La forêt a longtemps été la principale ressource économique du Nouveau-Brunswick, en particulier dans les comtés du Nord. Le deuxième sous-titre de ce livre est toutefois trompeur (« Un regard particulier sur le nord de la province »), dans la mesure où il se focalise sur la province dans son ensemble. Il n’est donc pas surprenant qu’il n’offre que peu de nouveau aux historiens. Les chapitres 1 à 5 portent de manière générale sur les Acadiens avant et après la déportation, et il faut attendre plus de la moitié du livre, au chapitre 6, pour que l’auteur se penche sur les premiers « chantiers forestiers ». Et encore, les neuf premières pages concernent Siméon Perkins, de la Nouvelle-Écosse. De plus, l’auteur n’est apparemment pas au courant que le même thème est traité dans l’excellent Forêt et société en Mauricie de René Hardy et Normand Séguin. Les trois chapitres suivants sont consacrés au commerce du bois équarri et à l’industrie navale du 19e siècle, mais de manière désorganisée et très répétitive, et le chapitre 8 aborde l’ère des pâtes et papiers, sans toutefois fournir beaucoup d’information sur l’industrie elle-même. En outre, l’industrie du sciage est largement ignorée tout au long de l’ouvrage. Le contenu le plus original du livre est basé sur des sources orales, car l’auteur a tiré parti de sa relation avec la famille Savoie qui exploite l’une des plus grandes entreprises forestières de la province. Les réponses au sondage données par les directeurs principaux de quatre entreprises forestières (dont le Groupe Savoie Inc.) sont assez révélatrices, car ils se disent peu préoccupés par l’impact du réchauffement de la planète, y compris la menace accrue d’infestations d’insectes et d’incendies de forêt. La pénurie de main-d’oeuvre et l’influence politique des groupes environnementaux sont des problèmes plus graves, selon eux. L’auteur partage ce point de vue, car l’impact écologique des monocultures, des coupes à blanc, des insecticides et (si l’on remonte au 19e siècle) de la pollution des ruisseaux et des rivières par la sciure de bois est largement passé sous silence dans ce livre. Il est particulièrement remarquable que l’auteur ne mentionne pas les célèbres grands feux de la Miramichi en 1825, une conflagration qui a brûlé plus de 15 000 kilomètres carrés de forêt (un cinquième de la province), ce qui en fait, selon l’historien de l’environnement Alan MacEachern, l’un des plus grands incendies de forêt de l’histoire de l’Amérique du Nord, et la plus grande catastrophe naturelle du Canada au 19e siècle. Nous ne découvrons pas non plus les dommages environnementaux persistants causés par l’épandage aérien, entre 1952 et 1968, de 5,7 millions de kilogrammes de DDT pour tuer la tordeuse des bourgeons de l’épicéa dans la province. Il y a cependant une partie intéressante sur les progrès technologiques réalisés ces dernières années, progrès rendus possibles, selon l’auteur, par la concentration du contrôle des ressources entre les mains de quelques grandes entreprises. L’ouvrage est également abondamment illustré, bien qu’il contienne quelques photographies prises loin du Nouveau-Brunswick, comme l’embâcle de bois sous le pont Charles de Prague en 1872 ! Les lecteurs auraient toutefois été mieux servis si le livre avait comporté une table des matières, une bibliographie et un index.
Savoie, Ghislain J. L’industrie forestière du Nouveau-Brunswick. Une histoire en dents de scie (Tracadie-Sheila NB, La Grande Marée, 2023), 276 p.
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J.I. Little
Université Simon Fraser
Traduit de l’anglais
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