Comptes rendus

LaRose, André. Joseph Barthélemy Robert et son cercle familial, 1826-1951. Portrait d’une famille d’entrepreneurs de Beauharnois (Montréal, Éditions Histoire Québec, 2023), 120 p.[Record]

  • Jocelyn Morneau

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  • Jocelyn Morneau
    Université du Québec à Trois-Rivières

En 1957, Norman W. Taylor soutenait une thèse de doctorat en économie à l’Université Yale intitulée « A Study of French Canadians as Industrial Entrepreneurs » dans laquelle il affirmait que l’entrepreneur canadien-français se caractérisait par son individualisme, sa gestion paternaliste, son manque d’ambition et sa résistance à la croissance. Bref, Taylor le qualifiait d’homme d’affaires traditionnel digne du capitalisme du 18e siècle. Dans leur enquête sur les liens entre la réflexion sociologique américaine dans la première moitié du siècle dernier et celle du Québec en pleine gestation à l’époque (revue Mens, 2019), les sociologues Frédéric Parent et Paul Sabourin considèrent que les travaux de Taylor sur le Québec sont empreints de « présupposés idéologiques ». Pour notre part, nous estimons, plus crûment, que les assertions de Taylor prenaient appui sur un fatras de préjugés. Au cours des dernières décennies, des recherches ont bien montré le dynamisme et la vivacité de l’entrepreneuriat canadien-français du 18e au 20e siècle — aussi bien dans les villes que dans les campagnes —, et ce, malgré le peu de moyens dont il disposait. Elles nous ont fait découvrir un entrepreneuriat attentif aux appels du marché et à l’affût des derniers développements en matière industrielle et technique. Le livre d’André LaRose constitue une preuve additionnelle. À l’origine de cette investigation : le désir de l’auteur de savoir ce qui est arrivé aux droits sur les eaux de la rivière Saint-Louis dans la seigneurie de Beauharnois — espace qui a fait l’objet de sa thèse de doctorat – à la fin du régime seigneurial en 1854. Un manufacturier canadien-français, Joseph Barthélemy Robert, s’en est porté acquéreur. LaRose a voulu en savoir davantage sur ce dénommé Robert. De fil en aiguille, il en est venu à tracer le profil détaillé de sa famille, qui a joué un rôle de premier plan à Beauharnois ; une famille issue du mariage d’un Canadien français et d’une dame d’origine anglophone. Entrepreneur dans l’âme, Robert est le fondateur de la manufacture de laine de Beauharnois (1858), de la Beauharnois Light, Heat and Power (1902) et le propriétaire d’un moulin à farine à partir de 1892. La ville de Beauharnois lui doit son électrification en 1889. Pour mener son projet à terme, LaRose a eu recours à un large éventail de sources : registres de l’état civil, listes nominatives des recensements canadiens, greffes de notaires, registre foncier du Québec, annuaires (Lovell, The Ottawa City Directory), archives judiciaires, bases de données sur la toile, et 19 journaux qu’il a soumis à l’océrisation. Le livre comporte 10 parties ou chapitres de deux à une dizaine de pages chacun, pour un total d’une centaine de pages. La première partie s’attache au caractère hors du commun du mariage de Joseph Barthélemy, un catholique, et de sa conjointe, Sarah Roberts, une presbytérienne, et aux démarches entreprises pour que leur union puisse se produire. La deuxième partie s’attarde aux origines des époux et de leurs parents respectifs, et au parcours migratoire de Joseph Barthélemy : de Napierville à Keeseville (New York), à Saint-Scholastique, puis à Beauharnois. Elle est aussi prétexte à exposer les difficultés rencontrées par l’auteur pour dénicher des renseignements personnels sur son entrepreneur, et à relever les incohérences relatives à son âge dans diverses sources. La partie suivante s’intéresse à Sarah Minnie, belle-mère de Joseph Barthélemy, et à son beau-frère, Fabien Poitras, qui l’a probablement initié au domaine des lainages lors de son séjour à Saint-Scholastique. Vient ensuite une quatrième partie dans laquelle l’auteur présente chacun des enfants du couple Robert-Roberts et nous entretient sur le choix de leurs parrains …