Comptes rendus

Gaudreau, Guy, Blais, Sophie et Kevin Auger, Mine, travail et société à Kirkland Lake (Sudbury, Éditions Prise de parole, 2016), 307 p.[Record]

  • Marc Riopel

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  • Marc Riopel
    Ph.D. Histoire, Chercheur indépendant

C’est avec grand intérêt que j’ai accepté de faire le compte rendu de ce livre sur Kirkland Lake, une ville minière du nord de l’Ontario, située à proximité du Témiscamingue québécois, région où j’ai grandi et dont j’ai fouillé l’histoire de façon professionnelle pendant plusieurs années. J’ai souvent entendu parler de Kirkland Lake, mais surtout de façon anecdotique. Ce livre de Guy Gaudreau, Sophie Blais et Kevin Auger m’offre donc la possibilité de plonger dans l’histoire, la grande cette fois-ci, de Kirkland Lake, alors à son apogée (1930-1942). Il faut mentionner que ce livre a failli ne pas voir le jour puisqu’il repose sur un fonds d’archives sauvé in extremis de la destruction par Guy Gaudreau. Ce fonds d’archives de la Lake Shore Gold Mine et, dans une moindre mesure, celui de la société minière Wright-Hargreaves, permettent aux auteurs de proposer une version originale et nouvelle de l’histoire des mines, non seulement celles de Kirkland Lake, mais de l’ensemble des mines canadiennes. En effet, jusque-là, l’historiographie minière, incluant les travaux de Gaudreau lui-même, présentait seulement un aspect de la vie et du travail miniers, soit celui des mineurs du fond, soit celui des ouvriers de surface, ou encore le contexte socioéconomique du développement minier. Trop souvent, souligne Gaudreau, les historiens et les cinéastes ont insisté sur le caractère misérabiliste du travail et de la vie des mineurs et de leurs familles. Dans ce livre, Gaudreau, Auger et Blais présentent une histoire complète des travailleurs miniers, tant ceux oeuvrant dans les galeries et tunnels souterrains que ceux travaillant à la surface, dans les bureaux et autres ateliers nécessaires au traitement et l’expédition du minerai, incluant la construction et l’entretien des bâtiments. Ils brossent le portrait d’un mineur de carrière indépendant et en plein contrôle de ses décisions, heureux et fier d’exercer ce métier. Ce livre fait ressortir l’existence de deux univers miniers parallèles, qui se remarquent notamment dans les horaires et les conditions de travail, mais aussi dans leurs pratiques culturelles et de loisirs comme le décrivent si bien les auteurs, comme le résument les paragraphes suivants. Le premier chapitre décrit très brièvement l’histoire de Kirkland Lake et de la mine Lake Shore, s’attardant aux tendances générales de la production minière et des conditions de travail. Les chapitres 2 à 5 nous transportent au coeur de l’histoire des mineurs de Kirkland Lake et de la contribution originale de ce livre à l’historiographie. Le chapitre 2 décrit l’organisation du travail dans une mine d’or, ce qui s’avère fort instructif pour tout profane en histoire minière en plus de permettre de comprendre les deux réalités du travail dans une mine, tant au fond qu’à la surface, et d’en apprendre sur les types de métiers que l’on y retrouve. Le chapitre 3 traite des travailleurs de carrière et il met l’accent sur la stabilité des employés, contrastant avec l’image du mineur nomade. Ce dernier occupe toujours une place importante, mais ce chapitre nous fait découvrir qu’un nombre important d’employés de la Lake Shore décide de faire carrière à la mine, malgré les conditions difficiles. Le chapitre 4 fait le pont entre la fiction et la réalité puisqu’il raconte les accidents d’Oscar Bougie, un personnage fictif dont le parcours a été construit à partir de diverses histoires réelles. Guy Gaudreau fait raconter à son personnage les divers accidents qu’il a subis, en utilisant un langage d’époque et en intervenant dans le récit pour bien en situer le contexte. Le chapitre 5 présente un autre aspect méconnu de l’histoire des travailleurs miniers, celui des congés, des fins de semaine et des vacances annuelles non payés, pris …