Comptes rendus de lecture

L’agir entrepreneurial : repenser l’action des entrepreneurs, Christophe Schmitt, Québec, Presse de l’Université du Québec 2016, 146 p.[Record]

  • Alexis Catanzaro

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  • Alexis Catanzaro
    Maître de conférences en sciences de gestion, IAE de Saint-Étienne

Cet ouvrage s’intéresse à l’action de l’entrepreneur, souvent oubliée des recherches en entrepreneuriat. L’auteur de l’ouvrage, Christophe Schmitt, est professeur en entrepreneuriat à l’Université de Lorraine, titulaire de la chaire entreprendre et responsable du pôle entrepreneuriat étudiant de Lorraine. Son ouvrage ambitionne de théoriser l’action entrepreneuriale. Ce travail aboutit à de nouveaux développements sur le concept d’agir entrepreneurial. L’agir entrepreneurial réconcilie connaissance et action et apparaît comme un concept intégrateur de nombreuses approches théoriques mobilisées dans le champ de l’entrepreneuriat, voire comme la source d’un nouveau cadre épistémologique. La démonstration de l’auteur s’articule autour de cinq chapitres, eux-mêmes précédés d’une riche partie introductive. Cette dernière met en lumière l’intérêt de la thématique et explicite la thèse défendue par l’auteur, à savoir une nouvelle conception de l’action entrepreneuriale autour de la notion d’intentionnalité. L’agir rationnel, l’agir normatif et l’agir cognitif, base de réflexion de l’auteur, constitue les trois premiers chapitres de l’ouvrage. Ils sont suivis par deux autres chapitres sur l’agir entrepreneurial. La présentation de chaque agir repose sur une même structuration : 1) l’identification et la description des fondements de l’agir en question, 2) ses déterminants et 3) les développements engendrés par cet agir. Le premier chapitre s’intéresse à l’agir rationnel qui constitue encore le paradigme dominant et structurant de l’entrepreneuriat. Les fondements de cet agir se trouvent chez Cantillon, Say et Schumpeter et reposent sur trois postulats : la réussite entrepreneuriale, la place de l’innovation dans l’entrepreneuriat et l’offre comme moteur du développement entrepreneurial. Dans cette perspective économique de l’entrepreneuriat, l’action de l’entrepreneur est vue comme une décision optimale. Cette représentation purement rationaliste a pour conséquence de placer le focus sur le résultat de l’action et donc à réduire cette dernière à ses propres résultats (« Que fait l’entrepreneur ? »). De cette approche découle une typologie organisée autour de deux types d’entrepreneurs que sont l’entrepreneur-organisateur et l’entrepreneur-innovateur, ainsi qu’un postulat selon lequel l’entrepreneur est conçu comme un « processeur d’information » qui agit en accord avec les signaux qu’il perçoit dans son environnement. La principale limite de cette conception de l’entrepreneuriat repose sur son incapacité à saisir les résultats complexes, informels, invisibles des actions de l’entrepreneur. En effet, ce qui n’est pas visible n’est pas mesurable. Or, les actions de l’entrepreneur et leurs conséquences ne peuvent être réduites à ce qui est purement évaluable par le biais d’indicateurs. Pour tenter de dépasser les limites de l’agir rationnel, l’agir normatif, objet du second chapitre, propose de déplacer la réflexion sur le comportement de l’entrepreneur (« Qui est l’entrepreneur ? »). Le développement de cet agir permet de mieux connaître l’entrepreneur et les normes auxquelles il se conforme afin de correspondre aux attentes du milieu dans lequel il évolue. Cette orientation a guidé la recherche en entrepreneuriat vers une mise en évidence des caractéristiques et compétences distinctives retrouvées chez l’entrepreneur (approche par les traits). Cette approche souffre de plusieurs limites : le manque de consensus sur les traits de caractère attribués aux entrepreneurs, la non-prise en compte de la dimension environnementale ou encore la simplification des profils types d’entrepreneurs. Le courant de l’intention entrepreneuriale est un prolongement plus récent très à la mode qui s’intéresse aux aspects et croyances déterminant l’événement entrepreneurial. L’auteur considère ce courant comme éclairant, mais souvent réducteur. Pour lui, entreprendre est avant tout un talent ordinaire en situation. Le chapitre 4 présente l’agir entrepreneurial comme l’évolution de la place de l’action dans le domaine de l’entrepreneuriat. Cette approche s’intéresse à l’intentionnalité de l’entrepreneur et réconcilie ce dernier avec son contexte (« Comment l’entrepreneur se représente-t-il ses actions ? »). Elle permet notamment de sortir de …