Comptes rendus

Hayday, Matthew, Bilingual Today, United Tomorrow. Official Languages in Education and Canadian Federalism (Montréal, McGill-Queen’s University Press, 2005), xiv-258 p.[Record]

  • Raymond-M. Hébert

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  • Raymond-M. Hébert
    Collège universitaire de Saint-Boniface

Matthew Hayday, détenteur d’une chaire doctorale au Centre d’études canadiennes à l’Université Mount Allison au Nouveau-Brunswick, nous livre ici une oeuvre magistrale et désormais incontournable au sujet de la création et du développement de l’éducation dans les deux langues officielles au Canada. C’est un volet de l’histoire encore plus vaste et complexe qu’est celle du bilinguisme au Canada, produit, dans un premier temps, des constats de la Commission Royale d’enquête sur le bilinguisme et le biculturalisme durant les années 1960, présidée par André Laurendeau et Davidson Dunton, et ensuite de la volonté implacable de Pierre Elliott Trudeau et de son allié inconditionnel, Gérard Pelletier, durant les années 1970 et 1980 dans l’implantation d’une vision particulière du bilinguisme au Canada. Hayday présente admirablement bien le contexte plus large du débat, à savoir l’avenir de la fédération canadienne elle-même. Il revient constamment aux enjeux et aux visions en conflit, notamment celle d’un bilinguisme « territorial », où le Québec serait francophone et le reste du Canada anglophone (la vision préférée par Laurendeau lui-même et plus tard par des auteurs tels Kenneth McRoberts) versus la vision d’une dualité linguistique institutionnelle pancanadienne adoptée très tôt et sans déviation par le gouvernement Trudeau. Hayday présente toutes les nuances qui s’imposent, soulignant, par exemple, combien Laurendeau a été déchiré entre sa loyauté envers le Québec et son constat des injustices historiques infligées aux minorités francophones ailleurs au Canada. Sur un autre plan, l’évolution du programme de bilinguisme en éducation (PBÉ) et de son successeur, le programme des langues officielles en éducation (PLOÉ), s’est déroulée dans le contexte d’un fédéralisme en rapide transformation, ou plutôt de visions largement contradictoires du fédéralisme. D’un côté se trouvaient (et se trouvent toujours) les adeptes du fédéralisme « intra-étatique », caractérisé par la coopération, le pragmatisme, le compromis et dominant depuis la Deuxième Guerre mondiale jusqu’aux années 1960 sous Pearson. De l’autre, on assiste à la montée du fédéralisme « inter-étatique », caractérisé par une concentration de l’autorité dans les hauts échelons des gouvernements, de conférences fédérales-provinciales hautement médiatisées, et de la dominance de questions touchant aux champs de compétence. C’est dans ce contexte changeant, ponctué par les branle-bas politiques que provoquèrent des événements comme la première victoire du Parti québécois en 1976, le référendum de 1980, les débats constitutionnels de 1980-1981 et l’adoption de la Charte des droits et libertés en 1982 (pour ne nommer que ceux-là) que se développèrent les programmes de bilinguisme en éducation. Comprenant la complexité du sujet et la gamme éblouissante des acteurs qui y ont participé, Hayday a effectué des recherches dans la plupart des provinces canadiennes ainsi qu’à Ottawa. Cette recherche d’envergure se reflète dans la structure même du livre, alors que dans plusieurs chapitres, nous trouvons des sections touchant aux événements et aux politiques adoptées dans les provinces, notamment le Nouveau-Brunswick, l’Ontario, le Manitoba et l’Alberta. Cette structure devient un peu prévisible et il est difficile peut-être de maintenir le même niveau d’intérêt par rapport à l’histoire dans chaque province ; par contre, cette approche structurelle a l’avantage de nous faire comprendre le fait que ces lois et ces programmes touchaient toutes les régions du pays ainsi que la grande gamme de politiques et de programmes qui ont été adoptés au cours des années dans ce domaine par les différentes provinces. En lisant cette histoire, nous nous rendons compte assez rapidement du long chemin parcouru depuis la fin des années 1960 en matière linguistique. À partir des tâtonnements du début et même d’hostilité active chez certaines provinces par rapport au bilinguisme en éducation et spécifiquement par rapport aux écoles entièrement françaises, en relativement …