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Faire advenir une infrastructure douce à l’échelle des agglomérations : l’espace public au risque des modes actifs, de la nature urbaine et du changement environnemental global [Record]

  • Sylvain Petitet and
  • Jérémy Grangé

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  • Sylvain Petitet
    Ingénieur, Docteur HDR en Aménagement et Urbanisme, actuellement Directeur de la Recherche et de l’Innovation d’Egis-France et de sa filiale Atelier Villes & Paysages

  • Jérémy Grangé
    Doctorant CIFRE chez Egis-France, UMR CNRS PACTE (Grenoble)

Alors que les citadins réclament une présence accrue de nature (Bourdeau-Lepage 2013) et d’espaces publics (Paquot 2009), et que les modes de déplacement actifs (marche, vélo, essentiellement) commencent à apparaître comme des modes de déplacements urbains à part entière, les espaces mobilisables pour un retour du végétal sont rares et les villes restent structurées par un réseau de voirie essentiellement aménagé pour la gestion des flux motorisés dans le cadre de politiques sectorielles. Pourtant, en associant ce souci d’une place accrue faite à la nature en ville et celui du développement des modes actifs, on pourrait imaginer la mise en place d’une « infrastructure douce » à l’échelle des quartiers et des agglomérations, qui se superposerait à la grille des infrastructures privilégiant les déplacements motorisés et offrirait ainsi aux citadins un accès facile et agréable aux principaux lieux qui motivent leurs déplacements. Cette infrastructure d’un nouveau genre constituerait une nouvelle forme d’espace public réticulaire et révèlerait de nouvelles modalités urbaines de relation nature/société en contexte de changement environnemental global. Après un rapide retour sur les rationalités aménagistes dominantes et leurs évolutions depuis ces dernières décennies, nous proposons un détour par une histoire sélective et critique de l’urbanisme, une relecture de certains projets d’aménagement emblématiques, pour en tirer les éléments qui pourraient nourrir une possible approche réticulaire et renouvelée des espaces publiques à l’échelle de l’agglomération, ce que nous avons appelé l’infrastructure douce. Nous esquisserons alors quelques éléments de méthode pour une mise en œuvre opérationnelle de cette infrastructure d’un nouveau genre. Comment est-il possible de mettre en réseau, à différentes échelles, les espaces publics plus ou moins végétalisés d’une métropole existante pour améliorer le bien-être des citadins/habitants/citoyens et répondre au désir croissant de nature ou tout du moins de répondre au désir croissant d’une reconnexion avec des éléments et des espaces conçus, vécus et perçus (Lefebvre 2000) comme « naturels » ? Avec quelles méthodologies (diagnostic, conception urbaine, Institutional Design , etc…) ? Au début du XXème siècle, à partir des années 1920’, les aménageurs, urbanistes ingénieurs vont profondément transformer nos villes en cherchant à les adapter à l’automobile, symbole de la modernité, favorisant ainsi la vitesse et les déplacements (individuels) motorisés. Les infrastructures urbaines (transport, eau, énergie), objets hybrides à la fois physiques, technologiques et organisationnels, ont pour fonctions de répondre aux aspects matériels, aux changements organisationnels et à l’évolution des modes de vie imposés par la modernité. En ce qui concerne les espaces publics, l’abandon de la « pensée de parc », dans les métropoles occidentales, au profit de la notion plus générique « d’espace vert » (CIAM) va être une des caractéristique de l’urbanisme de l’après 2 ème Guerre mondiale (Novarina 2003). En France, les grandes percées de l’urbanisme haussmannien de la fin du XIXème siècle, censées aérer les villes, procurer aux citadins de l’air, de la lumière, des espaces de promenade et de rencontre largement dimensionnés et le plus souvent ombragés, se sont peu à peu muées en artères d’une circulation automobile toujours plus importante et envahissante ne laissant aux piétons que des espaces résiduels et aux arbres, un espace mesuré. La ville du piéton a cédé la place à la ville de l’automobile (Wiel 1999, Lavadinho 2011). Les grandes perspectives, les promenades plantées sont devenues pénétrantes ou voiries primaires desservant les villes et leurs quartiers. Les quais des fleuves se sont transformés en voies sur berges. Les squares et jardins publics ne sont désormais le plus souvent que les aménagements de superstructure de parkings enterrés. Les terrains vagues, les espaces provisoirement inoccupés ou les jardins privés ainsi que les espaces de nature et de respiration …

Appendices