Chronique sur le métier de chercheur[Record]

  • Linda Rouleau

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  • Linda Rouleau
    HEC Montréal

De nos jours, « publier » constitue un passage obligé pour celui ou celle qui veut faire sa vie dans le monde universitaire. Et cette exigence nous en fait généralement voir de toutes les couleurs, de la soumission d’un texte jusqu’au moment de la décision finale. L’écriture et la réécriture d’un texte en vue d’une publication dans une revue savante nous font souvent passer par toute une gamme d’émotions allant de l’espoir à la déception. Pourtant, c’est au cours de ce processus que le texte prend son envol et se développe véritablement de façon à devenir éventuellement un article, c’est-à-dire à être publié. Sans ce travail de construction et de reconstruction, on se contenterait de diffuser nos idées en réinventant ou en adaptant le vocabulaire en fonction d’une compréhension personnelle du phénomène étudié. Toutefois, la publication dite « scientifique », disons ici « arbitrée par les pairs », a pour but de faire en sorte que nos écrits s’inscrivent dans une vision plus large, un vaste projet continu d’avancement des connaissances. Le but de cette chronique est de mettre en évidence la dynamique et les rouages de ce processus menant à la publication. De manière spécifique, elle vise à montrer que publier, ce n’est pas sorcier, et que c’est plutôt un art… Mais de quel art s’agit-il ? Pour réussir à publier, il faut être capable de bien positionner son travail et de se montrer fin stratège. Dit autrement, l’art de la vente et l’art du jeu sont essentiels, comme nous le verrons ici. À partir de ces deux métaphores, en abordant le processus de soumission ainsi que celui de l’évaluation par les pairs et de la révision à laquelle cette évaluation donne lieu, cette chronique entend démystifier ce que publier veut dire ou implique de manière très concrète. Cette chronique se divise en deux parties. D’abord, elle invite à réfléchir sur les différents éléments à prendre en considération lorsque l’on soumet un texte en vue d’une publication. Ensuite, elle fait état du processus d’évaluation et de révision par lequel doit passer un texte avant d’être accepté pour publication. Cette chronique se termine par quelques idées sur ce qu’est la production de connaissances en contexte de publication. Certains seront peut-être offusqués par ce sous-titre. Qu’est-ce que la vente vient faire dans une chronique sur la publication ? Lorsque l’on soumet un texte à une revue, il faut avoir un produit « vendable », c’est-à-dire qu’il doit être considéré comme intéressant dans le sens qu’il doit répondre à des besoins spécifiques, comme c’est le cas pour n’importe quel produit. Comme il ne viendrait pas à l’idée de vendre un vêtement auquel il manque des coutures ou de fournir un service à moitié, la même attitude est de mise dans le cas d’un texte scientifique. Plusieurs ont tendance à penser qu’il suffit de faire une communication dans une conférence et d’y apporter ensuite quelques changements mineurs pour que le fruit soit mûr pour une revue ; mais il est ainsi à peu près certain qu’un tel papier sera rejeté immédiatement (en anglais, desk reject) par le rédacteur en chef, et cela même si les commentaires reçus lors de la conférence étaient positifs. Il vaut mieux se faire tout de suite à l’idée suivante : un article paraissant dans une revue est un texte dont plusieurs sections ont habituellement été revues en profondeur et réécrites plus d’une fois. Souvent, le texte publié a peu à voir avec la première version et c’est tant mieux. Avant de soumettre un texte pour publication, il faut « tester le produit ». Bien sûr, la présentation à …

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