Comptes rendus

Panneton, Jean-Charles, Pierre Laporte (Québec, Septentrion, 2012), 445 p.[Record]

  • Marc-André Robert

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  • Marc-André Robert
    Département d’histoire, Université Laval

Après s’être penché, au début des années 2000, sur la carrière politique de l’ancien chef libéral et penseur de la Révolution tranquille Georges-Émile Lapalme (VLB, 2000), premier ouvrage substantiel sur le sujet, Jean-Charles Panneton, politologue et historien, nous fait le plaisir ici d’une nouvelle biographie politique (n’en déplaise à l’auteur, qui préfère plutôt décrire son travail comme un « parcours journalistique et politique » [p. 27]) d’un homme tout aussi méconnu, sinon (volontairement ?) écarté de l’histoire : Pierre Laporte. En constituant lui-même un impressionnant (je pèse mes mots !) corpus rassemblant l’ensemble des textes journalistiques publiés par le principal intéressé sur une période de seize ans ( !), ses interventions à l’Assemblée législative de Québec (journaux des débats de l’Assemblée), diverses archives provenant de fonds de personnages contemporains à Laporte, de même que des entrevues menées avec ses anciens collègues et des membres de sa famille, Panneton s’est assuré d’offrir un travail rigoureux et minutieux à la hauteur d’un grand historien. Le portrait qu’il dresse de Pierre Laporte est à la fois intime, honnête et intègre. Ce parcours professionnel échelonné sur près de trente ans (1944 à 1970) que décrit Panneton permet assez justement de rétablir la mémoire de l’homme, en plus de dévoiler certains pans de notre histoire trop longtemps laissés dans l’ombre. L’ouvrage de Panneton se divise en six chapitres soigneusement sous-divisés (ce qui facilite d’ailleurs grandement la lecture !) partant de l’enfance de Pierre Laporte et de sa formation scolaire (chapitre 1) jusqu’à son décès et la commémoration de sa mort (chapitre 6). Fait notable, agréable, l’écriture de l’auteur suscite l’intérêt tout au long de l’ouvrage que j’ai dévoré d’un seul trait. Journaliste fougueux et déterminé, adversaire impitoyable du premier ministre Maurice Duplessis et ministre libéral sous les gouvernements Lesage et Bourassa, Pierre Laporte est un personnage politique et journalistique d’envergure. Panneton rappelle son parcours professionnel depuis ses débuts. Embauché par Le Devoir en 1944 comme chroniqueur universitaire, il y demeure jusqu’en 1961 et devient l’un des tous premiers journalistes d’enquête (chapitre 2). Si cette période de sa carrière est peut-être la plus connue (ou la moins méconnue ?), il n’en demeure pas moins que l’auteur sait en révéler avec détails et preuves les étapes importantes. Promu au poste de courriériste municipal de Montréal en 1946, il gravit rapidement les échelons. En 1947, le nouveau directeur du Devoir, Gérard Filion, le nomme correspondant parlementaire à Québec et directeur de l’information. C’est alors qu’il commence ses premières enquêtes journalistiques. Talentueux, consciencieux et passionné, il devient vite la bête noire du premier ministre et chef de l’Union nationale Maurice Duplessis. Il ne manque notamment pas de critiquer les gouvernements provincial et fédéral lors des événements de la grève d’Asbestos en 1949. Se réclamant d’une éthique journalistique indépendante (bien à sa place au Devoir, on en convient), il sait toutefois reconnaître les bons coups (la loi de l’impôt sur le revenu par exemple). Mais c’est son oeil de faucon à l’affut de la moindre dérive qui agace le gouvernement Duplessis. En 1958, Laporte révèle à la une du quotidien le scandale du gaz naturel qui implique alors plusieurs membres du gouvernement de l’Union nationale, dont Duplessis lui-même, accusés d’avoir spéculé sur la vente du réseau public de gaz naturel à l’entreprise privée. Un événement que l’on considère, encore aujourd’hui, comme un sérieux clou dans le cercueil de l’Union nationale, à la veille des années 1960 et de cette Révolution tranquille qui se prépare en catimini. Il ne fait nul doute pour Panneton que, dans sa carrière de journaliste au Devoir, Laporte, « par ses enquêtes, ses éditoriaux et …