Abstracts
Résumé
L’article examine les difficultés, pour l’eurosyndicalisme naissant, d’organiser des actions collectives de solidarité transfrontalière dans le nouvel espace politique et économique de l’Union européenne (UE). Ces actions restent très peu nombreuses malgré l’ampleur des réformes socio-économiques menées par l’Europe communautaire depuis plus de 20 ans, qui affectent profondément le contenu tant de l’organisation que des conditions de travail et des droits sociaux collectifs. Cependant, alors que le secteur du transport est soumis à de vives pressions concurrentielles, les structures syndicales transnationales de ce secteur réussissent à mobiliser de façon récurrente les salariés en créant des liens entre les différents métiers, tranchant ainsi avec une situation syndicale générale où l’européanisation de la contestation sociale ne semble pas être à l’ordre du jour.
Abstract
This article addresses the difficulties faced by European-level unions as they try to organise actions of trans-border collective solidarity in the new political and economic space of the European Union. There are few such actions, despite the important social and economic reforms that the European community has undertaken in the last 20 years, reforms that affect both the content and the organisation of working conditions and collective social rights. Nevertheless, in the transportation sector, which is subject to major competitive pressure, transnational union structures have succeeded in mobilising workers repeatedly, creating ties among the various trades. This is, then, a departure from the general union situation where there is little evidence that any Europeanisation of social conflict is on the agenda.
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Appendices
Notes
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[1]
Une seule exception notable a été l’euromanifestation de mars 1997 à Bruxelles comme soutien de solidarité aux travailleurs belges victimes de la restructuration du siège de Vilvorde de l’usine Renault.
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Le droit de grève est protégé par la Convention de l’Organisation internationale du travail (OIT) n° 87 sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical de 1948, par le Pacte international (ONU) relatif aux droits économiques, sociaux et culturels de 1966, par la charte sociale du Conseil de l’Europe de 1961.
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[3]
Soit la CES et les 12 fédérations syndicales européennes (secteurs) qui sont membres de la CES.
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[4]
Conclusion de 6 accords-cadres interprofessionnels en 14 ans. La dynamique de négociation de secteurs est encore plus faible.
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[5]
Art. 137, 6e alinéa, version consolidée du Traité.
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[6]
L’auteur analyse la profonde transformation des droits de sécurité sociale par ce biais, la Cour introduisant la notion « d’entreprise » et « d’activité économique » pour appréhender les questions de solidarité salariale.
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[7]
Communiqué de presse de la CES, déclaration du secrétaire général John Monks : « L’importance accordée actuellement à la déréglementation, à l’encouragement de l’esprit d’entreprise et à l’opposition aux nouvelles normes du travail au plan communautaire donne déjà aux syndicats le sentiment que l’on encourage trop l’Europe “libérale”. La dimension sociale de l’Europe ne suit pas le rythme d’évolution du marché intérieur » (Bruxelles, 5 juillet 2007).
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[8]
Il n’y a pas lieu ici d’examiner l’histoire singulière des rapports entre syndicalisme communiste et construction européenne.
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[9]
L’ITF existe depuis 1896, c’est une des premières structures syndicales internationales.
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[10]
La structure change de nom au début des années 1990 devenant la Fédération des syndicats des transports (FST). À la suite à un scandale financier, elle sera profondément restructurée en 1999 pour devenir la Fédération européenne des salariés du transport, soit l’ETF (European Transport Federation). À partir de ce moment, les liens avec l’ITF vont progressivement se resserrer et les positions se rapprocher.
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Consciente des tensions syndicales, la Commission a procédé par étapes, en fractionnant le processus de libéralisation à travers une « logique fonctionnaliste » : chaque nouvelle proposition, même modeste, vise à ouvrir une nouvelle « brèche » dans le monopole des compagnies, brèche qui justifiera à son tour une nouvelle loi communautaire. De 1991 à 1996, la Commission a veillé à ce que chaque nouvelle initiative engage un peu plus les États récalcitrants, en s’appuyant sur les États favorables à l’ouverture des réseaux. Puis à partir de 1998, les réformes se sont multipliées pour achever l’ouverture totale de tous les modes de transports. Voir Hilal, 2005 : 222.
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[12]
Outre les grèves françaises et espagnoles, des conflits ont été organisés par les routiers danois en novembre 1996 et les routiers italiens à l’automne 1997.
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Gouvernements de centre-gauche de Romano Prodi en Italie en 1996, travailliste de Tony Blair en Grande-Bretagne en 1997, socialiste de Lionel Jospin en 1997 et social-démocrate de Gerhart Shröder en Allemagne en 1998.
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Par exemple, le cabinet du ministre français des Transports, Jean-Claude Gayssot, tenait régulièrement informé l’ETF des avancées « d’une réglementation sociale par le haut » pour les routiers. Voir aussi les débats au Parlement européen mettant l’accent sur le manque de dimension sociale et en matière de sécurité dans le rail, la route, les ports (voir Hilal, 2007 : 190 et 228 et Decoene, 2006 : 70).
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[15]
Présentes aux congrès des cheminots européens, par exemple, l’ITF et l’ETF y font applaudir les succès des dockers.
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