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Jochelson, Waldemar, 2002 Archaeological Investigations in the Aleutian Islands, Salt Lake City, The University of Utah Press, Anthropology of Pacific North America Series, originally published by the Carnegie Institution of Washington, 1925, 192 p.Jochelson, Waldemar, 2002 History, Ethnology and Anthropology of the Aleut, Salt Lake City, The University of Utah Press, Anthropology of Pacific North America Series, originally published by the Carnegie Institution of Washington, 1933, 104 p.[Record]

  • Christine Lefèvre

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  • Christine Lefèvre
    Muséum national d'Histoire naturelle
    Bâtiment d'Anatomie comparée, CP 55
    55, rue Buffon, 75005 Paris,
    France
    lefevre@mnhn.fr

Waldemar Jochelson est un jeune étudiant de Vilna quand il rejoint dans les années 1870 le mouvement révolutionnaire «Volonté du peuple». Il fuit la Russie en 1875 pour échapper à une arrestation, et y revient en 1884, année où il sera arrêté pour complot contre le tsar. Il est alors envoyé en Sibérie, où, avec ses compagnons d’exil Waldemar Bogoras et Lev Shternberg, il s’intéresse aux peuples indigènes, au point qu’il décide de rester en Sibérie à l’issue de sa période d’exil. Lui et ses compagnons sont considérés comme les fondateurs de l’ethnographie russe, et ils participent en 1894-1895 à l’expédition Sibiraiakov dans les provinces yakoutes, puis, en 1900-1902, à l’expédition dans le Pacifique nord financée par Morris K. Jesup, directeur de l’American Museum of Natural History. Dans cette dernière, Jochelson est responsable de la partie sibérienne, et ses travaux concernent les Evens, Koryaks, Yukaghirs et Yakoutes. Le rattachement des îles Aléoutiennes aux États-Unis et l’impossibilité de les rejoindre par bateau depuis le Kamtchatka avaient obligé les membres de l’expédition Jesup à ne pas inclure cette entité géographique dans leur vaste programme. Cette lacune dans l’étude des peuples indigènes du Pacifique nord sera comblée par les travaux menés par Waldemar Jochelson en 1909-1910 dans le cadre de l’expédition Aléoutiennes-Kamtchatka, financée par le banquier moscovite F. P. Riaboushinsky, et patronnée par la Société impériale russe de géographie. Au total, Jochelson aura passé 19 ans parmi les peuples dont il a étudié les coutumes et les moeurs, les cultures matérielles et spirituelles, rassemblant une documentation d’une ampleur peu égalée. Les deux ouvrages présentés ici exposent les résultats des études archéologiques, ethnographiques, linguistiques et anthropologiques conduites par Waldemar Jochelson dans les îles Aléoutiennes. Il est accompagné dans cette expédition par son épouse Dina Brodsky, qui réalise le travail anthropométrique et est l’auteur d’une grand partie des photographies. Ces livres ont failli ne jamais voir le jour. En effet, la publication du manuscrit, originellement rédigé en russe et achevé en 1916, a d’abord été retardée par la première guerre mondiale. Les bureaux des frères Riaboushinsky à Moscou, où se trouvait le manuscrit, ont ensuite été détruits lors de la révolution russe de 1917. L’auteur a réussi à sauver le manuscrit, les dessins et les cartes, ainsi qu’un jeu de planches. Il réécrira entièrement le texte en anglais alors qu’il séjourne aux États-Unis, où il s’installera définitivement en 1922. Le premier volume, qui traite plus particulièrement des recherches archéologiques, sera publié en 1925. Le second volume, dédié aux résultats ethnographiques de l’expédition, le sera en 1933. La présente édition est enrichie d’un avant-propos des éditeurs de la série, Herbert D.G. Maschner et Katherine L. Reedy-Maschner. Ils rappellent la genèse de l’expédition Kamtchatka-Aléoutiennes, soulignent les qualités d’anthropologue et d’archéologue de l’auteur, l’étonnante modernité de ses méthodes d’investigation et l’éventail de sa palette de compétences, avant de présenter chacun des chapitres de l’ouvrage. Dans la préface du premier volume, Jochelson relate les péripéties de la publication, indique le devenir des collections rapportées et remercie les collègues qui ont apporté leur contribution à l’identification des spécimens. Il retrace dans le premier chapitre l’historique de l’expédition, indiquant les noms des membres responsables des autres branches d’investigation, avant de faire un bref rappel de ses précédents travaux ethnographiques en Sibérie. Il discute ensuite le problème de l’origine des groupes eskimo-aléoutes et du peuplement humain du continent américain à la lumière des théories et travaux disponibles à l’époque. Le chapitre II relate la préparation de l’expédition et du voyage, forcément difficile dans cet archipel de quelque 2000 kilomètres de long, où l’absence de communications régulières entre les îles et les difficultés …