Recensions

Lawrence Dewan, Form and Being. Studies in Thomistic Metaphysics. Washington, D.C., The Catholic University of America Press (coll. « Studies in Philosophy and the History of Philosophy », 45), 2006, xviii-265 p.[Record]

  • Lionel Ponton

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  • Lionel Ponton
    Université Laval, Québec

Dans ce livre d’une présentation soignée et d’une typographie impeccable, le Père Lawrence Dewan, o.p., professeur au Collège dominicain d’Ottawa, a regroupé, selon un ordre systématique, quelques articles, parmi plusieurs autres, qu’il a consacrés, depuis près de vingt-cinq ans, à l’importance de la cause formelle et au concept d’être en métaphysique thomiste. Je dois dire que j’ai éprouvé beaucoup de satisfaction à suivre pas à pas les analyses textuelles méticuleuses et nuancées, toujours suggestives, par lesquelles ce chercheur émérite réussit à éclairer ces deux thèmes difficiles et centraux au point d’en renouveler l’interprétation et d’en souligner le caractère fondamental. Les débats qu’il engage avec des opposants, parfois redoutables, sont tous motivés par la recherche de la vérité et, malgré leur vigueur, n’excluent jamais la bienveillance et l’humour. Il faut lire à ce propos le chapitre 6 intitulé : « St. Thomas and Analogy : The Logician and the Metaphysician », dans lequel, sans se porter à la défense du traité de Cajetan, De nominum analogia, il reproche à son ami Ralph McInerny, directeur du Maritain Center de l’Université Notre Dame, d’avoir, dans son essai Aquinas and Analogy, fait une lecture composite et déroutante de la triple division de l’analogie proposée par saint Thomas en 1,19 de son commentaire des Sentences de Pierre Lombard, une division que le Père Dewan connaît bien pour l’avoir utilisée comme pièce maîtresse de sa thèse sur Johannes Capreolus. Il amorce sa critique en citant Charles De Koninck : « […] analogy is primarily a logical problem, to be used eventually in analogical naming by the metaphysician […] » (« Metaphysics and Interpretation of Words », Laval théologique et philosophique, 17, 1 [1961], p. 33), puis il argumente de façon très méthodique et avec une ardeur qu’il ne tente pas de dissimuler. Il s’applique à montrer que saint Thomas fait sienne la distinction tripartite des types d’analogie et que le deuxième — dit d’inégalité — est important en ce qu’il indique qu’un terme peut être considéré univoque par le logicien (secundum intentionem), mais analogue par le métaphysicien (secundum esse). Il faut distinguer le genre logique qui a une seule signification du genre métaphysique dont la signification varie selon sa réalisation dans les choses. À ce dernier point de vue, « corps » se dit analogiquement des corps corruptibles et des corps incorruptibles. Le Père Dewan est loin de céder au plaisir de la polémique. Avec une aménité qui ne se dément pas, il tente de sauvegarder ce qui est préalable à la métaphysique, le caractère légitime des divisions de l’analogie faites par le métaphysicien pour dénommer les réalités qu’il étudie, même si le logicien, limité aux intentions logiques, ne peut s’y reconnaître tout à fait. Le métaphysicien s’intéresse à la fondation dans la réalité des dénominations analogiques qui sont pleinement elles-mêmes quand leur fondement est dégagé. C’est aussi avec modération et peut-être trop brièvement que le Père Dewan met en doute la déclaration de Ralph McInerny selon laquelle saint Thomas ne parle jamais d’analogie de l’être — « terminologically speaking, there is no analogy of being in St. Thomas » (Aquinas and Analogy, The Point of the Book, p. 162) — surtout, assurément pas à propos de « la dépendance causale dans laquelle se produit la descente hiérarchique de tous les êtres à partir de Dieu ». Le Père Dewan s’oppose à ce point de vue et renvoie à la Summa theologiae Ia, q. 4, a. 3, où l’Aquinate stipule que la ressemblance de l’effet à la cause n’est, de la créature à Dieu ni spécifique ni …