André Lécrivain, Hegel et l’éthicité. Commentaire de la troisième partie des « Principes de la philosophie du droit ». Paris, Librairie Philosophique J. Vrin (coll. « Histoire de la philosophie »), 2001, 176 p.[Record]

  • Mathieu Robitaille

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  • Mathieu Robitaille
    Ruhr-Universität Bochum

De 1981 à 1987, André Lécrivain a fait paraître, en compagnie de J. Biard, D. Buvat, J.‑F. Kervégan, J.‑F. Kling, A. Lacroix et M. Slubicki, une vaste Introduction à la lecture de la Science de la logique de Hegel (Paris, Aubier-Montaigne), dans laquelle le but premier était de mettre en lumière la processualité du mouvement logico-dialectique qui parcourt d’un extrême à l’autre la Science de la logique. Le présent ouvrage de Lécrivain, intitulé Hegel et l’éthicité et portant sur la troisième partie des Principes de la philosophie du Droit, se situe explicitement dans le prolongement de ces travaux sur la logique hégélienne (cf. p. 7). Ceci signifie pour Lécrivain que son commentaire concernant la plus haute sphère de l’esprit objectif entend lui aussi privilégier l’aspect logique et processuel du propos hégélien disséminé dans les pages des Principes de la philosophie du Droit. Il ne s’agit donc pas tant pour Lécrivain de proposer une « nouvelle » interprétation de la pensée hégélienne de l’éthicité, que d’exhiber la présence ou l’efficience des schèmes logiques, exposés par Hegel dans la Science de la logique, à même le développement de l’esprit objectif en son moment éthique, et ce question « d’en éprouver la validité et d’en vérifier l’efficacité » (p. 8). Ce que cet ouvrage se propose, c’est donc d’une part de rendre compte de l’affirmation continuelle de Hegel suivant laquelle le développement de l’esprit objectif repose sur le développement logique, et ce en montrant dans le détail comment la processualité des Principes de la philosophie du Droit constitue une exemplification de la processualité logique qui la fonde ; d’autre part, et conséquemment, cet ouvrage de Lécrivain se propose de rendre justice à ce qui apparaît peut-être comme la plus haute prétention hégélienne eu égard à la sphère juridique, morale, sociale et politique, à savoir que cette sphère soit une production de la raison, et qu’à ce titre elle soit considérée comme rationnelle au-dedans de soi, et par suite comme digne d’un traitement systématique ou « scientifique » : « Tel est donc l’objectif que s’est intentionnellement fixé ce commentaire qui se veut moins interprétatif que soucieux de restituer le cheminement spéculatif par lequel le domaine éthico-politique — auquel on déniait jusque-là la possibilité d’accéder à un traitement et un statut scientifiques, comme le souligne la Préface — devient au contraire l’objet d’une élucidation rigoureuse et systématique grâce à la mise en oeuvre des moyens théoriques fournis par la logique dialectique » (p. 8-9). L’ouvrage débute par une très brève (14 pages !) présentation de la Préface, de l’Introduction et des deux premières sections des Principes de la philosophie du Droit (« droit abstrait » et « moralité »). Loin d’expliciter le propos hégélien de ces sections, ce qui aurait naturellement exigé de plus amples développements, Lécrivain se contente plutôt de préparer le terrain en vue d’une compréhension minimale de la situation de la sphère de l’éthicité dans le tout de l’esprit objectif. Le commentaire débute donc à proprement parler avec l’exposition de la troisième section des Principes. La méthode d’exposition choisie par Lécrivain est l’une des plus lourdes qui soient : le commentaire littéral, paragraphe par paragraphe, remarque par remarque. Or, cette méthode d’exposition non seulement n’aide pas selon nous à rendre manifeste l’articulation logique de cette section, mais elle en constitue par moments un obstacle important. Au mieux, cette méthode permet à Lécrivain d’indiquer au passage le lien entre tel élément éthique et tel élément logique, ce qui réduit considérablement cependant la portée de la tâche que s’est assignée l’auteur en début d’ouvrage, soit de repérer la …