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ont-ils jamais ces enfants de la balle

demandé à leurs mères

si le spectacle allait bientôt finir

pendant que les jambes gracieuses

exécutaient des pas de deux

pour les touristes à pied sec

dans le sable tout-inclus

loin des masures et des grands-mères

ces enfants fixent trois étoiles la nuit

disent tous les chats sont gris

pendant que les hommes vont viennent

et les mères lascives elles dansent

ce n’est pas aujourd’hui

que le grand le terrible amour

avec ça

rien du tout

des cris

sur l’île dans le ventre

on prépare sa sortie

au village de pêcheurs

des murs pastels murmurent

il n’est que révolutions

pour nous les assiégés

ceinturons le bourg

la côte

mais la poitrine se vide

recrache au sol mon pauvre ami

avec son fils

en silence maintenant

reviennent dans le poème les orphelins

à même le corail

où du navire avons sauté

pour voir au fond de l’eau

quoi

mon dieu une main

les doigts crispés

à chialer inouï

que j’étais seule

dans tous mes états

au fond avec un requin

et le tournis

à force de mesurer nos chances

vers qui s’agite à son tour

vers toi nulle part je reviens

comme si les épaules ne ployaient pas

les mains elles en arrachent

et puis et puis

rien sinon

la pauvre humanité souffrante

qui fait ce qu’elle peut

quand les jours lui sont comptés

au cirque de la vie

mères et filles se déhanchent

au sel de la guerre

les hommes plissent les yeux

comme s’ils ne frôlaient pas l’abîme

en même temps que leurs femmes

puis rien

un revers de la main

un radeau d’infortune

emmurées dans ta langue de légende

les beautés de Cuba

de couleur ou pas

de torpeur ou sans

ces corps

non plus superbes mais avec

un peu de voix

pourvu qu’elle ne s’éteigne

au soleil de minuit

sans savoir qui s’en retourne

et pourquoi les barbes déparlent

dans les chemins de croix

de nos coeurs noix de cocos

la fièvre reprend de plus belle

compagnons priez pour nous

qui écornons notre capital

en silence ou dans la joie

le monde alentour

n’y pouvait rien changer

ni l’épouvante ni les os

qui décollaient

à qui mieux mieux la peau

s’arrachant les morceaux

à tel point que séparés enfin

nous étions prêts

au revoir Lucia demain je serai

j’aurai gagné le large

puis l’autre rive j’atteindrai

la main agrippée

à la nuit des temps

mieux que ça j’aurais voulu

mieux que la mélancolie

vessie lanterne

les femmes seules avec leurs rêves

rien que pour ça elles dansent

mais alors ne pas bouger

parler pantois

bonne et heureuse année

je nous souhaite

en ce premier jour d’exil

un long poème se profile

sur l’ombre que ça jette

sur l’autre

partout à force d’être nulle part

ne bougeons plus

avec ces vibrations

pour seules amarres

ce qu’on laisse derrière

et la connaissance du noir

que l’on fuit et pourchasse

fin de la représentation

les danseuses ont regagné la coulisse

bras et jambes désaccordés

sans faire de bruit

sont parties