Comptes rendus

HAMEL, Thérèse, Michel MORISSET et Jacques TONDREAU, De la terre à l’école. Histoire de l’enseignement agricole au Québec, 1926-1969 (Montréal, Hurtubise HMH, 2000), 366 p.[Record]

  • Robert Gagnon

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  • Robert Gagnon
    Département d’histoire
    Université du Québec à Montréal

L’histoire de l’enseignement agricole au Québec que nous proposent Thérèse Hamel, Michel Morisset et Jacques Tondreau porte en fait sur une catégorie d’écoles d’agriculture qui, entre 1926 et 1969, a donné un cours moyen. Cette formation, moins poussée que celle des écoles supérieures d’agriculture d’Oka, de Sainte-Anne-de-la-Pocatière ou du collège Macdonald, était plutôt de niveau post-primaire et s’adressait aux fils d’agriculteurs appelés à prendre la relève à la ferme familiale. Pour relater l’histoire de ces écoles, aujourd’hui disparues et peu connues des historiens, les auteurs font une longue incursion dans le passé, remontant jusqu’en Nouvelle-France pour retracer les « expériences pionnières » en matière d’enseignement agricole. Ils s’attardent un peu plus au xixe siècle qui a vu l’émergence des premières écoles d’agriculture à Sainte-Anne-de-la-Pocatière et à Oka. Le cours moyen naît d’ailleurs à cette époque au sein de ces écoles. Il faut cependant attendre la décennie des années 1920 pour qu’un mouvement, regroupant des porte-parole des milieux agricoles, des éducateurs et surtout du clergé, parvienne à convaincre le gouvernement d’ouvrir, en 1926, une première école moyenne d’agriculture à Rimouski. Comme le soulignent les auteurs, l’exode des ruraux vers les villes, la crise agricole qui fait s’effondrer les prix, le développement de l’agriculture marchande sont autant de facteurs qui militent en faveur d’une intervention gouvernementale. Comme les deux écoles supérieures d’agriculture francophones, l’école moyenne de Rimouski sera dirigée par des religieux. Sous la tutelle du Séminaire de Rimouski, l’école est largement subventionnée par le gouvernement et bénéficie d’un montant substantiel, avancé par l’État et le Séminaire, pour la construction d’un immeuble et d’une ferme. Le programme d’études s’échelonne sur deux ans et tend à s’adapter aux spécialités de la région. Pour le gouvernement, l’expérience est coûteuse et la création d’écoles du même genre n’est pas au programme à la fin des années 1920. Les auteurs nous rappellent que la crise économique qui frappe le monde industrialisé touche tous les secteurs de l’économie québécoise et contraint le gouvernement à revoir ses politiques en matière d’agriculture. Des plans de colonisation sont envisagés et l’enseignement moyen agricole voit une nouvelle filière se développer, celle des sections moyennes agricoles, instaurant par le fait même deux types d’institutions pour ce niveau d’enseignement. Dans les années 1930, trois nouvelles écoles moyennes voient le jour (Sainte-Martine, Nicolet et Chicoutimi). Ce sont cependant les sections moyennes qui essaiment aux quatre coins de la province. En effet, une douzaine de ces sections sont créées entre 1932 et 1940. Beaucoup moins financées que les écoles moyennes, sous-équipées et offrant une capacité d’accueil très faible, les sections moyennes agricoles, nous disent les auteurs, essuient de nombreuses critiques au cours de cette période. On doute même, dans certains milieux, qu’elles puissent offrir un véritable enseignement moyen agricole. Dans les années 1940, le ministère de l’Agriculture tente de répondre aux doléances des autorités religieuses et du monde rural en général en élaborant un nouveau modèle d’école d’agriculture. L’impact des Unionistes, surtout, se fait sentir. L’agriculture occupe une place privilégiée dans les politiques du gouvernement Duplessis. À partir de 1944, plusieurs sections moyennes sont converties en écoles régionales d’agriculture, tandis que d’autres ferment leurs portes. Le paysage de l’enseignement agricole change. Désormais, un réseau de 17 écoles moyennes et régionales d’agriculture est en place pour couvrir l’ensemble du Québec. Chacune de ces écoles reçoit une subvention qui lui permet d’assurer un enseignement agricole assez bien adapté aux besoins de la classe agricole. L’enseignement moyen agricole ne résistera cependant pas au vent de changement qui souffle sur le Québec au cours des années 1960. La prospérité économique de l’après-guerre, un système d’éducation critiqué de toutes …