Note de lecture

Michel Glais, « Concentration des entreprises et droit de la concurrence », Economica, 2010[Record]

  • Pascal Gaudron and
  • Aziz Mouline

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  • Pascal Gaudron
    HEC Montréal

  • Aziz Mouline
    Université de Rennes 1

L’examen de la très grande majorité des manuels en économie et en management stratégique fait apparaître une lacune majeure : l’absence du droit de la concurrence. Pourtant « aucune entreprise ne peut aujourd’hui envisager de réaliser une opération de fusion-acquisition sans s’interroger, au préalable, sur la compatibilité avec les dispositions du droit de la concurrence ». Cette remarque de l’auteur ne concerne pas que les grandes firmes, les opérations de croissance externe impliquent aussi des entreprises moyennes en raison des seuils de contrôle retenus par les autorités souvent nationales. Le livre du professeur Michel Glais de l’Université de Rennes 1 et expert judiciaire inscrit auprès de la Cour de Cassation en France, « Concentration des entreprises et droit de la concurrence » paru chez Economica en juin 2010, a pour objectif de développer d’une part les fondements analytiques sur lesquels s’appuient les autorités de la concurrence, et d’autre part d’illustrer l’analyse à partir de cas de la jurisprudence européenne et française. La grille de lecture économique et juridique qu’il fournit devrait permettre d’intégrer le droit de la concurrence dans la phase de diagnostic stratégique préconisée par de nombreux modèles ou cabinets. Le diagnostic concurrentiel, qui ne doit pas être confondu avec le schéma de Porter, doit permettre d’examiner le projet concerné, c’est-à-dire « les effets possibles et prévisibles sur le maintien d’une concurrence suffisante sur les marchés affectés par l’opération ». Les opérations de croissance externe (concentration horizontale, concentration verticale et concentration conglomérale dont les effets d’efficience font débat, chapitre un), qui, pour l’auteur, constituent une des composantes incontournables de la logique économique d’une économie de marché, doivent être examinés afin qu’il n’y ait pas création « d’entités économiques dont le seul objectif est de se doter d’un pouvoir de marché exercé au détriment des consommateurs ». Sur ce point, le règlement communautaire précise que la notion de concentration est censée couvrir les opérations entraînant « un changement durable de la structure de marché ». Le débat sur les gains d’efficience attendus par ces types de concentration « demeurent toutefois toujours difficiles à estimer en pratique ». La dernière section du premier chapitre développe ce point, elle est tout à fait intéressante, mais un peu courte. L’analyse doit déterminer l’impact réel d’une opération de concentration sur la promotion de l’efficience économique. Pour l’auteur, le jugement doit être prudent car les difficultés méthodologiques donnent souvent des analyses différentes sur la validation de la thèse de l’efficience. Il nous cite l’apport des nouvelles analyses sur la prise en compte des modifications de l’environnement en donnant comme exemple les vagues de concentration aux États-Unis entre 1970 et 1990 qui ont été pour la plupart « justifiées par une nécessité de reconfiguration de secteurs profondément affectés par des modifications importantes de leur environnement ». D’autres exemples sont signalés comme le transport aérien, les télécommunications, le secteur bancaire par l’effet dérégulation, le secteur textile comme illustration d’une législation moins protectionnisme, les secteurs sidérurgique et agro-alimentaire comme illustration de la réduction des capacités de production dans un contexte de stagnation de la demande. Les chocs d’offre ou de demande sont donc des facteurs de modifications importantes. Le débat est ouvert entre les acteurs et les autorités : augmentation des pouvoirs de marché et donc réduction potentielle de la concurrence ou bien « signal de la nécessité de restructuration du secteur concerné » ? Pour M. Glais, ardent défenseur du processus concurrentiel, « la compétition pour l’acquisition des droits de propriété d’une entreprise constitue un des mécanismes fondamentaux de la pérennité du processus concurrentiel ainsi que d’une promotion plus rapide du progrès économique ». Les opérations relevant …

Appendices