Comptes rendus

Allard, Michel, Paul Aubin, Félix Bouvier et Rachel Desrosiers, Une histoire de la formation des maîtres au Québec (Québec, Septentrion, 2019), 232 p.[Record]

  • Louise Bienvenue

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  • Louise Bienvenue
    Université de Sherbrooke

Après s’être intéressé à L’histoire nationale à l’école québécoise (Septentrion, 2012, avec Marie-Claude Larouche), le trio composé de Michel Allard, Paul Aubin et Félix Bouvier se penche sur la formation des maîtres au Québec, en s’adjoignant cette fois l’expertise de la spécialiste des sciences de l’éducation Rachel Desrosiers. Ce projet ambitieux, qui consiste à retracer quatre siècles d’histoire, est réalisé en bonne partie à l’aide d’études de cas. Le premier chapitre, signé Michel Allard, adopte une allure classique, embrassant toute la période qui va du Régime français à la fondation des premières écoles normales publiques au milieu du XIXe siècle. À l’époque où le réseau éducatif ne peut encore prétendre au nom de « système », le métier d’enseignante et d’enseignant s’apprend surtout sur le terrain. La nécessité d’une qualification et d’une certification des maîtres se fait sentir plus fortement lorsqu’on cherche à implanter un véritable système scolaire à partir des lois créant successivement l’Institution royale pour l’avancement des sciences (1801), les écoles de fabrique (1824) et les écoles de syndics (1829). Trois dates marquantes sont à retenir : en 1822, un premier traité de pédagogie est publié au Québec, rédigé par Joseph-François Perreault ; en 1831, une loi crée la fonction de visiteur des écoles ; et l’année suivante, une autre loi impose aux candidats au métier d’enseignant d’obtenir un certificat de compétence et de moralité. Ce n’est toutefois qu’après l’Union que seront mis en place, à Montréal et à Québec, des bureaux d’examinateurs délivrant des brevets. Le chapitre 2 examine l’implantation des écoles normales publiques dans la seconde moitié du XIXe siècle, en réponse aux recommandations du rapport Sicotte, qui en 1853 avait conclu à l’incompétence des enseignants. La création du Conseil de l’instruction publique (1856) de même que l’ouverture de trois écoles normales – Laval (à Québec), McGill et Jacques-Cartier (à Montréal) – doivent remédier à ces déficiences et favoriser l’avancement de l’éducation. Pour rendre compte de cette étape, Michel Allard se concentre plus particulièrement sur l’École normale Jacques-Cartier, depuis sa fondation en 1857 jusqu’au transfert de la formation des maîtres à l’université à la fin des années 1960. C’est à travers l’oeuvre des principaux directeurs et maîtres de l’école que cette histoire est relatée. Certains d’entre eux étaient aussi auteurs de traités pédagogiques : Hospice-Anthelme Verreau, Roland Vinette, etc. L’analyse s’attarde, entre autres, à l’équilibre changeant entre les matières d’enseignement et les savoirs pédagogiques proprement dits, ces derniers prenant plus d’importance au fil des ans. L’auteur s’intéresse aussi aux rapports Église-État qui forment la toile de fond de cette période. Plus descriptif, le chapitre 3 suit l’évolution de la formation des enseignantes à Montréal dans la longue durée. Rachel Desrosiers y observe comment celle-ci accompagne le difficile développement de l’éducation des filles, depuis les initiatives pionnières de Marguerite Bourgeoys en Nouvelle-France jusqu’à la Révolution tranquille. Le milieu du XIXe siècle est déterminant à cet égard, marqué par l’entrée en scène de plusieurs congrégations religieuses féminines spécialisées. Certaines viennent d’Europe, telles les soeurs du Sacré-Coeur et de Sainte-Croix. D’autres sont des fondations locales, comme les soeurs des Saints Noms de Jésus et de Marie. Lorsqu’à partir de 1856 des écoles normales d’État sont créées pour former les maîtres, la formation des femmes enseignantes laïques catholiques échoit à des communautés religieuses : les Ursulines à Québec puis, quelques décennies plus tard, la Congrégation de Notre-Dame à Montréal. Avec le développement de l’enseignement supérieur des filles – toujours contrarié, puisque la « femme savante » effraie –, la nécessité d’une formation pédagogique supérieure s’impose. En 1926, l’ouverture de l’Institut pédagogique de la Congrégation de Notre-Dame est …