Comptes rendus

Aurélien, Maxime et Ted Rutland. Il fallait se défendre. L’histoire du premier gang de rue haïtien à Montréal (Montréal, Mémoire d’encrier, 2023), 272 p.

  • Dan Horner

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  • Dan Horner
    Université métropolitaine de Toronto

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Cover of Volume 78, Number 1, Summer 2024, pp. 1-175, Revue d’histoire de l’Amérique française

Le lecteur a l’impression que la mobilisation des expériences d’Aurélien dans les rues du Montréal des années 1980 pour intervenir dans les débats du 21e siècle sur le racisme et l’explosion des budgets de la police a alimenté ce projet de livre. Dans le contexte historiographique, cependant, Aurélien et Rutland nous ont donné un aperçu fascinant de la vie quotidienne à Montréal pendant cette période pour les immigrants haïtiens vivant dans le nord de la ville. L’histoire d’Aurélien nous plonge dans un milieu culturel que Sean Mills a commencé à cartographier dans Une place au soleil (2016) : des Haïtiens qui fuient le régime de Duvalier et se réfugient à Montréal, un endroit qu’ils découvrent rapidement comme étant problématique en soi. Pour Aurélien, ce voyage l’a mené du quartier Bel-Air de Port-au-Prince au quartier Saint-Michel de Montréal, avec des séjours plus courts dans l’enclave haïtienne de Crown Heights à Brooklyn. Après s’être installée à Montréal, la famille d’Aurélien s’est imposée comme membre éminent d’une communauté haïtienne de classe ouvrière. Alors que les parents de nombreux camarades d’Aurélien conduisaient des taxis et travaillaient dans les usines de vêtements le long de la rue Chabanel à Ahuntsic, les siens géraient un restaurant local où sa mère proposait une cuisine haïtienne. Son père organisait une ligue de football locale et tenait une loterie dans leur modeste maison, qui devint elle-même un pôle communautaire et, par la suite, la cible de la surveillance policière. Alors qu’Aurélien entrait dans l’adolescence, ses liens familiaux et son dynamisme personnel ont rendu presque inévitable le fait qu’il devienne le point central d’un cercle social qui s’est formé autour du parc Sainte-Bernadette de la rue Bélanger. Les éléments concernant l’attirance croissante d’Aurélien pour les pratiques culturelles de l’Amérique noire au détriment de sa propre identité haïtienne au cours de son adolescence sont particulièrement intrigants. Le rôle principal de Maxime Aurélien dans les Bélangers est au coeur d’Il fallait se défendre. Aurélien et Rutland commencent par affirmer que notre compréhension conventionnelle de groupes comme les Bélangers est enracinée dans un paradigme raciste construit par la police, les journalistes et les universitaires — les criminologues en particulier. Ces forces puissantes voudraient nous faire croire que ces prétendus gangs agissent en marge du crime organisé et que leur principale motivation est de tirer profit d’activités illicites liées à la drogue et au commerce du sexe. Cette activité basculerait fréquemment dans des conflits violents qui font trop souvent des victimes innocentes. Aurélien et Rutland proposent ici un paradigme concurrent. S’appuyant sur ses expériences personnelles avec les Bélangers, Aurélien soutient que l’impulsion derrière le groupe était de se défendre contre un barrage persistant d’hostilité raciste que ses membres rencontraient dans les rues de Montréal, en particulier lorsqu’ils s’aventuraient loin des enclaves haïtiennes du nord de la ville. Il fallait se défendre regorge de récits poignants sur ce racisme, où les épithètes étaient toujours accompagnées d’une menace immédiate de violence. Ces attaques se sont produites n’importe où, de la station de métro Berri-de-Montigny aux boîtes de nuit de la rive sud et dans d’innombrables endroits entre les deux. Alors que les générations précédentes de migrants haïtiens, selon Aurélien, avaient appris à ignorer ces attaques, les Bélangers les ont regardées en face et ont commencé à les repousser, lançant une campagne de vigilantisme qui a rapidement attiré l’attention des journalistes et de la police. Une autobiographie est toujours un bilan du passé, un décompte des bonnes actions et des fautes commises. Il fallait se défendre, porté par la voix d’Aurélien, mais avec des interventions périodiques de Rutland, est construit autour de …