Comptes rendus

HAVARD, Gilles, The Great Peace of Montreal of 1701. French-Native Diplomacy in the Seventeenth Century (Montreal, McGill-Queen’s University Press, 2001), xvi-312 p.[Record]

  • Michel Duquet

…more information

  • Michel Duquet
    Département d’histoire
    Université d’Ottawa

La traduction anglaise de La grande paix de Montréal de 1701 : les voies de la diplomatie franco-amérindienne de Gilles Havard publié en 1992 par Recherches amérindiennes au Québec est bien plus qu’une simple traduction. L’auteur y a apporté des mises à jour importantes (surtout les travaux réalisés sur les Amérindiens des Grands Lacs) et sa bibliographie a, elle aussi, été refaite. Il répondait ainsi à la critique principale de son premier livre où il s’appuyait presque exclusivement sur la correspondance des autorités coloniales pour extrapoler sur la grande diplomatie de 1701. Havard a soigneusement examiné les échanges diplomatiques entre les nations autochtones et les Français qui ont culminé à la Grande Paix de 1701. En ce faisant, il s’éloigne de la tradition historiographique dont le précepte place l’avènement de Louis XIV ou les nombreux conflits armés entre la France et l’Angleterre en Amérique du Nord à partir des années 1680 comme ayant été les points marquants dans les annales de la colonie. L’auteur considère plutôt que les retombées économiques, politiques, et militaires de la Grande Paix de 1701 — qui annonçait la mission de neutralisation de l’expansion des colonies anglaises de la population française en Amérique du Nord — la place à un pied d’égalité avec les autres événements clefs dans l’histoire de la Nouvelle-France et demandait à être étudiée plus profondément (p. 179). De plus, l’approche multidisciplinaire de Havard nous permet également d’aller au coeur des comportements amérindiens dans leurs démarches auprès des coloniaux français et anglais. L’historien note qu’une analyse anthropologique est nécessaire pour réussir à déchiffrer les manuscrits européens dont les greffiers reproduisaient systématiquement tout ce que disaient les Amérindiens sans pour autant en saisir le symbolisme et les nuances. Il poursuit donc dans la tradition de la « nouvelle histoire amérindienne » qui remet en question les sources précédemment utilisées ad nauseam pour confirmer la prétendue soumission d’Amérindiens aux colons européens. L’auteur décrit admirablement bien la multiplicité de facteurs qui sont entrés en ligne de cause dans le dessein de mettre fin à cinquante ans de guerres iroquoises en 1701. L’insignifiance démographique des Français en Amérique, les ressources financières limitées ainsi que les capacités militaires circonscrites du gouvernement colonial n’ont pas été les seuls enjeux qui ont mené à la Grande Paix. Havard nous rappelle que la motivation des autorités coloniales n’était pas suffisante pour imposer la loi puisque la population française ne représentait qu’un groupe parmi les quarante nations qui ont envoyé quelque 1300 délégués à Montréal en 1701 (p. 4). L’importance de la diversité des nations autochtones a déterminé l’impasse des négociations qui se sont poursuivies entre 1697 (l’année d’une signature de paix entre la France et l’Angleterre) et 1701. C’est que la trentaine de nations des Grands Lacs avaient chacune leurs propres objectifs indépendamment des désirs des Français et de leurs propres alliés amérindiens. Pour leur part, les cinq nations de la Confédération iroquoise ne représentaient pas plus un groupe homogène. La rivalité entre les nations francophiles, anglophiles et neutres iroquoises a retardé la paix pour au moins trois ans (p. 66). L’analyse minutieuse du protocole amérindien (adopté par les représentants coloniaux) ainsi que celui de l’ordre de préséance suivie dans la documentation diplomatique du traité de la Grande Paix de Havard nous éclaire sur l’influence qu’avaient les nations autochtones sur les Français ainsi que sur la hiérarchisation existante des nations au sein de l’alliance tripartite. Havard tranche également sur le résultat obtenu par les différents cosignataires de la convention. En ce faisant, il va à l’encontre de plusieurs hypothèses historiques reçues quitte à priser certains collègues. L’auteur affirme que les Iroquois …