Comptes rendus

Lacroix, Jean-Michel et Paul-André Linteau, dir., Vers la construction d’une citoyenneté canadienne (Paris, Presses Sorbonne Nouvelle, 2006), 247 p.[Record]

  • Stéphane Savard

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  • Stéphane Savard
    Département d’histoire et CÉLAT, Université Laval

Appelé à « […] renouveler le discours officiel et souvent convenu sur le multiculturalisme canadien en essayant d’en saisir l’évolution et la complexité » (p. 11), l’ouvrage collectif Vers la construction d’une citoyenneté canadienne renferme treize textes complémentaires et diversifiés. S’adressant à un public plutôt universitaire, familiarisé avec les approches de l’histoire, de la science politique, de la sociologie et des sciences de l’éducation, ces contributions traitent surtout des enjeux du multiculturalisme dans « ses dimensions éducative et religieuse » (p. 17), plus particulièrement en ce qui a trait à l’intégration des immigrants et membres des communautés ethniques. D’emblée, les contributions de Jean-Philippe Croteau, Miguel Simão Andrade, Robert Gagnon, Laurent Batut, Roberto Perin, Nadia Azzimani et Mélanie Chabot abordent les politiques et interventions des commissions scolaires ou des membres des élites éducatives en lien avec la promotion du multiculturalisme. Là, certains tiennent en considération les luttes que se livrent les représentants des commissions scolaires francophones et anglophones pour l’intégration des nouveaux écoliers allophones, alors que d’autres se penchent plutôt sur les stratégies et programmes élaborés par ces leaders afin de préconiser des valeurs d’ouverture à l’Autre et de respect de la diversité culturelle. De ce lot, l’étude de Roberto Perin se démarque de celle de ses collègues avec son analyse des réseaux institutionnels religieux et ethniques de Toronto. Présents dans les années 1940, 1950 et 1960, ceux-ci permettent aux immigrants de s’intégrer plus rapidement et plus efficacement à leur nouveau milieu de vie. Dans un autre ordre d’idées, les contributions de Gwendolyne Cress-man, Ariane Cyr, Gabriella Falcicchio et Massimo Rubboli analysent l’évolution des politiques de multiculturalisme déployées par l’État fédéral et les États britanno-colombien, ontarien et québécois. Si la plupart s’en tiennent à interpréter la conception du multiculturalisme et de ses politiques linguistiques – ou autres – par les représentants politiques, éducationnels ou religieux, le texte d’Ariane Cyr se distingue en laissant la parole aux immigrants eux-mêmes. Ainsi, il lève le voile sur la perception qu’ont les Haïtiens de Montréal des politiques canadienne et québécoise de multiculturalisme. Au contraire de ce qui arrive parfois dans l’élaboration d’un ouvrage collectif, les articles publiés ne s’égarent pas de la problématique générale énoncée par les directeurs du recueil, leur pertinence ne faisant aucun doute. Il en va de même pour le texte de Jean-Michel Lacroix qui, en postface et en guise d’ouverture, réfléchit sur la laïcité française et les écoles républicaines afin d’établir implicitement un élément comparatif avec la situation québécoise et canadienne. Dans l’ensemble, l’ouvrage respecte son objectif principal dans la mesure où il contient des contributions originales qui viennent apporter un nouveau regard et une nouvelle perspective à cette valeur canadienne qu’est le multiculturalisme. Pour les dimensions scolaires et religieuses de l’ouverture aux immigrants et aux communautés ethniques, il réussit à en analyser l’évolution depuis la fin du xixe siècle jusqu’à aujourd’hui. Pour ce faire, plusieurs textes se complètent alors que très peu se recoupent, ce qui met en lumière une des forces du livre : on sent la présence d’un important travail de direction ayant certainement balisé les champs d’études de chacun des contributeurs. Sur une note moins positive, le livre renferme à notre avis deux problèmes non négligeables. Le premier réside dans le décalage évident entre son titre – faisant explicitement référence à la notion de citoyenneté canadienne – et le contenu de ses articles plutôt centré sur le multiculturalisme, l’éducation et le problème religieux. Mis à part les textes de Laurent Batut, Gwendolyne Cressman, Ariane Cyr, Mélanie Chabot et Gabriella Falcicchio, qui utilisent la notion de citoyenneté d’une façon plus ou moins centrale, l’introduction et les autres …