Compte renduBook Review

Mercure, Daniel (sous la direction de) (2001) Une société-monde ? Les dynamiques de la mondialisation, Québec, Les Presses de l’Université Laval, Bruxelles, De Boeck Université, 335 p.[Record]

  • Gilles Pronovost

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  • Gilles Pronovost
    Département des sciences du loisir et de la communication sociale,
    Université du Québec à Trois-Rivières, C.P. 500, Trois-Rivières, Québec, G9A 5H7.
    Téléphone : (819) 376-5132 ; télécopieur : (819) 373-1988
    gilles_pronovost@uqtr.ca

Cet ouvrage, dans une collection de haut niveau dirigée par Daniel Mercure, reprend certaines des conférences présentées à la séance plénière du XVIe congrès de l’Association internationale des sociologues de langue française tenu à l’Université Laval en juillet 2000. À cette occasion d’ailleurs, Daniel Mercure a été élu à juste titre président de cette association. Cet ouvrage, comme c’est souvent le cas avec des collectifs, réunit des textes d’inégale qualité. Le thème à la mode : (globalisation, mondialisation, etc.) a déjà donné lieu à d’innombrables écrits, du plus pertinent au plus loufoque. Cet ouvrage se démarque par la profondeur et la diversité des analyses. Toutefois, certains thèmes ressortent tel celui, bien entendu, de la mondialisation. En introduction, Daniel Mercure s’attache à situer le contexte historique et sociocritique du débat, pour en signaler par la suite quelques transformations clés : libération des marchés et des devises, déréglementation, etc. Faisant sans doute écho au texte de Michael Smith, apparaissant dans le même ouvrage, il conclut que si l’on peut observer de nombreux bouleversements, il est trop tôt pour prédire une mutation en profondeur du système capitaliste. La polysémie du terme ne fait plus de doute. Guy Rocher a bien raison de renvoyer à de multiples mondialisations, trois ou quatre, selon lui : les mondialisations politique, économique, culturelle et juridique qu’il décrit bien. Il s’agit bien d’un phénomène pluriel, renchérit-il, à la fois réalité, idée et projet, que la sociologie doit « déconstruire ». Immanuel Wallerstein, pour sa part, revenant sur sa théorie du système-monde, ne partage pas l’opinion de certains coauteurs de l’ouvrage et écrit que ce système est « en désagrégation », que l’effondrement du système capitaliste est imminent, issue d’une longue lutte entre ceux qui profitent des inégalités entre hommes et nations, et les tenants d’une voie plus égalitaire et démocratique ; il signale toutefois que cette issue est incertaine, ouverte sur l’histoire. Un texte de Boaventura de Sousa Santos aborde un thème important : la résistance à la globalisation passe souvent par le développement d’initiatives locales et la préservation d’espaces de sociabilité. L’articulation du global et du local produit, on le sait, de multiples effets pervers, l’article donne l’exemple du localisme globalisé (comme la globalisation de la musique populaire américaine) et du globalisme localisé (comme la déforestation et le pillage des ressources naturelles) ; la résistance viendra de la globalisation antihégémonique, visible dans la démocratie participative, les productions alternatives, le multiculturalisme, etc. Signalons également le texte de François Ascher sur la nouvelle métropolisation, sur les enjeux culturels et politiques issus des nouvelles villes, hybridées par la globalisation, mais tentant de retrouver des assises et différences locales. À l’ère de la globalisation, les analyses globales sont de mises auxquelles le temps et l’espace d’un livre ne permettent pas toujours de rendre justice. Les notions de modernité et d’inégalités traversent quelques textes clés ; ce sont d’autres thèmes porteurs de l’ouvrage. Sur le sujet, je citerai l’article de François Dubet. Il souligne la double face de la modernité, l’une posant le triomphe annoncé de l’égalité dans les sociétés modernes (les inégalités ne constituant que des imperfections ou des injustices surmontables, c’est la thèse de Tocqueville), l’autre rappelant le caractère fondamentalement inégalitaire des sociétés capitalistes (c’est la thèse de Marx). Certes, écrit Dubet, on relève une certaine démocratisation dans la consommation, dans l’accès au loisir et à la culture ; mais, ajoute-t-il, de nouvelles inégalités sont nées des transformations bien connues du marché du travail. Ces inégalités ont été multipliées par l’accès ou non à un emploi stable, par les classes d’âge, l’appartenance à …