Comptes rendus

Piché, Sébastien, La recherche collégiale : 40 ans de passion scientifique (Québec, Les Presses de l’Université Laval, 2011), 262 p.[Record]

  • Pierre Doray

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  • Pierre Doray
    Centre interuniversitaire de recherche sur la science et la technologie, Université du Québec à Montréal

Il convient d’abord de souligner le grand intérêt de cet ouvrage qui permet d’éclairer une face cachée de l’histoire des cégeps, soit l’institutionnalisation de la recherche dans cet ordre d’enseignement. L’auteur et ses deux collaboratrices (Lynn Lapostolle et Monique Lasnier) remontent à la naissance des cégeps pour dégager la lente progression des activités de recherche au sein des établissements, leur reconnaissance institutionnelle et la création de l’ARC (Association pour la Recherche au Collégial), qui se veut un lieu de partage et de promotion de la recherche. L’auteur décrit le travail collectif nécessaire sur le plan institutionnel, intellectuel et organisationnel pour créer une tradition de recherche dans ces institutions. Cette institutionnalisation n’a pas suivi une pente linéaire. Depuis l’évocation de la recherche éducative ou pédagogique dans le rapport Parent, puis la création des cégeps et jusqu’à la reconnaissance institutionnelle actuelle de différents types de recherche, une longue route sinueuse a été parcourue, que reprennent les six périodes dégagées par Piché. Les trois premières décrivent la progression de ces activités entre 1967 et 1987. La période suivante (1988-1995) est qualifiée d’âge d’or. Cette faste période est le résultat de l’appui du gouvernement du Québec qui augmente le financement de la recherche, accroît le nombre de postes réservés à cette activité, intègre dans la mission des cégeps la recherche et assure le soutien à la recherche technologique avec, entre autres, le développement des centres spécialisés (futurs centres collégiaux de transfert de technologies). Une croissance des travaux de recherche ainsi que des publications se fait dès lors sentir. C’est aussi à ce moment que des universités créent le statut de professeur associé pour favoriser l’accès des professeurs des cégeps aux ressources financières et aux infrastructures universitaires. Un rapprochement université-cégep s’opère. Finalement, plusieurs collèges adoptent aussi des politiques institutionnelles de la recherche. Toutefois, dès 1996 et jusqu’à l’aube des années 2000, la recherche collégiale « s’écroule » pour reprendre le titre du chapitre. Deux événements seraient à la source de ce retournement de situation. D’une part, le Fonds FCAR abolit, en 1991, le programme de financement de la recherche collégiale ; les effets se font sentir quelques années plus tard. D’autre part, à un moment où la priorité gouvernementale est la lutte au déficit, le financement des dégrèvements de cours pour des fins de recherche est fortement réduit. Au cours de la dernière période, qui s’amorce en 2000, les principaux artisans de la recherche oeuvrent à trois chantiers : améliorer le financement de la recherche afin de compenser les pertes de la période précédente, étendre la diffusion et accentuer la valorisation de la recherche et finalement assurer une plus grande reconnaissance de la valeur des travaux qui sont réalisés dans les cégeps. Ce travail est toujours en cours. À la lecture de l’ouvrage, nous comprenons que plusieurs facteurs ont contribué à développer les activités de recherche. Le premier est la mobilisation de nombreux professeurs de cégep qui ont, individuellement, et surtout collectivement, mis à l’ordre du jour la recherche comme pratique légitime. La contribution de nombreux chercheurs est d’ailleurs soulignée tout au long de l’ouvrage. La création de l’ARC est également un événement central dans la promotion de la recherche. Un second facteur est le soutien gouvernemental qui, parce qu’inégal, a contribué aux fluctuations de la recherche au fil du temps. La politique économique du gouvernement, dans la première moitié des années 1980, a contribué à structurer la recherche technologique avec la création des premiers centres spécialisés qui sont, par la suite, devenus les centres collégiaux de transfert technologique. Cela est dit dans l’analyse, mais l’auteur n’insiste pas sur cette dimension essentielle. Le gouvernement les …