Grass, T. (2002) : Quoi ! Vous voulez traduire « Goethe » ? Essai sur la traduction des noms propres allemands-français, Berne, Peter Lang, coll. « Travaux interdisciplinaires et plurilingues en langues étrangères appliquées », 296 p.[Record]

  • Georges Kleiber

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  • Georges Kleiber
    Université Marc Bloch, Strasbourg, France

Après l’ouvrage récent de M. Ballard (2001, Le nom propre en traduction, Paris, Ophrys), voici un nouvel ouvrage sur la traduction des noms propres, dont la particularité est de se centrer sur la traduction des noms propres allemands-français, alors que celui de Ballard porte essentiellement sur la traduction anglais-français. L’exclamation du titre rappelle plaisamment que, généralement, les théoriciens des noms propres font de l’intraduisibilité une propriété spécifique de ce type de dénominations qui refléterait leur absence ou du moins la ténuité de leur sens. Dans la pratique, on sait bien qu’il en est autrement : on est très vite confronté au problème de savoir s’il faut traduire tel nom propre ou non et si oui comment il faut le faire. Et ceci que ce soient des noms de personnes comme Aristote, qui devient en allemand Aristoteles, des noms de lieux où – les Alsaciens le savent bien – la Forêt-Noire en face est der Schwarzwald, ou encore des noms d’oeuvres d’art (la Joconde, c’est en allemand die Mona Lisa), des monuments (la tour Eiffel, c’est der Eiffelturm), etc. Bref, comme le souligne l’auteur dans son introduction (p.1), « il n’apparaît pas si aberrant de prendre en considération l’importance des noms propres en traduction et la nécessité d’envisager un traitement spécifique de cette classe de mots au niveau lexical ». Ceci d’autant plus que dans un corpus journalistique les noms propres représentent un dixième environ de l’ensemble des mots (p. 2). Mais comment faire ? Deux types de problèmes se posent immédiatement : La première question suppose que l’on se penche sur la définition des noms propres, la seconde que l’on élabore une typologie des noms propres qui soit efficace. Le chapitre I règle la première, les autres chapitres, surtout à partir du chapitre III, s’occupent de la seconde. Le chapitre I (« Qu’est-ce qu’un nom propre ? », p. 11-39) répond à la première en effectuant un parcours assez complet à travers le temps et les théories sémantiques du nom propre. Thierry Grass envisage successivement le traitement du nom propre dans les grammaires, la question centrale et si complexe de la référence des noms propres, le problème de la notoriété, celui des rapports entre noms propres et encyclopédie, noms propres et terminologie, le passage du nom propre au nom commun (il préfère dans ce cas le terme d’éponyme au classique antonomase, p. 33) et celui, inverse, du nom commun au nom propre. Au terme de son investigation, il propose une définition du nom propre qui en fait « un nom associé primairement à un référent individualisé. Le référent est un être vivant ou divin, un lieu, une oeuvre humaine ou encore un événement unique, son existence est culturellement notoire, c’est-à-dire attestée dans les faits, dans le mythe ou dans la fiction » (p. 38). Définition, soulignons-le, dont le but est avant tout « utilitariste » et qu’il ne faudrait donc pas juger en théoricien du nom propre. Du point de vue théorique, c’est la caractérisation fournie page 36 de l’opposition nom commun-nom propre qui peut être mise en avant par son côté stimulant : « Le nom commun entretient une relation primaire avec le concept et secondaire avec le référent, alors que le nom propre entretient une relation primaire avec le référent et secondaire avec le concept. » La définition « pratique » a pour but de permettre à Thierry Grass de retenir les noms propres qu’il veut ou qu’il faut retenir traductorialement parlant. Le primairement de la définition (associé primairement à un référent individualisé) est …