Recensions

Paul Cadrin, Gilles Routhier, dir., La liturgie en quête de sa musique. Montréal, Médiaspaul (coll. « Pastorale et Vie », 19), 2007, 164 p.[Record]

  • Patrick Prétot

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  • Patrick Prétot
    Institut Catholique de Paris

P. Cadrin et G. Routhier publient les actes du colloque organisé en 2003 par les facultés de musique et de théologie à l’occasion du centenaire de Tra le sollecitudini (22 nov. 1903), le motu proprio de Pie X sur la musique liturgique. On ne s’étonnera pas que la « participation active » en fournisse le « thème » au sens quasi musical. Christine Laflèche (Faculté de théologie et de sciences religieuses, Université Laval, Québec) applique au texte du motu proprio les outils de la sémiotique pour préciser la conception de la participation active qui en ressort. Le peuple chrétien apparaît comme « acteur-récepteur d’une action intérieure (réception) » mais aussi « spectateur d’une action intérieure (assistance) » et « acteur dynamique d’une action intérieure (adoration et union) » (p. 60). Se trouve ainsi mise en lumière la dimension intérieure de la participation reliée à l’ouverture à la transcendance et à la communion ecclésiale (p. 62). En contrepoint, Gilles Routhier (Faculté de théologie et de sciences religieuses, Université Laval, Québec) replace la question dans les débats du xxe siècle pour éclairer la Wirkungsgeschichte d’un texte dont se réclament aussi bien les partisans du chant grégorien que ceux du cantique populaire. Il propose une approche comparative des actes magistériels postérieurs, notamment Divini cultus de Pie XI, 20 déc. 1928, et Musicae sacrae de Pie XII, 25 déc. 1955. La mise en évidence des jeux de citations (cf. p. 80) montre que ces textes constituent « comme les fragments d’une conversation » qui « accompagnent et encadrent des évolutions repérées sur le terrain » (p. 92). G. Routhier en appelle à une herméneutique de l’action de l’Église catholique pour éviter les oppositions stérilisantes reposant sur l’absolutisation des textes. Abordant la question de la créativité depuis Vatican II, Paul Cadrin (Faculté de musique, Université Laval, Québec) part de SC 123 qui sert de point d’appui : « L’Église n’a jamais considéré aucun style artistique comme lui appartenant en propre », car elle a admis les genres de chaque époque, peuple et nation. Mais il souligne que ceci est dit à propos de l’art sacré et non pas de la musique liturgique (cf. SC 112). Dès lors, « entre l’article sur l’art sacré, qui commence par ouvrir toute grande la porte de la créativité, pour en fixer les balises par la suite, et l’article sur la musique sacrée, qui fait l’éloge de la tradition pour finir en entrouvrant craintivement la porte à l’innovation, il y a une différence de ton qui ne manque pas de soulever des questions » (p. 104). À partir d’un diagnostic de « rupture séculaire » entre Église et artistes, une rupture en partie surmontée, au cours du xxe siècle, par des initiatives audacieuses en architecture ou dans les arts plastiques, mais non en musique (cf. p. 106), il montre que le mouvement de créativité, qui a suivi le concile Vatican II, s’est comme détaché d’un texte conciliaire qui ne pouvait le porter faute de fournir le cadre des retrouvailles entre création contemporaine et exigences de la tradition, spécialement sur le rapport texte et musique. L’ouvrage comporte également des contributions spécifiques sur les restaurations du chant grégorien à travers l’histoire (Jean-Pierre Pinson, Faculté de musique), sur le rôle de l’École de musique de l’Université Laval (Antoine Bouchard, Professeur émérite de la Faculté de musique) et sur l’expérience des petits chanteurs du Mont-Royal (Gilbert Patenaude, dir.). Enfin, dans ce bel ensemble, il faut saluer la contribution de Sylvain Caron (Faculté de musique de l’Université de Montréal), intitulée « L’essence du chant liturgique repose sur le dialogue », et qui …