ils « représentent l’essence même de notre identité nationale » ou qu’ils « contribuent à façonner le sens collectif de l’identité et de la fierté nationales » (Parcs Canada 1994 : 3, 8), on en déduit que leur pérennité et leur accessibilité profitent à la durabilité sur un mode non seulement environnemental, mais aussi culturel : à une conservation intrinsèquement écologique s’ajoute un enracinement de l’identité dans le territoire partagé.

Culture et nature sont donc inséparables à Parcs Canada. L’interaction des hommes avec leur environnement implique une complémentarité entre le patrimoine que nous produisons et celui que nous créons conjointement avec la nature en prêtant valeurs et significations à des sites. Ainsi, de la même manière que l’UNESCO unit sous une même rubrique les patrimoines culturel et naturel qu’elle s’emploie à protéger (« le patrimoine mondial »), Parcs Canada utilise un mot indifférencié (« intégrité ») qu’il applique ensuite au premier ou au second : « l’intégrité commémorative » des lieux historiques et « l’intégrité écologique » des espaces naturels découlent, en fin de compte, du même engagement à conserver et à interpréter le patrimoine.

La nature, en revanche, occupe désormais une moindre place à Patrimoine canadien. Si la migration de Parcs Canada a minimisé son importance au sein du ministère le plus à même d’influencer la conceptualisation du patrimoine canadien, il serait exagéré de croire comme Mandeville (2005 : 18) que cela puisse affaiblir les liens entre le développement durable et le patrimoine – étant donné qu’une bonne partie de celui-ci est associée à Environnement Canada et que le développement durable est souvent réduit d’emblée à ses implications environnementales. Il est vrai par contre que la culture et le patrimoine toujours revendiqués par Patrimoine canadien auraient pu être rapidement dissociés du développement durable. Les stratégies que le ministère a présentées montrent cependant que les décideurs, privés des ressources directement utiles à son volet environnemental, ont cherché à s’adapter en se penchant sur ses volets social et culturel.

Les stratégies de développement durable

1997-2000

Le ministère s’intéresse formellement au développement durable depuis l’amendement de la Loi sur le vérificateur général en 1995. En vertu de cette loi, vingt-huit ministères et organismes fédéraux devaient élaborer des stratégies de développement durable triennales et rendre compte annuellement de leurs progrès devant le Parlement. Pour sa stratégie inaugurale, en 1997, Patrimoine canadien a davantage mis l’accent sur des enjeux environnementaux. Confronté à une notion qui, à maints égards, « rest[ait] à définir » ainsi qu’à « un domaine de politique relativement nouveau pour une partie importante du ministère », il a largement misé sur ce que Parcs Canada comptait déjà accomplir. Malgré tout, il n’a pas écarté la question sociale.

Le développement durable exige que la poursuite d’activités à caractère social et économique soit fondée sur des valeurs telles [sic] le respect de la nature, la tolérance, le respect des droits humains, la paix et la coopération. À bien des égards, développement durable et cohésion sociale vont effectivement de pair.

Patrimoine canadien 1997 : 1

On percevait donc le potentiel du Programme du patrimoine canadien qui, de concert avec le Programme Parcs Canada, savait « relever les niveaux de participation à la vie de la société canadienne et favoriser une plus grande sensibilisation culturelle nécessaires au développement durable » (Patrimoine canadien 1997 : 7). La première stratégie énonce peu d’engagements précis sur ce point. Elle affirme néanmoins la nécessité de faire prendre conscience de toutes les valeurs du développement durable, de promouvoir le capital social et culturel et de poursuivre les travaux pour mieux comprendre son rôle dans le développement durable. Patrimoine canadien a diffusé un document sur le sujet en 1998[11] et a organisé un atelier interministériel en février de la même année. Des représentants de quatorze ministères et organismes étaient présents.

2001-2003

Dans sa deuxième stratégie de développement durable, entrée en vigueur en 2001 alors que Parcs Canada dévoilait pour la première fois une stratégie indépendante, le ministère assure toujours vouloir soutenir la durabilité sociale parallèlement à la durabilité environnementale. Cette stratégie représente la phase intermédiaire de la transition. La priorité était encore accordée au thème de l’environnement compte tenu des « défis immédiats » que posait la réduction des « impacts biophysiques négatifs » des activités internes et des programmes de Patrimoine canadien. Le ministère, loin de « nier l’importance de traiter des enjeux sociaux et culturels tels que l’équité, les valeurs, les attitudes, comme partie intégrante des efforts vers le développement durable » (Patrimoine canadien 2001b : 9), considérait seulement qu’il leur prêtait déjà une attention particulière en raison de son mandat même. Il ne proposait rien de nouveau dans l’immédiat, mais un des trois grands buts de la stratégie visait une meilleure compréhension des dimensions sociale et culturelle et des incidences stratégiques découlant de leur pleine intégration à un modèle de développement durable. Un groupe de travail composé de onze ministères à vocation sociale a été formé à cet effet. Pour sa part, le commissaire à l’environnement et au développement durable a organisé deux ateliers afin de consulter des experts-conseils, des universitaires et des fonctionnaires dans le cadre d’une étude selon laquelle l’intégration de la dimension sociale à la prochaine série de stratégies de développement durable était « prioritaire » (Bureau du vérificateur général 2001).

2004-2006

La troisième stratégie prend appui sur ces initiatives et insiste plus qu’aucune autre sur la volonté de Patrimoine canadien d’être un meneur dans les efforts pour « déterminer, décrire et promouvoir les dimensions sociales et culturelles du développement durable ». Elle proclame en outre le rôle de premier plan qu’il joue dans l’établissement de « collectivités durables ». En procurant aux individus – notamment aux Autochtones – un sentiment de fierté, des occasions de participer à la vie culturelle et communautaire ainsi qu’un milieu propice au bien-être et à la créativité, le ministère peut en effet accroître la cohésion sociale[12] et, partant, stimuler « la volonté des particuliers de collaborer et de travailler ensemble à tous les niveaux de la société pour atteindre des buts collectifs » (Patrimoine canadien 2004 : 7).

Même s’il avait clairement indiqué le rôle qu’il entendait assumer, Patrimoine canadien devait encore se donner les moyens de ses ambitions. Soutenir la durabilité par la culture était toujours vague d’un point de vue opérationnel, à tel point qu’il a centré sa stratégie sur le besoin d’établir une vision précise et de trouver une définition du développement durable qui convienne dans le contexte de ses activités et programmes. Encore une fois, ses objectifs concernaient moins l’action en soi que son pouvoir d’agir à plus ou moins brève échéance.

Lorsque nous aurons une vision solide et une définition correspondante, nous pourrons examiner les nombreux aspects de notre travail pour clarifier davantage nos contributions au développement durable et identifier des possibilités supplémentaires pour la [stratégie] 2007-2009 et plus loin.

Patrimoine canadien 2004 : 19

Pour l’aider à mieux comprendre ces défis, sa division Recherche et analyse stratégiques a produit un rapport sur la question. Les quatre études théoriques et appliquées écrites en 2003 et 2004 confirment le bien-fondé de la vision plus mûre de Patrimoine canadien, axée à juste titre sur le renforcement des communautés grâce au patrimoine et à la culture. La participation à la vie culturelle et civique, l’émergence d’un sentiment d’appartenance, la protection de la diversité culturelle et la promotion de la créativité sont vues comme favorables à la construction d’une société saine, riche et viable, que les individus ont le désir de transmettre à leurs descendants par solidarité intergénérationnelle. Une étude comparant les ministères de sept pays salue le leadership de Patrimoine canadien. En revanche, son auteure déplorait qu’aucun employé ne soit affecté exclusivement au dossier du développement durable et plaidait pour l’adoption d’une stratégie de développement durable nationale qui tiendrait pleinement compte du pilier social (Mandeville 2005).

2007-2009

Les pistes explorées par la division Recherche et analyse stratégiques présageaient d’importants progrès pour la durabilité sociale au ministère. La stratégie de 2004 représente en vérité le point culminant de l’entreprise. Dans la quatrième génération de sa stratégie de développement durable, déposée en 2007, Patrimoine canadien réaffirme son engagement à « soutenir les communautés durables en contribuant à leur bien-être et à leur vitalité culturelle » ; il se considère toujours « comme un chef de file en ce qui a trait à la compréhension des aspects sociaux et culturels du développement durable » (Patrimoine canadien 2006 : 3, 4). Ils y trouvent pourtant une place réduite et les enjeux exposés concernent principalement l’écologisation des opérations internes du ministère. Les obstacles commençaient à s’accumuler en raison des pressions exercées par le commissaire à l’environnement et au développement durable, tant sur les ministères et les agences que sur le Parlement.

De nouvelles orientations fédérales

Plus d’imputabilité

Dès la toute première ronde de stratégies de développement durable, le commissaire à l’environnement et au développement durable a déploré le manque de cibles claires et mesurables ainsi que les carences dans les systèmes implantés pour gérer les engagements et mesurer les avancées. Plusieurs ont su améliorer leurs méthodes au fil des années, mais en 2006, le commissaire a reproché à Patrimoine canadien et à trois autres ministères ou agences d’avoir « fait peu d’efforts pour planifier, mettre en oeuvre ou surveiller leurs engagements ». Ils avaient, de plus, « fait des progrès limités ou […] eu de la difficulté à démontrer les progrès accomplis » (Bureau du vérificateur général 2006 : 5). Tenant compte des critiques et des recommandations formulées, la quatrième stratégie de Patrimoine canadien insiste sur l’adoption de mesures concrètes dont les résultats pourront être évalués grâce à des structures de gouvernance plus efficaces.

Toutefois, répondre à l’exigence de rendre des comptes en déterminant l’apport concret de ses programmes au développement durable a toujours été ardu pour le ministère. Dans sa première stratégie, il signale déjà la nécessité de développer des indicateurs plus précis, notamment sur l’incidence des arts et de la culture. L’étude commandée quatre ans plus tard par le commissaire indique elle aussi que l’évaluation des progrès de la durabilité sociale est problématique en l’absence d’outils de mesure et d’analyse appropriés. Le commissaire espérait tout de même que les ministères et agences relèveraient ce défi sans tarder afin que le Parlement puisse exercer une surveillance adéquate ; il attendait d’eux qu’ils « décri[vent] leur méthode pour mesurer la dimension sociale du développement durable » et qu’ils « conç[oivent] des indicateurs pertinents, exhaustifs, temporels et rattachés à des cibles » (Bureau du vérificateur général 2001 : 14). Incapable de le faire, Patrimoine canadien s’est toujours concentré sur l’amélioration de sa compréhension de la durabilité sociale – compréhension qui, elle, peut être quantifiée sur la base du nombre d’études menées, d’ateliers organisés ou de documents produits – plutôt que sur l’amélioration de la durabilité sociale elle-même. C’est en 2007 que Patrimoine canadien, conscient d’être « encore confronté à la difficulté de mesurer les natures sociale et culturelle du développement durable » (Patrimoine canadien 2006 : 15), s’est enfin engagé à développer des indicateurs de rendement. Les rapports annuels indiquent qu’il a développé un plan de recherche, mais il n’est pas certain qu’il ait mené à terme l’élaboration de tels indicateurs.

Plus de cohérence

Afin de combler les lacunes observées dans plusieurs ministères et agences, le commissaire à l’environnement et au développement durable a fréquemment prôné un encadrement plus serré grâce à une approche centralisée et une planification à long terme. En dépit de ses pressions sur le Parlement, une stratégie fédérale de développement durable régularisant les stratégies ministérielles n’avait toujours pas vu le jour en 2007. Comme par les années passées, le gouvernement avait identifié des buts communs en fonction desquels les ministères devaient prendre leurs engagements. Patrimoine canadien pouvait alors toujours parler de la culture puisque l’un de ces buts communs voulait que « les collectivités profitent d’une économie prospère, d’une société vibrante et équitable et d’un environnement sain pour les générations actuelles et les générations futures » (Patrimoine canadien 2006 : 24).

La Loi fédérale sur le développement durable a changé la donne un an plus tard. Depuis 2008, elle commande l’élaboration et la mise à jour tous les trois ans d’une stratégie fédérale qui détermine des cibles et des indicateurs pangouvernementaux. Chaque ministère et organisme soumis à la Loi est tenu de mettre en oeuvre des stratégies de développement durable plus rigoureusement encadrées par les stratégies fédérales. Or la première d’entre elles, conçue par le ministère de l’Environnement pour la période 2010-2013, ne se base que sur des thèmes environnementaux : les changements climatiques et la qualité de l’air, la qualité et la disponibilité de l’eau, la protection de la nature et la réduction de l’empreinte environnementale (Environnement Canada 2010).

Le pilier environnemental d’abord

Comme les responsables en amont ont délaissé la durabilité sociale, la vocation culturelle de Patrimoine canadien a perdu sa pertinence. Des directives différentes ont été émises en réponse au nouveau cadre légal. Des documents internes montrent qu’un an avant le dépôt des stratégies de développement durable repensées, le ministère n’était plus concerné que par la rationalisation de ses propres opérations en vue de réduire l’empreinte écologique du gouvernement (achats écologiques, gestion des déchets électroniques, réduction de la consommation d’encre, de papier, d’électricité, etc.). Contrairement aux stratégies de développement durable précédentes, qui promettaient elles aussi « l’écoefficacité », la nouvelle ne pouvait plus croiser culture et développement durable[13]. Patrimoine canadien, souhaitant néanmoins continuer de travailler avec les autres ministères et agences pour inclure progressivement les enjeux sociaux, économiques et culturels (Patrimoine canadien 2011 : 47), a réitéré en janvier 2012 une position devenue difficile à tenir malgré l’évidence des arguments avancés.

Notre défi, toujours renouvelé, est de montrer comment la culture est un moteur de créativité, une source d’innovation sociale et technologique, de croissance et d’emploi. La culture est le fondement de la société du savoir, elle aide à améliorer les espaces urbains et ruraux, elle cherche à favoriser l’inclusion et la cohésion sociales et, en définitive, la culture améliore la qualité de vie et le sentiment d’appartenance. À ce titre, Patrimoine canadien aura à imaginer et à façonner les multiples facettes de tous les piliers du développement durable.

Patrimoine canadien 2012 : 114

Les piliers social et économique ont été ajoutés à la seconde Stratégie fédérale de développement durable au terme des consultations menées par Environnement Canada. Ils se trouvent toutefois subordonnés aux quatre mêmes thèmes environnementaux[14]. C’est donc dire que la durabilité sociale n’est pas une fin en soi dans la stratégie pour la période 2013-2016 ; elle est une conséquence secondaire d’actions qui concernent au premier chef l’environnement.

Conclusion

Les rapports de Patrimoine canadien avec le patrimoine et le développement durable ont évolué concurremment depuis les années 1990. Au départ parfaitement intégrée, au risque d’entretenir une certaine confusion, la notion de patrimoine défendue par Patrimoine canadien s’est appauvrie quand Parcs Canada a été séparé de celui-ci. Sa migration a provoqué une scission, laissant ce ministère aujourd’hui « si mal nommé[15] » avec la culture en général, et Parcs Canada avec les lieux et les biens indissociables de l’environnement et du territoire. Dans la foulée, Patrimoine canadien est passé d’une contribution au développement durable qui privilégiait l’interdépendance du patrimoine et de l’environnement, à une contribution qui voulait mieux tenir compte de la culture. En accord avec les lignes directrices communes, il a étudié la relation entre culture et développement durable à l’intersection desquels la cohésion sociale et la résilience des collectivités sont apparues primordiales. Cependant, la nouvelle stratégie fédérale déployée en réaction aux exigences d’imputabilité, voire de rentabilité, et au besoin d’obtenir des résultats concluants face à l’urgence de la situation environnementale a causé un nivellement des objectifs ministériels. S’agissant plus particulièrement de Patrimoine canadien, le repositionnement semble s’être imposé dans la mesure où ses efforts n’ont pas donné lieu à des actions tangibles dont les effets escomptés auraient pu se mesurer. La promotion et l’étude de la culture dans la perspective d’un développement durable, bien qu’indispensables pour établir sa légitimité et pour acquérir l’expertise nécessaire à une prise de décisions éclairée, n’ont pas eu d’impact quantifiable sur l’accroissement de cette insaisissable durabilité sociale que le ministère a toujours soutenue de toute manière, même avant que ses recherches ne l’attestent à point nommé.

Il n’est pas question de discréditer l’approche consolidant les stratégies de développement durable ministérielles, ni de nier la nécessité de freiner les changements climatiques et leurs effets délétères. Il s’agit seulement de souligner l’absence de la culture. Elle a été marginalisée par un recentrement qui a mis à mal l’image d’une « mosaïque », forte d’apports différents et originaux s’enrichissant mutuellement pour concourir à un des buts collectifs les plus irréductibles : atteindre l’harmonie avec ses semblables et son milieu afin d’offrir à tous, aujourd’hui et demain, une vie de qualité. Avec de meilleurs arguments théoriques et pratiques à l’appui, d’autres jugeront si et comment le dossier peut regagner en pertinence. Un aperçu chronologique de ses tenants et aboutissants montre au moins que les démarches des gouvernements, aussi louables soient-elles, peuvent être problématiques dès lors qu’elles doivent aboutir à plus que des déclarations de principes. Elles menacent d’être éclipsées par les besoins environnementaux vraisemblablement plus pressants dans nos sociétés développées où une durabilité sociale élevée est la résultante attendue de l’ensemble des services et politiques publics. Ainsi, des dix-sept grands objectifs adoptés en 2015 par les membres de l’ONU dans le cadre du Programme de développement durable à l’horizon 2030, cinq ne figurent pas dans la dernière Stratégie fédérale de développement durable pour la période 2016-2019 : « Pas de pauvreté », « Éducation de qualité », « Égalité entre les sexes », « Inégalités réduites » et « Paix, justice et institutions efficaces » (Environnement Canada 2016) sont des priorités qu’il est effectivement capital de définir dans le contexte international, mais bien moins dans le contexte canadien où ces thèmes transversaux s’accordent de longue date avec nos idéaux. Ils n’en demeurent pas moins des impératifs d’une grande actualité, et une action culturelle vigoureuse et concertée à tous les niveaux est un puissant levier qui leur est indispensable.