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The problem of the twentieth century is the problem of the color line[1].

Quand le sociologue et activiste W.E.B. DuBois coucha sur papier ces mots en 1903, il se référait principalement au système ségrégationniste américain qui séparait les Blancs des Noirs. Or, cette ligne s’avère être plus complexe que ces deux teintes, attribuant à chaque groupe ethnique une place déterminée[2] sur celle-ci. La « race »[3] se veut donc être plus qu’une dichotomie noir/blanc. C’est avec ce constat en tête que nous nous proposons d’étudier un cas célèbre de l’histoire américaine, l’affaire judiciaire Sacco-Vanzetti, qui condamna à mort deux Italiens anarchistes pour assassinat et vol. Comme l’historien Moshik Temkin le constate, « in 1920s, Sacco and Vanzetti were probably on the wrong side of this line [… by the] fact that [they] were Italians, perhaps the immigrant group least liked by early 20th century American nativists »[4]. En ce sens, la dimension raciale est un facteur de taille afin de saisir l’issue du procès, car tout en permettant de dévoiler des structures de pouvoir dissimulées qui pesaient sur les deux hommes, elle nous amène à comprendre toute la complexité se rattachant au concept de race. Si cette dimension nous apparaît primordiale afin d’appréhender le procès Sacco-Vanzetti, il n’empêche qu’elle n’a été qu’effleurée par les historiens.

L’historiographie de l’affaire Sacco-Vanzetti se décline en trois tendances : le cas judiciaire et le procès en lui-même (et de ce fait la question de la culpabilité des deux hommes, la légalité du procès ainsi que son équité), la réception et la mobilisation locale comme internationale qu’a suscitées le procès, et l’impact du milieu anarchiste, d’où proviennent Sacco et Vanzetti, sur le verdict[5]. La dernière tendance est, en soi, intéressante, car elle reflète un certain consensus qui fait du radicalisme le facteur déterminant de l’arrestation et la condamnation à mort des deux hommes[6]. En conséquence, peu d’études se sont attardées à questionner la dimension raciale[7] du cas, même si tous la mentionnent comme facteur ayant contribué à son façonnement. Le fait d’ignorer son importance, ou même de la minimiser, est révélateur de l’inconfort à user de l’identification raciale sur des populations catégorisées blanches. Or, il semble toutefois pertinent de comprendre le cas sous le prisme de la race, surtout avec les développements sur les théories concernant les populations « in-between » comme les Italiens, mais aussi pour déconstruire la dichotomie stricte entre identités raciales noire et blanche.

Cet article se propose donc d’explorer cette dimension en comprenant l’affaire Sacco-Vanzetti comme un processus de racialisation complexe et dynamique. Ce procès fut, en soi, un exercice autant conscient qu’inconscient afin de construire une image négative des deux hommes qui, elle, incorporera des référents ethnique, culturel, idéologique ainsi que de classe sociale. Cette construction est intimement liée aux structures de pouvoir imposées aux hommes de par leur statut de migrants et leur classe sociale. Pourtant, si l’identification raciale est souvent utilisée comme un outil de domination, elle peut aussi en devenir un de résistance[8]. À cet égard, on peut constater que Sacco et Vanzetti ont agi avec discernement en usant des mêmes armes que leur bourreau. En effet, ils se sont servis des stigmates que leur a imposés la société américaine en cherchant à les représenter différemment, sachant bien qu’ils ne pouvaient s’en défaire complètement. C’est donc en deux temps que s’effectuera la présente analyse : en exposant d’abord comment Sacco et Vanzetti ont été racialisés à travers leur procès, et ensuite leur réponse afin de se réapproprier cette identification raciale. Mais avant tout, nous préciserons sur les concepts de race et de racialisation afin de bien saisir leur usage précis au sein de cette analyse.

Race et racialisation

La race a longtemps été pensée et théorisée[9] en termes de couleur de peau, lui imposant ainsi une définition biologique. C’est d’ailleurs pourquoi les populations de couleur ont été systématiquement conçues (de manière dissimulée et/ou inconsciente) en termes raciaux alors que les populations blanches furent comprises plutôt sous le voile de l’ethnicité. Pourtant, la démarcation entre race et ethnicité ne devrait pas se comprendre biologiquement ; leur différence demeure dans l’intention s’y rattachant. Peu importe l’aspect physique d’un groupe ou d’un individu, la race est généralement une identification imposée dans une relation de supériorité différentielle, alors que l’ethnicité serait plutôt « a self-construction that comes from the group itself and is embraced by it for its own purposes »[10]. L’ethnicité est une façon volontaire et positive de s’identifier différemment, sans nécessairement présupposer une supériorité sur un groupe ou un autre. Au contraire, la race réfère « to social relations that have been defined by reference to it and that have thereby become social constructions reflecting power relations. In general, racism refers to an ideology that asserts a group’s superiority based on physical appearance, ethnicity, or culture. It usually involves the capacity to dominate »[11]. La race est donc le reflet des relations de pouvoir qui existent entre différents groupes.

Bien qu’elles aient été souvent écartées de l’identification raciale, les populations blanches ne peuvent prétendre s’y soustraire. Elles en sont, en fait, un élément central[12], premièrement parce que ce sont ces populations qui ont imposé leur soi-disant supériorité, créant par le fait même une hiérarchie raciale bien précise, deuxièmement parce qu’au sein même des populations blanches existe une hiérarchie raciale qu’on a tendance à oublier. Comme le souligne le sociologue Steve Fenton, « it is significant that the discourse of ethnicity has been so predominantly applied to white populations in American society. […But] these in-migrants too faced hostility, some of it phrased in terms similar that applied to African Americans and many Italian[13] immigrants were initially treated as and sociologically categorised as “blacks” »[14]. De peau blanche, ces personnes ne peuvent pourtant pas se prévaloir des privilèges associés à la « whiteness »[15] de par leur situation politique, sociale et économique. Ces « in-betweens »[16] reflètent peut-être le mieux le fait que la couleur de peau n’est pas un élément déterminant de l’identification raciale. Leur statut particulier a d’intéressant qu’il met en lumière les diverses forces qui traversent et façonnent le statut racial d’une personne ou d’un groupe, modifiant la conceptualisation qu’on fait de la race. De cette façon, il est plus facile de constater que celle-ci n’est pas un facteur indépendant et isolé, mais qu’elle s’insère dans un système plus large de relations de pouvoir. C’est pourquoi nous en viendrons à considérer la race comme une construction rattachée, certes, aux aléas physiques, mais aussi à des facteurs plus larges comme l’idéologie, le genre, la classe sociale ou la religion. De ce fait, tous les types de groupes, qu’ils soient sociaux, politiques, religieux ou ethniques, peuvent être vus à travers le prisme de la race[17]. La tâche cruciale dans la compréhension de la race est de saisir comment ces différents facteurs interagissent en dépit de leur caractère spécifique[18]. Bien que la racialisation se crée d’abord en lien avec le caractère racial imposé à une population ou une personne, son processus est celui par lequel il est possible « [of] making or becoming racial in outlook or sympathies »[19].

Nous partirons donc du constat que la race est une construction sociale, basée souvent sur l’apparence physique, sur des traits psychologiques ou des comportements soi-disant innés et traduisant des rapports de pouvoirs inégaux[20]. Il s’agit bien souvent d’une catégorisation imposée à un individu ou à un groupe par un autre afin de se distinguer, découlant des préjugés et des attitudes négatives envers celui-ci, qui se retrouve alors distinct par ses valeurs ou son apparence. En ce sens, la race se veut être un système de différenciation[21]. À cet effet, citons le sociologue Charles Mills : « Race is sociopolitical rather than biological »[22]. Cette réflexion conceptuelle sera profitable dans la compréhension de l’affaire Sacco-Vanzetti dans l’optique où la race a considérablement façonné le cas judiciaire, et ce de manière parfois inconsciente. Tout au long de leur procès, les deux hommes ont été racialisés à cause de leur différence, ce qui a été d’ailleurs le plus souligné dans l’exercice juridique. En plus des stigmates physique et psychologique qu’on rattachait aux migrants italiens de l’époque, le processus de racialisation de Nicola Sacco et Bartolomeo Vanzetti intègre des aspects de classe, de criminalité et d’idéologie, dévoilant ainsi toute sa complexité. Le sort de ces hommes est la preuve que les moeurs politiques divergentes et l’ethnicité peuvent servir de base à l’exclusion.

Et les deux Italiens semblent en être au courant. Comme les historiens James R. Barrett et David Roediger le soulignent bien dans leur article Inbetween Peoples : Race, Nationality and the “ New Immigrant” Working Class, les immigrants de race blanche comme les Italiens, les Irlandais et les Polonais étaient de plus en plus conscients de cette nouvelle situation des années 1920 qui les exposait à des attitudes racistes, leur permettant de constater leur nouvelle identité raciale[23]. Leur vision de la société américaine et des autres immigrants les entourant devint alors plus racialisée[24]. Bien que ni Sacco ni Vanzetti ne mentionne explicitement cette structure raciale et leur place dans celle-ci, il nous est possible de constater qu’ils en étaient pourtant conscients. Ce pourquoi, d’ailleurs, ils organiseront une défense basée sur leur statut d’immigrant anarchiste.

L’affaire Sacco-Vanzetti

Le contexte sociopolitique

Les années 1920 marquent une rupture dans l’histoire des États-Unis. Après la Grande Guerre et la révolution russe, l’hostilité envers les étrangers et les radicaux augmentera à travers le pays. En effet, les contestations de masse, les grèves et les actions révolutionnaires qui se déroulèrent à cette époque étaient bien souvent le fait d’immigrants récents faisant partie de la classe ouvrière[25]. Si tous les immigrants n’étaient pas de gauche, les partis de gauche, eux, étaient fortement composés par la masse migrante. Ceci aura tôt fait d’associer les immigrants aux idéologies anarchiste, communiste et socialiste en engendrant aux États-Unis une forte intolérance envers eux. Cela explique aussi pourquoi le mouvement nativiste antiradical gagnera autant de terrain et deviendra vite une tendance marquée au pays[26]. La Peur rouge apportera une réponse musclée de l’État américain, multipliant les « raids » et les déportations dans l’optique de sécuriser le pays. « Ethnic struggles, labor militancy, immigration restriction, death penalty debates, resurgent nativism, ideological repression and “Americanism” »[27] peut assez bien résumer le climat dans lequel l’affaire Sacco-Vanzetti s’intégra et évoluera ; les bases étaient jetées pour créer un procès où le simple fait d’être radical et Italien constituait un crime en soi.

Le cas judiciaire

South Braintree, Massachusetts, 1920. C’est dans ce décor que se plantera ce cas désormais célèbre. Suite à l’assassinat de deux hommes lors du vol de la paie des employés à la manufacture de chaussures de South Braintree, la police du Massachusetts procèdera à l’arrestation de Nicola Sacco et Bartolomeo Vanzetti, deux migrants d’origine italienne[28]. Lors de leur arrestation en mai 1920, il n’existait aucune preuve qui les liait directement au crime de South Braintree Company[29] ; ils étaient simplement au mauvais endroit au mauvais moment et avec de mauvaises fréquentations. Croyant ainsi être arrêtés pour leur appartenance au mouvement anarchiste, les deux hommes ont préféré mentir aux policiers afin de ne pas compromettre la cause ou des camarades. Ils ne se doutaient alors pas qu’il s’en suivrait un long procès concernant leur implication dans un crime plus grave.

Selon des témoins présents lors du crime, celui-ci aurait été commis par cinq hommes qui, selon les descriptions, correspondaient à un homme blond et pâle comme conducteur, trois hommes d’origine italienne, et un cinquième homme à l’apparence non confirmée[30]. Or, sur cinq bandits, seulement deux ont été arrêtés, deux Italiens. En juillet 1921, le juge Webster Thayer rendit son verdict à la suite d’un procès qui s’attardera davantage à l’origine ethnique et à l’idéologie des accusés qu’aux preuves[31] et condamna à mort les deux hommes désormais reconnus coupables du meurtre de Frederic Parmenter et d’Alessandro Berardelli ainsi que du vol de 15 000 $. Malgré les alibis des deux hommes confirmés par plusieurs témoins[32], le fait que personne présent lors du vol n’ait pu les identifier de manière convaincante[33], qu’il n’y ait aucun motif au crime et que l’argent n’ait jamais été retrouvé[34], le juge et le jury trancheront tout de même pour la culpabilité des hommes. Bien vite, le procès deviendra contesté pour sa faible rigueur judiciaire et ses conclusions douteuses. Si l’innocence de Sacco et Vanzetti ne pourra jamais être prouvée, la plupart des chercheurs s’accordent pourtant sur le fait que les deux hommes n’ont pas reçu un juste procès. La contestation dura près de sept ans à cause des nombreuses procédures d’appel, mais rien ne réussira à changer le verdict final, et ce malgré le fait qu’en 1925, un certain Celestino F. Madeiros ait avoué avoir commis le crime de South Braintree en mentionnant que ni Nicolas Sacco ni Bartolomeo Vanzetti n’y étaient[35]. Pourtant, Madeiros apporta des éléments que seul un participant pouvait savoir (soit le motif, le déroulement précis), possédait l’argent correspondant à sa part du vol et était un criminel connu[36]. Rien ne changea pour autant le verdict du juge Thayer. L’exécution de Nicola Sacco et Bartolomeo Vanzetti le 23 août 1927 restera gravée dans l’imaginaire collectif. Ce cas, nous l’avons constaté, a de particulier la forme qu’il a prise et l’attention qu’il a suscitée à l’international comme aux États-Unis. Un cas qui aurait dû être banal pour l’époque suscitera pourtant maintes réactions de part et d’autre et en comprenant celui-ci à travers le prisme de la race, nous pourrons dégager des éléments moins discutés de l’historiographie.

La racialisation comme un outil de domination

Le procès Sacco-Vanzetti est complexe à analyser. Bien qu’il s’agisse d’une affaire judiciaire, il faut pourtant considérer plusieurs éléments dont les liens avec le cas n’apparaissent pas clairement. L’un des éléments à considérer est l’effet des préjugés et stéréotypes associés aux Italiens sur le jury et leur verdict final. Lorsque la discrimination envers une catégorie raciale devient institutionnalisée, on finit par la croire justifiée et, donc, tous y participent[37]. Ce constat sied parfaitement le procès de Nicola Sacco et Bartolomeo Vanzetti, qui fut davantage un exercice de construction raciale qu’un de justice. À force de présenter les hommes comme des éléments nuisibles et dangereux de la société, leur condamnation à mort fut plus facile à considérer. Tout au long de leur procès, on a présenté une image d’eux se réduisant aux stéréotypes de l’époque quant à leur ethnicité et leur radicalisme[38], laissant de côté le thème principal de ce procès, soit le crime de la South Braintree Company.

L’ethnicité italienne est un crime

Dans les années 1920, les Italiens furent probablement un des groupes ethniques de race blanche les plus discriminés aux États-Unis. Comme le souligne Eric Arnesen, « the cultural and biological inferiority of Italians […] was widely advertised by scholarly experts and racist popularizers alike »[39]. De ce fait, l’opinion populaire envers les Italiens ne reflétait pas une image positive d’eux, les associant fréquemment au radicalisme, à la criminalité, à la pauvreté et aux actes de violence[40]. Ce portait simpliste et négatif compliqua la défense de Nicola Sacco et Bartolomeo Vanzetti, qui ne pouvaient que difficilement échapper aux stéréotypes de l’époque.

Dès le début de l’affaire, c’est l’ethnicité italienne qui a été mise en filature. À l’étape d’investigation, les enquêteurs ont concentré leur recherche au sein de la communauté italienne plutôt que chez n’importe quels autres groupes ethniques[41] puisque le brigandage était conçu comme un crime strictement italien. Il est pourtant difficile de dévoiler dans quelle mesure ce type de crime était réellement commis par des Italiens ou s’il s’agissait, au contraire, d’arrestations récurrentes parce que découlant d’une volonté inconsciente de leur associer ce type de crime. L’arrestation de Sacco et Vanzetti ne représentait alors que deux noms de plus à la longue liste de radicaux arrêtés aux États-Unis[42]. Aux dires d’Eugene Lyons, un chroniqueur de l’époque, il n’y avait rien de bien extraordinaire à cela : « There’s no story in it… just a couple of wops in a jam »[43]. Il s’agissait, en fait, d’une arrestation qui s’alignait parfaitement avec les stéréotypes de l’époque, expliquant sans doute pourquoi ce cas a suscité si peu d’attention chez la population américaine et les journaux, et ce jusqu’en 1926[44].

Il faut pourtant comprendre que la réduction systématique de la population italienne au monde du crime fera partie intégrante du processus de racialisation qui affecta le procès. Se basant sur les stéréotypes de l’époque, plusieurs membres du jury avaient décidé d’emblée que Sacco et Vanzetti étaient coupables. En effet, certains membres du jury, dont Walter H. Ripley, croyaient que si les deux hommes n’avaient pas commis ce crime, ils en avaient fort probablement commis d’autres pour lesquels ils n’avaient pas été pris[45]. Ce dernier, qui fut le juré principal et le porte-parole, aurait affirmé « Damn they, they ought to hang them anyway ! »[46] avant même que ne commencent les démarches judiciaires. En concevant la population italienne comme un bassin de criminels, le jury a donc donné une place importance à l’ethnicité des hommes. Ce biais affecta le verdict final du jury qui ne considéra que les éléments qui concordaient avec leur conception de la criminalité, oubliant les preuves qui innocentaient les hommes[47]. Les témoins présentés par la défense de Sacco et Vanzetti furent semblablement discriminés à cause de leur origine ethnique. En effet, bien que les alibis des deux hommes semblent assez solides, ils avaient pourtant un défaut : ils ne pouvaient être confirmés que par des Italiens[48]. Le tout paraît logique à une époque où les Italiens étaient généralement employés dans les mêmes industries et où les liens communautaires étaient forts. Les Italiens côtoyaient les Italiens par sentiment de sécurité et par affinités culturelles. Pour les Américains, il a s’agit plutôt d’un refus de s’intégrer à la société américaine. Les témoignages des Italiens dans cette affaire furent donc mal vus et surtout écartés, comme l’illustre le commentaire d’Alvan T. Fuller, alors gouverneur du Massachusetts : « Those are Italians. You can’t accept any of their words »[49]. Étant ainsi privés de leurs alibis, on ne s’étonne guère que ces derniers se soient retrouvés coupables. Fait intéressant, Fuller était pourtant chargé d’examiner l’équité du procès en déterminant si les préjugés de la part du juge et du jury avaient entravé le processus judiciaire tout en teintant le verdict final[50]. En discréditant la défense de Sacco et Vanzetti par ce commentaire, Fuller fut incapable de constater qu’il possédait lui-même des biais envers les accusés. De même manière, il ne considérait pas les nombreuses sorties publiques du juge Thayer à l’encontre de Sacco et Vanzetti comme des préjugés assez sérieux pour entraver le procès[51]. Or, il apparaît clair que le juge Thayer entretenait envers les accusés de forts biais qui affectèrent le cas. Le juge fit de nombreuses confessions sur les hommes et semblait convaincu d’avoir trouvé les coupables avant même le procès terminé. On le constate à ce commentaire qu’il fit à peine quelques jours après le début du procès : « Did you see what I did with those anarchistic bastards the other day ?... I’ve got those sons of bitches where I’m going to have them now »[52]. Ceci n’est qu’un exemple, mais il en existe plusieurs, confirmant le fait que l’attitude du juge Thayer envers les accusés a dirigé la finalité du procès.

Les préjugés à l’égard de Sacco et Vanzetti affectèrent aussi le jugement des témoins présents lors du crime. Les témoignages certifiant que les hommes faisaient partie des assaillants lors du crime de la South Braintree Company ne sont pourtant pas les impressions originales des témoins. En effet, la plupart des témoins qui affirment avoir vu ces hommes sur les lieux du crime, incriminant ainsi ces derniers, sont en fait des témoignages modelés par le procès. Des cinq témoins qui ont identifié positivement Nicola Sacco, trois ont changé leur récit des évènements. En effet, Mary E. Splaine, Frances Devlin et Louis Pelzer, lorsqu’interrogés quelque temps[53] après le crime, n’ont jamais pu affirmer avec certitude que c’était Sacco qui était présent, certains ne l’ayant même jamais identifié dans un premier temps[54]. En ce qui concerne Bartolomeo Vanzetti, les deux témoins qui l’identifient comme un des assaillants offrent chacun des témoignages contradictoires au fil du procès et qui semblent vouloir délibérément pointer vers Vanzetti. Donnons l’exemple d’Harry E. Dolbeare, qui affirme avoir vu « a carload of foreigners » sans pourtant être capable de décrire les hommes à l’intérieur[55]. Ce n’est que par la suite qu’il change son témoignage et place Vanzetti comme conducteur de la voiture, contredisant ainsi la théorie du Commonwealth qui le plaçait alors à l’arrière de celle-ci[56]. Ce que nous constatons, c’est que l’identification positive de Sacco et Vanzetti fut le produit d’une construction qui s’étala tout le long du processus judiciaire. À force de voir les visages de Sacco et de Vanzetti, leur photo dans les journaux, sans être exposés à d’autres potentiels suspects, les témoins ont fini par associer ces hommes aux crimes, remodelant ainsi leur témoignage. La déposition d’un expert, le Dr Morton Prince, lors du procès rend compte de cette situation. Celui-ci parle du témoignage de M. Splaine, mais cela s’applique à vrai dire à tous les témoins :

Sacco had been shown to her on several occasions. She had had an opportunity to study him carefully. More than this, he sat before her in the court. At the preliminary hearing in the police court she was not asked to pick Sacco from among a group of other men. Sacco was shown along with her. Everyone knows that under such circumstances the image of a person later develops, or may develop, in an observer’s mind and becomes a false memory. Every lawyer knows the unconscious falsification of memory due to later acquired knowledge, though ignorant of the psychology of the phenomenon[57].

Partant du fait que les coupables sont Italiens, on n’a construit leur identité spécifique qu’une fois Sacco et Vanzetti arrêtés et investigués. À bien des égards, on s’est arrêté au seul fait que les hommes soient Italiens, comprenant la communauté italienne comme un groupe aux traits physiques homogènes. On se rend compte que la plupart des descriptions physiques des témoins présents s’arrêtent à « dark-complexioned man », « dark man », ou bien « he looks like an Italian »[58]. En ce sens, les preuves pointent pratiquement vers n’importe quels Italiens du Sud, et non spécifiquement vers Sacco et Vanzetti. C’est donc leur ethnicité italienne qu’on a identifiée, et non eux.

On constate bien que le processus de racialisation s’articule en partie autour de l’ethnicité italienne et que cette dernière vient avec une association systématique au monde du crime. Donnons l’exemple de William J. Heron, un témoin qui a soutenu avoir entendu, lors du crime, deux des bandits se parler en italien[59]. Or, on constata par la suite que ce dernier ne parlait ni ne comprenait l’italien et qu’il ne pouvait faire la différence entre une discussion en italien, en français ou en espagnol[60]. La conception de la criminalité aux États-Unis apparaît donc étroitement liée aux préjugés raciaux de l’époque. C’est cette dernière qui, ayant construit les Italiens comme des criminels, explique pourquoi le témoin a cru instinctivement entendre les bandits se parler en italien. En ce sens, le constat du criminologue Paul Knepper sied bien le procès Sacco-Vanzetti : « “racialization of crime” has come to refer to criminal justice as a site for social construction of racial identity »[61]. Les deux hommes sont devenus criminels au cours du procès car c’était l’image que la population américaine leur renvoyait. Pour les Italo-Américains mais aussi pour plusieurs autres groupes d’immigrants, le sort que connurent les hommes représenta la puissance du nativisme américain et la précarité de la situation des immigrants aux États-Unis[62]. La justice américaine avait bel et bien une couleur : elle était blanche. Et blanche à un degré si pâle que même certains Européens ne pouvaient s’en prévaloir.

Le radicalisme est un mal italien

Si Sacco et Vanzetti ont d’abord été racialisés à partir de leur origine ethnique, ce sont leurs idéaux qui vinrent sceller leur sort. La racialisation des idéologies, et des idées, est lot courant dans l’histoire[63], comme c’est le cas de l’anarchisme dans les années 1920 aux États-Unis. D’autant plus que celui-ci était vu comme étroitement rattaché à l’ethnicité italienne. Comme le constate l’historien Moshik Temkin, « indeed, the terms foreigner and radical were often used interchangeably, and this fixation with the two perceived threats came to a head after Judge Thayer’s verdict in October 1926 »[64]. En ce sens, il est intéressant de comprendre comment le radicalisme a été dépeint comme une composante de l’identité italienne contribuant à la racialisation des deux hommes.

Il va de soi que les Italo-Américains ne formaient pas un groupe monolithique, on y trouvait diversité d’opinions et de classes[65]. Alors, pourquoi l’association entre radicaux et Italiens était-elle si fréquente ? Ceci s’explique probablement par la nature du mouvement anarchiste italien auquel Sacco et Vanzetti portaient allégeance, soit le « galléanisme ». Cette branche de l’idéologie anarchiste se voulait plus militante, avec une philosophie anticapitaliste qui prônait la spontanéité et procédant par actions directes comme l’usage de bombes[66]. Comme celle-ci était plus visible au sein de la société américaine, de par leurs gestes perturbateurs, l’affiliation entre le radicalisme et la communauté italienne se fera donc automatiquement. Pourtant, les galénistes ne commettent pas de crime pour de l’argent, mais pour des raisons de principes. Le banditisme ne fait pas partie de leur code[67]. Or, dans le cas qui nous intéresse, le crime de la South Braintree Company en reste essentiellement un matériel et non politique. Le fait qu’on ait arrêté Sacco et Vanzetti relève d’une incompréhension de l’idéologie radicale et de ses méthodes inhérentes. L’affaire de la South Braintree Company fut mise en place par un « gang » très professionnel habitué à ce type de crime[68], et non pas par des radicaux italiens sans casier judiciaire ou antécédents criminels. C’était aussi la certitude du chef de police de l’époque, qui a toujours cru que c’était le travail de criminels aguerris[69].

Comme vu précédemment, rien ne justifiait l’arrestation de Sacco et de Vanzetti hormis leur identité, puisqu’aucun lien clair n’existait entre ceux-ci et le crime de la South Braintree Company. Pourtant, le simple fait d’être Italiens et radicaux fut assez pour justifier leur arrestation : être radical constituait déjà en soi un crime de moeurs. Comme le pense Roberta Strauss Feuerlicht, « they were Italian anarchists, which confirmed […] suspicion they were guilty ; evidence could come later »[70]. Dans la foulée de la rafle du procureur général Palmer envers les radicaux, les militants de gauche se trouvaient en position de vulnérabilité face à l’appareil judiciaire américain. C’est d’ailleurs pourquoi l’historien Ronald Creagh soutient que la justice américaine s’est servi de Sacco et Vanzetti afin de faire sa propre promotion comme ayant été celle qui éradique le radicalisme du pays[71], ce qui demeure problématique dans l’optique où le crime demeure traité de manière secondaire. Pourtant, les associer à un crime tangible permettait de pouvoir les punir légitimement pour leur multiple appartenance. Comme l’affirme l’avocat Felix Frankfurter :

Recently facts have been disclosed, and not denied by the prosecution, to show that the case against Sacco and Vanzetti for murder was part of a collusive effort between the District Attorney and agents of the Department of Justice to rid the country of these Italians because of their Red activities. […] The names of Sacco and Vanzetti were on the files of the Department of Justice “as radicals to be watched” ; the Department of Justice was eager for their deportation, but had not evidence enough to secure it […][72].

Au fond, ce qui a été voulu et ce qui a été fait, c’est punir deux hommes pour un crime autre que celui dont on les accusait. Sacco et Vanzetti ont théoriquement été reconnus coupables du vol de la South Braintree ; officieusement, ils étaient plutôt fautifs d’un crime beaucoup plus grave, celui d’être anarchistes italiens aux États-Unis.

La racialisation comme un outil de résistance

On peut difficilement ignorer le tollé qu’a provoqué ce procès. À cet effet, l’auteure Lisa McGirr soulève un point crucial : « Other miscarriages of justice and other efforts to repress radical movements failed to attract such outcry. Why so Sacco and Vanzetti ? »[73] Si ces derniers ont réussi à susciter un tel intérêt, c’est qu’ils ont été capables d’offrir une contestation de leur procès qui fut habile. L’identification raciale qui a collé à la peau de Nicola Sacco et Bartolomeo Vanzetti tout le long de leur procès sera aussi la voie par laquelle leur défense sera pensée. À une époque où les préjugés raciaux sont forts, les hommes savaient qu’il leur était impossible de se défaire des stigmates qu’on leur avait imposés en tant qu’Italiens radicaux. Comme le sociologue Raymond W. Mack l’affirme, « if enough people believe a doctrine of racial inferiority for long enough, the doctrine itself will have consequences whether or not it is factually true »[74]. Donc, sans vouloir se distancier des éléments qui constituaient leur identité, car il est vrai que les deux hommes étaient des Italiens anarchistes, il fallait plutôt se réapproprier leur conceptualisation. En utilisant, et surtout en nuançant, des termes comme « Italiens » et « anarchistes », il devenait possible de déconstruire graduellement ceux-ci, alors régis par une étonnante fixité dans leur définition. Sans mentionner explicitement cette stratégie, nous verrons que Sacco et Vanzetti sont conscients de leur situation et entreprennent des actions de réappropriation.

Le fait que le procès ait été articulé autour de leur origine ethnique et leur idéologie a aidé les hommes à se doter d’un fort appui au sein des mouvements de gauche et de la communauté italienne, mais aussi de n’importe quelle communauté migrante faisant face à du racisme institutionnalisé. Les préjugés raciaux envers les deux hommes ont réussi à rallier une bonne majorité d’Italiens derrière eux puisque beaucoup comprenaient l’affaire Sacco-Vanzetti comme étant étroitement rattachée à leur statut d’immigrant. Si tous ne croyaient pas à l’innocence des deux hommes, ils s’accordèrent au moins pour soutenir Sacco et Vanzetti par solidarité ethnique[75], car c’est alors toute la population italienne qui se retrouve en procès si la société américaine tente de réduire les Italiens à un constant statut de criminel. Bien que l’appui vienne de plusieurs directions, les efforts les plus vaillants viendront néanmoins de la gauche italienne qui est très consciente du statut racial qui pèse sur les anarchistes italiens à cette époque. Comme Errico Malatesta, figure du mouvement anarchiste italien, le souligna bien, « in addition to being anarchists, [they] are also Italians : They belong to a rejected and despised people who can be murdered without concern »[76]. Les migrants italiens étaient à la merci du système américain et des préjugés raciaux le constituant.

La mise sur pied d’un comité de défense fut la contribution la plus efficace de la gauche italienne. Au-delà des fonds amassés pour les frais d’avocat, le comité de défense Sacco-Vanzetti offrait une visibilité au cas en prenant une position claire : il s’agissait là d’un cas politique[77]. Les deux hommes étaient jugés avant tout parce qu’ils étaient Italiens, immigrants et anarchistes[78], et c’est en soulignant ce fait que Sacco et Vanzetti tentèrent de gagner ce procès et de rectifier l’injustice qu’ils avaient subie : « I am suffering because I am a radical and indeed I am a radical ; I have suffered because I was Italian and indeed I am an Italian »[79]. Les accusés ont mis de l’avant aussi souvent que possible leur appartenance ethnique et idéologique afin de souligner l’injustice les accablant. En se présentant comme de bons travailleurs, humbles, avec des idéaux peut-être utopistes mais certainement purs, ils souhaitaient déconstruire l’image négative leur étant associée. En essayant d’expliquer au peuple américain ce qu’était réellement l’anarchisme et en montrant que les travailleurs italiens n’étaient, en fait, pas bien différents des travailleurs américains, Sacco et Vanzetti ont tenté l’impossible : ébranler des préjugés. Après maintes lettres envoyées à des amis, des journaux et au gouvernement, Bartolomeo Vanzetti écrira, en avril 1927, une dernière requête au gouverneur Fuller afin de mettre fin à son injustice. Cette lettre fut un ultime effort afin de rallier la population américaine à la cause et déconstruire certains aspects de leur racialisation :

Notre avocat nous a avertis que ce que nous avons à dire peut aggraver les préjugés contre nous ; mais nous sommes par-dessus tout soucieux de sauver ce dont aucun pouvoir humain excepté nous-mêmes ne peut nous priver : notre foi et notre dignité […]. Nous n’avons rien à faire avec le crime de la South Braintree. Nos instincts nous font abhorrer tout crime et toute violence visant un avantage personnel, qu’il ait été commis légalement ou illégalement, et nos principes les condamnent formellement. […] Nous sommes des anarchistes, nous croyons dans […] une philosophie qui […] vise au progrès et au bonheur humain. […] Notre sens et notre idéal de justice sont fondés sur le principe de […] l’égalité des hommes dans leur nature fondamentale et dans leurs droits et devoirs. […] Nous vous faisons observer respectueusement que ceux des vrais anarchistes qui ont commis des actes de violence y ont été contraints par les poursuites et l’autodéfense ou provoqués par la violence, l’oppression et l’intolérance de la part des personnes au pouvoir[80].

En tentant de montrer d’où la violence découle, Vanzetti espérait arriver à dépeindre l’idéologie anarchiste en des termes plus nobles, du moins comme lui l’entendait, car, dès le début, Vanzetti avait très bien compris la nature de leur arrestation.

Cette dernière requête avait tout de même réussi à susciter l’intérêt du gouverneur. L’enquête du comité sélectionné par Fuller devait déterminer l’équité du procès de Nicola Sacco et Bartolomeo Vanzetti. Pour la défense, le procès n’en fut pas un juste et les préjugés furent assez grands pour entraver son bon fonctionnement et modifier le verdict final[81]. La faute était surtout portée vers le juge Thayer qui, par ses actions et commentaires envers le jury, aurait fait tourner le procès autour de l’appartenance ethnique et idéologique des accusés. Comme le mentionne B. Vanzetti :

From the very beginning of the trial the Judge stirred up the political, social, religious and economic hatred of the jurors, and their fears and antagonism against us, but covered himself by admonitions to the jury from time to time to treat us fairly and impartially; so that we were really tried not for murder, but for being radicals, draft evaders, and pacifists. […] Can anyone bring himself honestly to believe that such persistent prejudice, hostility, and despisement as are disclosed in these affidavits did not affect the discretionary rulings of the Judge? […] We were tried during a time that has now passed into history. I mean by that, a time when there was a hysteria of resentment and hate against the people of our principles, against the foreigner, against slackers, and it seems to me […] that both you[82] and Mr. Katzmann has done what it were in your power in order to work out, in order to agitate still more the passion of the juror, the prejudice of the juror, against us…[83]

En misant sur les préjugés du juge Thayer et sur son influence sur le jury, Sacco et Vanzetti montraient les biais qui affectèrent leur cas. Ceci fut le dernier effort afin d’exposer les préjugés raciaux qui ont guidé le procès, mais en vain. Le comité statua sur l’équité du procès et vit « no evidence of prejudice in [Judge Thayer’s] conduct of the trial »[84]. Même si les hautes instances de la justice américaine n’ont pu constater les biais qui dirigèrent le cas Sacco-Vanzetti, il sera néanmoins imprégné d’une dimension raciale et idéologique, comme le souligne Moshik Temkin : « Class and race were probably primary causes not only for why Sacco and Vanzetti were tried and convicted but also why they became such totemic symbols during the decades that followed »[85].

Le cas Sacco-Vanzetti nous amène à réfléchir sur l’intolérance, mais surtout sur l’institutionnalisation de la discrimination raciale aux États-Unis. On a parfois tendance à oublier que quand la discrimination est à la base d’une culture, qu’elle fait partie de la « way of life » de la population, il devient plus facile pour eux de concevoir le tout comme naturel[86]. C’est probablement ce qui peut le mieux expliquer la finalité du cas Sacco-Vanzetti. À bien des égards, c’est le processus de racialisation qui a fait des deux hommes des éléments dangereux de la société américaine, leur attribuant par le fait même le qualificatif de « un-American ». À travers leur ethnicité et leurs idéaux, le système judiciaire américain a réussi à imposer une structure de pouvoir sur Nicola Sacco et Bartolomeo Vanzetti en les réduisant à des éléments simplistes. Or, les deux hommes ont mené un long et épuisant combat contre leurs opposants en utilisant les mêmes armes : l’identification raciale. D’une certaine manière, le fait de réutiliser les mêmes traits identificateurs afin de construire une défense a permis aux hommes de donner une visibilité à leur cas. Malgré leur mort, il importe de comprendre leur agentivité dans ce procès. Sacco et Vanzetti ont voulu lutter contre un système hostile et leur combat ne fut pas nécessairement en vain, car il permit d’éclairer certains aspects importants de l’intolérance.

L’identification raciale, dans ce cas précis, ne se référait non pas simplement aux origines ethniques des accusés, mais plus largement à leur classe sociale et leur idéologie. De ce fait, le processus de racialisation ne peut être compris en des termes strictement raciaux. Comme Barbara J. Fields le mentionne, parler de la race dans la culture américaine, c’est en fait n’exclure pratiquement rien[87]. En ce sens, l’analyse du cas Sacco-Vanzetti apparaît comme un bon exemple pour appliquer cette théorie. Le processus de racialisation en est un complexe qui inclut plusieurs aspects autres que la race, comme l’idéologie et la notion de classe. En voulant repenser le cas Sacco-Vanzetti, nous faisons aussi une analyse conceptuelle. La race ne s’applique plus seulement à des populations de couleurs : ses effets et ses répercussions atteignent toutes les populations et en des termes différents. Il importe de soulever ces nuances afin d’exposer certaines dynamiques beaucoup plus larges, et ainsi dépasser notre conception binaire de la race.