ChinatownUn marquage ethnique de l’espace urbain[Record]

  • Yue Liu

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  • Yue Liu
    Universität Stuttgart

Les notions de « paysage culturel » et de « modernité » sont très abstraites et conceptuelles. Communément admise par les autorités de l’UNESCO et les professionnels de la gestion culturelle, l’interprétation de ces deux termes s’avère être difficile et comme un défi. L’invention de ces notions n’est pas due au hasard et correspond à un besoin émergent de définition. De ce fait, elle connait des temporalités, des définitions différentes d’une discipline à l’autre et ainsi des interprétations parfois divergentes. Partant de cette base, mon intention dans cette recherche est de réinterpréter ces termes aussi bien dans leurs diversités, leurs pluralités et leurs relativités en les associant avec le cas du Chinatown. L’immigration chinoise, à travers le monde, a une longue histoire et s’étend à tous les continents. Elle s’est particulièrement développée vers les grandes métropoles mondiales où les immigrants ont construit des quartiers chinois connus sous la dénomination de « Chinatown ». Le Chinatown, en tant que « paysage culturel particulier », se développe sous les deux influences de modernité : la modernité chinoise et la modernité du pays d’accueil. Il se marque ethniquement dans l’espace et se développe au fil du temps. L’homme, ou l’immigrant chinois, confie sa nostalgie du pays à ces microsociétés en s’adaptant à son environnement urbain et social. Sous cette double modernité, la diaspora chinoise développe son savoir faire économique, applique son organisation sociale et ethnoculturelle et déploie son engagement politique. De cette manière, les Chinois d’outre-mer tracent leur identité collective dans le paysage urbain moderne des pays et sociétés d’accueil. Le Chinatown est un lieu où la mentalité et la vie traditionnelle convergent avec la civilisation moderne. Il apporte un témoignage unique sur des traditions vivantes associées à des événements folkloriques. Il témoigne également de la continuité du mode de vie à la chinoise, qui a pour qualité de s’adapter rapidement à son nouvel environnement grâce notamment à son remarquable savoir-vivre. Une autre valeur exceptionnelle vient s’ajouter à ce paysage culturel particulier. Il se caractérise par des ensembles architecturaux chinois aux qualités esthétiques originales. Ce haut-lieu du patrimoine communautaire est considéré comme une « petite Chine » par les pays d’accueil et se métaphorise comme une « racine spirituelle » pour la diaspora chinoise. De nos jours, l’immigration chinoise témoigne de la croissance du développement à l’international de la Chine. La mobilité des Chinois, les échanges de capitaux, de marchandises et d’informations influent non seulement sur l’économie, la politique locale et mondiale, mais aussi sur les espaces sociaux, la culture et la religion. Dans ce contexte de mondialisation, les Chinatowns se développent en un modèle économique, social, culturel et politique. Ce « marquage ethnique » n’est pas uniforme car il varie en fonction des politiques d’immigration et d’intégration des pays d’accueil. En premier lieu, il est important de rappeler les origines de la notion de « paysage culturel ». Le géographe américain Carl Sauer est considéré comme la première personne qui introduisit ce terme en 1925 : « Le paysage culturel est façonné à partir du paysage naturel par un groupe culturel. La culture est l’agent, la nature le moyen, et le paysage culturel le résultat ». Carl Sauer avait été largement influencé par le géographe et explorateur allemand du 19ème siècle, Alexander von Humboldt, qui avait souligné l’interaction entre le paysage physique et les cultures folkloriques et nationales : « La terre et ses habitants se tiennent dans les plus proches relations réciproques. Et l’un ne peut pas être véritablement présenté sans l’autre. Donc l’histoire et la géographie doivent toujours rester inséparables […] ». Par contre, dans les années 1950 et …

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