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La confiance est le ciment des relations économiques et managériales : sans confiance, la reproduction du système économique ou le bon fonctionnement d’une organisation ne peuvent être assurés de manière pérenne (Fukuyama, 1995). La nécessité objective de sa préexistence et son caractère essentiellement à la fois subjectif et intersubjectif ont conduit trop souvent à considérer la confiance comme une institution qui doit être postulée, plutôt qu’introduite comme une variable fondamentale des modèles économiques et managériaux.

Si depuis une vingtaine d’années, la confiance apparaît comme un concept qui doit être étudié en tant que déterminant des relations économiques et managériales, les façons de l’étudier ont souvent conduit à la considérer comme réductible à une analyse de risques (Williamson, 1993) ou à une routine (Nooteboom, 2002). L’étude de la confiance se confronte en effet à la difficulté d’essayer d’observer directement et objectivement un phénomène qui résulte d’une interprétation subjective. Le développement de la confiance dépend en effet, en grande partie, des contextes spécifiques dans lesquels se déroulent les interactions sociales (Shi et al., 2015). Il faut alors se résoudre à accepter de considérer la confiance comme un phénomène relevant du seul individu qui « parie » en faisant confiance, ou comme une construction sociale dont on considère plus la déclaration que la mise en oeuvre.

Le choix de considérer la confiance au travers de sa mise en oeuvre dans un projet entrepreneurial de très petite taille (c’est à dire dans le cadre d’une entreprise de moins de dix personnes) nous est apparu comme un moyen de dépasser la limite épistémologique que constitue la nécessité de s’appuyer sur des données déclaratives ou sur un modèle qui en fait un pur calcul. En effet, que la confiance s’exprime dans une relation d’échanges mutuels ou dans une relation d’adhésion, elle est toujours aussi une forme d’intelligence émotionnelle (Chanlat 2003; Cherniss et Goleman, 2003) et ne peut se concevoir simplement qu’à une petite échelle.

C’est donc à travers l’analyse de la survie de micro-entreprises françaises que nous considérerons l’impact des formes de la confiance interpersonnelle (la confiance intentionnelle d’une part, et la confiance de compétence d’autre part). Le rôle de la confiance dans les activités entrepreneuriales a en effet été peu étudié au travers de grandes bases de données. Plus grave encore, Pollack et al. (2017) constatent et regrettent le fait que l’étude de « la confiance dans un contexte d’entrepreneuriat - notamment permettant l’émergence de nouvelles entités - reste largement inexplorée », en déplorant notamment les progrès minimes constatés, à la fois théoriquement mais également professionnellement, depuis l’édition du numéro spécial 2006 de la revue « Entrepreneurship Theory and Practice » axé sur le rôle de la confiance dans les activités entrepreneuriales. Ce sera donc l’apport majeur de ce travail que de montrer l’impact sur la survie des formes interpersonnelles de la confiance ainsi que d’en mesurer les effets croisés à partir d’un échantillon de 11 922 entreprises françaises dont la survie (ou la liquidation) a été observée durant 5 ans et demi.

Dans un premier temps, nous considérerons les différentes approches des liens entre entrepreneuriat et confiance pour formuler des hypothèses sur l’impact des différentes formes de confiance interpersonnelle sur la survie des micro-entreprises, puis nous présenterons et discuterons les résultats de trois modèles de survie. Ce travail doit donc être considéré comme une approche complémentaire (plutôt qu’alternative) des approches socio-managériales, en ce qu’il constitue un regard économétrique sur une question essentiellement managériale.

Confiance et entrepreneuriat

Comment définir la confiance ? Focus académique sur les formes de confiances relationnelles

Au cours des dernières décennies, la littérature académique en management a indéniablement contribué à démontrer le caractère indispensable du concept de confiance dans le milieu des affaires (Pereira & Fayolle, 2013). En parallèle, le développement de ces recherches a également permis d’illustrer une absence d’accords sur la définition même de ce concept (Bachmann & Zaheer, 2006; Bhattacharya et al., 1998), ainsi qu’un besoin de clarification à cet égard. Comme le rappelait Schoorman et al. (2007), « il reste encore beaucoup à faire et de nombreuses pistes très prometteuses (demeurent) pour approfondir » notre compréhension du concept de confiance en management. Ce concept de confiance a ainsi fait l’objet de débats et de désaccords nombreux sur la façon dont il devrait être interprété (Lewicki et al., 1998), ce qui s’illustre concrètement par la pluralité des définitions qui lui sont tour à tour attribuées.

De ces observations, il est ainsi nécessaire de retenir le fait que la confiance demeure une notion polysémique, recouvrant de nombreuses dimensions (Rousseau et al., 1998; Bachmann & Zaheer, 2006) : à la fois économique (Williamson, 1993; Korczynski, 2000), sociologique (Granovetter, 1985; Zucker, 1986), psychologique (Deutsch, 1958; Rotter, 1967), philosophique (Baier, 1986), ou organisationnelle (Lewicki et al., 1998; Rousseau et al., 1998).

Dans une optique managériale, la confiance se matérialise notamment par la croyance mutuelle développée par deux individus qu’aucun n’aura pour volonté de profiter de la faiblesse de l’autre (Barney & Hansen, 1994). C’est sur la base de cette définition de la confiance, reprise dans la littérature en management (Zaheer et al., 1998, Bhattacharya et al., 1998; McEvily et al., 1998; Korczynski, 2000), que nous allons appuyer le développement de notre étude. La définition de la confiance par Barney & Hansen (1994) présente en effet l’avantage de s’avérer suffisamment générale et inclusive, en étant à la fois relationnelle et dispositionnelle (McEvilvy, et al., 1998), pour intégrer les différentes perspectives de la confiance en management, tout autant qu’elle englobe la vision des théoriciens de la personnalité en Psychologie (Simon, 2007).

Ces considérations nous poussent légitimement à ne pas considérer, dans le cadre de cette étude en tout cas – cela fera l’objet d’une analyse postérieure -, le rôle joué par la confiance en soi, au profit de l’étude de formes de confiances relationnelles. En particulier car, de par sa nature dispositionnelle (Rotter, 1967; Höhmann & Welter, 2005), la confiance demeure un objet d’analyse observable immédiatement selon la nature d’un individu, plutôt que lié à une situation quelconque (Zaheer et al., 1998; Welter, 2012). Ce qui peut s’avérer inopportun pour nous, dans la mesure où l’un des objectifs premiers de notre étude est de s’intéresser aux conditions de développement de formes de confiances distinctives et leurs impacts longitudinaux sur la survie d’initiatives entrepreneuriales.

En renvoyant à la fois à des considérations de dépendance et de vulnérabilité (Mayer et al., 1995; Schoorman et al., 2007), la confiance sera davantage entendue comme un concept opposé à l’opportunisme, et devenant une condition à la coopération (McEvily et al. 1998; Simon, 2007), au même titre que la motivation par exemple (Bandura, 1977; Deci & Ryan, 1985). La confiance est donc présentée comme un phénomène destiné à réduire les incertitudes, en étant construite d’une part par le biais d’une anticipation, mais aussi d’une attente emprunte de connotation émotionnelle (Nooteboom, 2002). En tant qu’attitude, la confiance est entendue comme se situant aux carrefours de composantes cognitive, affective, et comportementale (Rousseau et al.,1998). Cet aspect est notamment celui qui permet à Schoorman et al., dans leur modèle d’intégration de la confiance revisitée, d’observer la variété des développements continus des études académiques sur la confiance en management, notamment à travers le rapport avec des concepts aussi variés que « l’affect, l’émotion, la violation puis la réparation (de la confiance), la méfiance, les questions internationales et interculturelles, ou l’établissement de modèles spécifiques au contexte » (Schoorman et al., 2007).

S’il reste, comme nous le rappelions plus haut, difficile d’identifier une définition universellement acceptée du concept de confiance en management malgré les nombreux efforts dédiés à cet égard (Lewicki, et al., 1998; Rousseau, et al. 1998; Nooteboom, 2002; Schoorman et al., 2007), des typologies ont malgré tout été établies avec succès afin de synthétiser la littérature. De manière générale, ces typologies s’articulent autour des travaux de Zucker (1986) identifiant 3 grands types de confiance affiliés à des niveaux d’analyse différents : la confiance interpersonnelle, la confiance inter-organisationnelle, et la confiance institutionnelle.

La confiance interpersonnelle, considérée comme l’ancrage originel de la confiance (Rotter 1967, 1971, 1980; Lewicki et al., 1998; Simon, 2007), caractérise tout d’abord la confiance accordée par des individus envers autrui, par le biais de bases cognitives et affectives que ces individus auront développées dans le cadre de leur relation/collaboration. La confiance inter-organisationnelle, elle, se définit comme étant « la confiance accordée par les membres d’une organisation, à l’organisation associée » (Zaheer et al., 1998). Bien que ce type de confiance « dépasse la relation interpersonnelle pour embrasser l’organisation partenaire avec laquelle s’effectue un échange » (Simon, 2007), il est parfois difficile de distinguer à quel point la confiance ainsi établie devrait être considérée comme le fruit d’une relation entre organisations ou, plus simplement, entre individus présents au sein de ces mêmes organisations – mettant alors l’accent à nouveau sur le développement d’une forme de confiance interpersonnelle (Zaheer et al., 1998). La confiance institutionnelle est enfin assimilée par Zucker (1986) à une reconstruction de la confiance produite localement, se développant par le biais d’une reconnaissance et d’une acceptation des règles régissant la vie sociale, politique et économique.

L’attention portée par notre travail de recherche sur le rôle du concept de confiance pour des entrepreneurs dans le développement et la survie de leur TPE (2 à 9 employés) nous pousse à nous focaliser essentiellement sur l’étude de la confiance dite interpersonnelle.

Comment se justifie un tel focus pour l’angle d’observation de cette recherche empirique ?

Tout d’abord, puisque, dans ces conditions précises – le développement et la survie de TPE (2 à 9 employés), ces dernières étant naturellement la forme d’organisation la plus touchée et impactée au quotidien par ces problématique de développement et survie -, l’usage de la confiance inter-organisationnelle reste extrêmement limité, voire inexistant, dans le sens où il n’existe pas de liens véritables développés avec d’autres organisations externes. Et quand bien même cela serait le cas, il demeure difficile de distinguer l’organisation naissante de l’entrepreneur lui-même (en phase de développement initial, l’entrepreneur EST l’organisation), ce qui pousse ainsi à considérer l’émergence d’éventuelles formes de confiance comme de la confiance interpersonnelle échangée entre individus d’organisations distinctes.

De plus, la forme de confiance interpersonnelle demeure la plus prégnante dans la phase initiale du développement d’une initiative entrepreneuriale (Dibben, 2000; Goel & Karri, 2006; Karri & Goel, 2008; Welter, 2012; Scarbrough et al., 2013; Botazzi et al., 2016). Cette phase initiale correspond en effet au moment où les entrepreneurs décident de la manière dont ils souhaitent que des acteurs externes s’impliquent ou non dans le projet, et se voient ainsi accorder une confiance de leur part en préconisant le développement d’une confiance interpersonnelle : la confiance institutionnelle ayant elle été davantage identifiée comme étant la plus opportune dans le développement des étapes plus lointaines de développement d’un nouveau business (Welter, 2012; Afandi et al., 2017).

L’objet des parties suivantes consistera donc à illustrer comment cette confiance interpersonnelle interagit dans le développement et la survie d’une initiative entrepreneuriale, répondant ainsi à l’appel de Welter (2012) selon qui trop peu d’études académiques se sont concentrées explicitement sur la façon dont la confiance est réellement développée en entrepreneuriat.

Comment la confiance influence le développement d’une initiative entrepreneuriale ? L’influence de la confiance interpersonnelle

Comme identifié précédemment, la confiance a dans la littérature académique été considérée comme un « concept méso » (Rousseau et al., 1998) pouvant être appréhendé par le biais de perspectives pluri- ou cross-disciplinaires. Ainsi, à l’instar de différentes disciplines du management, la littérature académique en entrepreneuriat a démontré, au cours de ces dernières décennies, un intérêt grandissant pour le concept de confiance (Boyd & Vozickis, 1994; Welter and Smallbone, 2006; Goel & Karri, 2006; McGee et al., 2009; Welter, 2012; Giacomin et al., 2015). En pratique, en plus d’avoir initialement confiance en la réussite de leurs propres projets, les entrepreneurs doivent en effet faire confiance à d’autres individus, et être réciproquement reconnus comme étant des personnes de confiance, afin de créer les conditions de croissance de leur business : la confiance joue ainsi indéniablement un rôle prépondérant dans les premières phases du développement de leur nouvelle entreprise (Mayer et al., 1995; Dibben, 2000; Goel & Karri, 2006; Welter, 2012; Scarbrough et al., 2013), celle-là même où les entrepreneurs peuvent être sujets à des périodes de doute (Jacquemin & Lesage, 2016). L’établissement de relations de confiance avec d’autres acteurs de leurs environnements à même de leur fournir les ressources nécessaires à la création de leurs entreprises constituera ainsi une activité critique des entrepreneurs (Pollack et al., 2017).

Une justification possible au développement de la confiance se résume au fait qu’elle a tendance à réduire les risques inhérents à toute démarche entrepreneuriale (Welter & Smallbone, 2006; Jucevičienč, & Jucevičius, 2017). Un autre attribut constaté de la confiance est sa capacité à être utilisée comme un mécanisme de gouvernance (Lumineau, 2017), particulièrement efficace dans le développement entrepreneurial d’entreprises familiales (Ponthieu & Caudill, 1993; Dibben, 2000; Höhmann & Malieva, 2005; Carsrud, & Brännback, 2011; Shi et al., 2015; Allen et al., 2019) ou multi-familiales (Kudlats, et al., 2019), pouvant même dans certains cas être considéré comme à l’origine de l’établissement d’un avantage compétitif (Wang, 2016). Par développement d’entreprises familiales, nous dépeignons ici un contexte particulier où la démarche managériale se développe et s’entretient majoritairement entre conjoints ou autres membres d’une fratrie/dynastie, notamment par la mise en place d’un capital social (Coeurderoy & Lwango, 2014; Mignon & Ben Mahmoud-Jouini, 2014).

Bien que le rôle de la confiance soit alors avéré comme étant un élément déterminant du développement entrepreneurial, on ne peut cependant solliciter l’usage de ce concept pour tout expliquer. Nombreux sont en effet les exemples montrant l’assimilation de ce concept à n’importe quelle manifestation entrepreneuriale impliquant une forme de coopération (Welter & Smallbone, 2006). Cette constatation peut notamment s’expliquer par les éléments avancés dans la partie précédente, relatifs à la difficulté à clairement établir une définition universellement adoptée du concept de confiance (Lewicki et al., 1996; Rousseau et al., 1998). Parmi les différentes formes prises par la confiance, les auteurs s’entendent pourtant sur le fait que la confiance interpersonnelle peut jouer un rôle non-négligeable dans le développement d’initiatives entrepreneuriales.

Les formes de confiances intentionnelle et de compétence constitutives de la confiance interpersonnelle

Dans le cadre d’une initiative entrepreneuriale, la confiance interpersonnelle pourra être envisagée comme étant une ressource sociale permettant le développement, à la fois de la coopération (McEvily et al. 1998), mais également de la coordination (Mayer et al., 1995; Schoorman et al., 2007). Elle se développera notamment par le biais d’une poursuite d’objectifs communs, nécessitant des communications fréquentes ainsi qu’une certaine proximité entre les individus (Simon, 2007), sous peine de voir cette confiance se disloquer et devenir difficilement reconstituable (Bachmann et al., 2015). La confiance interpersonnelle trouve donc indéniablement en partie ses origines dans le développement de bases cognitives et affectives (Pereira & Fayolle, 2013) matérialisées, sur le plan cognitif, par le développement de valeurs telles que l’honnêteté, l’intégrité, la réputation, ou encore la fiabilité et qui émergent de la relation passée. D’un point de vue affectif, la confiance interpersonnelle s’appuiera davantage sur des aspects relatifs à l’histoire de la relation liant les individus concernés, que cela soit par le biais d’un attachement émotionnel, ou par l’investissement sentimental consenti par ces derniers dans le temps (Pereira & Fayolle, 2013).

C’est par le biais de ces développements à la fois cognitifs et affectifs que la confiance interpersonnelle sera vue comme à la fois « la colle et le lubrifiant » (Gambetta, 1988) sans lesquels toute activité relationnelle, et par conséquent, tout développement de capital social (Welter & Smallbone, 2006), ne saurait être possible (Welter, 2012). L’établissement d’une forme confiance, en parallèle d’autres éléments tels que le réseau ou les normes, étant en effet identifié comme un élément fondateur de la mise en place d’une forme de capital social chère à tout acteur managérial (Shi et al., 2015; Afandi et al., 2017).

Nombreux sont ainsi les auteurs qui, dans la recherche académique managériale ou sociologique (Rotter, 1967, 1971, 1980; Zucker, 1986; Zaheer et al., 1998; Lewicki et al., 1998; Simon, 2007), se sont intéressés au développement de cette confiance interpersonnelle. De ces différents travaux académiques a notamment pu être établi que la confiance interpersonnelle pouvait être distinguée en deux sous-formes singulières : la confiance dite intentionnelle, et la confiance de compétence (Sako, 1992), chacune disposant de caractéristiques particulières.

La confiance intentionnelle illustre, tout d’abord, le fait qu’un individu fera confiance à un autre individu car il est convaincu que ce dernier ne trahira pas leurs engagements en faisant preuve, par exemple, d’opportunisme (Simon, 2007). Par comportement opportuniste, on pourrait par exemple citer l’illustration d’une rétention d’information vitale au succès ou échec commercial d’un projet entrepreneurial. Il sera ainsi suggéré que la confiance intentionnelle sera avant tout contextuelle et se développera avec le temps, au fur et à mesure que les différentes parties-prenantes constatent qu’elles partagent des principes d’équité et des attentes convergentes, en matière d’obligations informelles notamment (Sako, 1998).

La confiance de compétence, elle, illustrera une confiance établie par un individu envers un autre individu détenant un certain nombre d’aptitudes et de compétences attendues (Sako, 1992). Ainsi, cette confiance de compétence fournit l’assurance qu’un collaborateur puisse être chargé d’effectuer une tâche selon les spécifications et les exigences de qualité requises, sans que pour cela soit mis en place une quelconque éventuelle modalité de contrôle coûteuse en énergie et ressources.

Dans le cadre de notre étude académique, le focus sur ces deux formes de confiance sera d’autant plus approprié que ces dernières s’avéreront particulièrement prépondérantes dans l’établissement des premières phases d’une activité entrepreneuriale. En effet, si le rôle joué par la confiance de compétences s’avérera critique dans le cadre de relations techniques établies entre partenaires, le rôle de la confiance intentionnelle s’étendra lui au-delà des relations existantes et comprendra également le transfert de nouvelles idées ou innovations notamment. Ainsi, alors que la confiance de compétences profitera principalement à l’efficacité opérationnelle et technique, la confiance intentionnelle, en plus de favoriser les développements cognitifs et affectifs entre collaborateurs, contribuera également à l’efficacité dynamique des systèmes de production mise en place au sein d’une toute nouvelle activité entrepreneuriale.

A travers ces précédentes parties, nous avons été en mesure de revenir sur les principaux pans constitutifs de la littérature académique développée sur le thème de la confiance en management. De cette revue, nous pouvons en tirer notamment une forme de typologie du concept de la confiance (figure 1), et mettre particulièrement en évidence les formes de confiances intentionnelle et de compétence qui seront au coeur de notre analyse. Pour illustrer en quoi ces deux formes de confiance spécifique seront à la base de la constitution de notre modèle d’études, nous allons revenir dans la partie suivante sur les manifestations de la confiance dans la situation de survies entrepreneuriales, et serons ainsi amenés à présenter les hypothèses guidant notre développement analytique.

figure 1

Une typologie du concept de confiance : le cadre de notre étude

Une typologie du concept de confiance : le cadre de notre étude
Source : Auteurs

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Confiance et survie entrepreneuriale : justification de notre modèle d’études

Dans le cadre des premières étapes de développement d’un projet entrepreneurial, les individus sollicitent régulièrement une mixité de sources de capital social susceptibles de contribuer au développement de cette entreprise (Venkataraman, 1997). Parmi celles-ci, les entrepreneurs s’appuieront sur des sources dites informelles, relatives à leurs propres réseaux personnels, dans le but d’obtenir et mobiliser un nombre important de ressources (Welter & Smallbone, 2006; Lamine et al., 2014).

Ce soutien considérable apporté par les « relations fortes » (Welter, 2012) de son entourage et réseau personnel —en particulier s’agissant de la famille, amis proches, ou communautés ethniques (Deakins et al., 2007)— a été démontré comme étant tout particulièrement significatif dans les premiers moments de développement d’une nouvelle entité entrepreneuriale (Bruderl et al., 1992; Anderson et al., 2005; Shi et al., 2015; Williams Middleton, & Nowell, 2018).

Ainsi, des formes spécifiques d’entrepreneuriat sont parfois établies afin de bénéficier d’un certain nombre d’atouts supplémentaires au développement de l’entreprise : c’est par exemple le cas des copreneurs i.e. les couples entrepreneurs qui partagent la propriété, la responsabilité, ou l’engagement dans une création d’entreprise (Barnett & Barnett, 1988), mais qui sont également la forme d’entreprises familiales la plus dynamique de ces dernières décennies (Marshack, 1993; Fitzgerald & Muske, 2002; Begin et al., 2009).

Alors que sur le long-terme, un certain nombre de sources de tensions peuvent apparaître, notamment liées aux difficultés pour des conjoints à faire la distinction entre vies personnelle et professionnelle, le copreneuriat est pourtant considéré comme contribuant significativement à la survie d’une initiative entrepreneuriale dans le cadre de ces premières années de création (Baines & Wheelock, 1998). Par le biais de ce développement spécifique, les copreneurs bénéficient notamment des avantages d’une vision commune/partagée et d’un véritable esprit d’équipe (Van Auken & Werbel, 2006), mais également de la mise en place d’une confiance informelle significative entre ces acteurs extrêmement proches (Ponthieu & Caudill, 1993). Ainsi, comme le rappelle Belenzon et al. (2015), « les couples mariés seraient plus à même de se manager et de renforcer le contrat implicite développé entre eux, relativement aux autres formes d’entrepreneuriat familial ». En cela, les couples de copreneurs constitueraient donc une forme entrepreneuriale plus efficace que les autres formes d’entreprises familiales - généralement qualifiées de coentrepreneuriat (Fitzgerald & Muske, 2002; Anderson et al., 2005).

Ces formes de coentrepreneuriat, qui se développent entre membres d’une même famille et qui se distinguent donc des entreprises créées par des couples mariés, ont une influence positive sur la survie dans ses premières années de l’entreprise ainsi créée (Marschack, 1993). La littérature académique identifie en effet comme explications possibles à ce constat la réduction des coûts d’agence liée au fait que les objectifs familiaux et professionnels sont alors constamment alignés, mais également le fait que les membres de la famille apportent des ressources uniques qui leur sont propres dans le cadre de la création de cette entreprise (Fitzgerald & Muske, 2002; Chrisman et al., 2009; Dyer et al., 2012; Shi et al., 2015). Alors qu’au sein de ces organisations les relations personnelles demeurent bien plus significatives dans la conception de la satisfaction au travail que ne peuvent l’être l’activité en elle-même ou les revenus qu’on en retire (Marshack, 1993), c’est bien la dynamique familiale qui dicte le développement de ces entités coentrepreneuriales (Fayolle et Begin, 2009; Wang, 2016).

En élargissant leur cercle de proximité à l’extérieur de la famille, les entrepreneurs peuvent être amenés à collaborer avec un associé dans la création et le développement de leur entreprise (Deschamps et al., 2014). On parlera alors d’un associé en faisant référence à un statut légal, sans faire explicitement mention d’une quelconque relation précise existant entre les différentes parties (Ponthieu & Caudill, 1993). En tant qu’entrepreneur, l’objectif d’une telle collaboration est alors de profiter des atouts et talents d’un autre individu venant compléter ses propres aptitudes.

La coopération d’un individu avec d’autres collaborateurs peut se faire dans des optiques distinctes : cela peut être dans le cadre du management quotidien de cette entreprise, une fois cette dernière concrètement créée, mais également en amont, dans le cadre de la conception et la mise en place de cette initiative entrepreneuriale – par le biais d’organismes accompagnateurs par exemple (Fayolle, 2004). Indéniablement, les décisions relatives au fondement de cette initiative entrepreneuriale ont un impact sur la performance de plus long-terme de l’entreprise (Boeker, 1989) : les entrepreneurs auront donc tendance à chercher à collaborer avec d’autres individus dans la conception de leur projet afin de limiter les éventuels risques négatifs d’une telle démarche (Dyer et al., 2012), ce qui aura un impact significativement positif sur la survie de cette entreprise dans les premières années de son existence (Baines & Wheelock, 1998).

Qu’un entrepreneur fasse donc appel à la collaboration de son conjoint, d’un autre membre de sa famille, ou bien d’un autre partenaire, la relation établie entre ces différents acteurs sera fondée sur le développement d’une confiance interpersonnelle forte. Selon le statut et la proximité du collaborateur concerné, mais également selon la phase du développement de l’activité (mise en place du projet, ou management effectif de l’entreprise ainsi créée), cette confiance combinera les différents types de confiance interpersonnelle : la confiance intentionnelle – où les individus sont convaincus que l’autre ne trahira pas les engagements pris en amont – et la confiance de compétence - établie entre individus afin de pouvoir bénéficier d’un certain nombre d’aptitudes et de compétences attendues.

À l’issue de cette réflexion, il nous apparaît possible de définir quatre hypothèses qui nous permettront de tester l’effectivité des modalités de la confiance interpersonnelle dans les projets entrepreneuriaux :

  • H1a : la confiance intentionnelle affecte (ou influence) positivement la survie de l’entreprise;

  • H1b : l’effet positif de la confiance intentionnelle sur la survie de l’entreprise est d’autant plus important que la proximité entre les personnes est importante;

  • H2a : la confiance de compétence affecte (ou influence) positivement la survie de l’entreprise;

  • H2b : l’effet positif de la confiance de compétence sur la survie de l’entreprise est d’autant plus important que la proximité entre les personnes est importante;

Données, variables et méthodologie

Les travaux empiriques sur la confiance sont confrontés à des biais tenant à la difficulté d’approcher directement cette question de façon fiable et contrôlée. Ces travaux s’appuient en effet sur des questionnaires spécifiques reposant souvent sur des échantillons restreints au sein desquels la confiance est évaluée directement au travers de questions mentionnant le terme « confiance », sans que son contenu ne soit explicité dans toutes ses dimensions, ce qui nous semble risquer d’affaiblir la portée des résultats de ces travaux. C’est donc pour éviter les biais méthodologiques liés habituellement à la difficulté de récolte de l’information (représentativité et taille de l’échantillon, formulation des questions et interprétation par les personnes interrogées), biais affectif ou de désirabilité sociale (la personne interrogée peut vouloir donner une image d’elle différente de ce que la seule observation de sa situation peut laisser penser) ou biais de confirmation (lorsque la personne qui interroge interprète une réponse dans un sens qui correspond à une intuition qu’elle a), que nous avons choisi une approche différente.

Compte-tenu de la multiplicité des perspectives possibles sur la confiance, mais en accord avec les éléments de définition présentés lors des paragraphes ci-dessus, il nous est apparu utile d’approcher le concept de confiance au travers d’indicateurs indirects qui nous permettent cependant de déterminer précisément quel type de confiance est considéré. Cette approche n’est cependant elle non plus pas exempte de risques de biais, dans la mesure où une approche indirecte impose de prendre en compte les causes potentiellement multiples à l’origine de la détermination d’une variable, et nécessite de s’appuyer sur des modèles complexes susceptibles de décrire les liens entre variables.

Données

Notre travail s’appuie sur la base de données SINE[1], issue de l’Institut National de la Statistique et des Études Économiques (Insee). Il s’agit des résultats d’un questionnaire auto-administré, envoyé de manière aléatoire à un tiers de l’ensemble des entreprises créées au premier semestre de l’année 2002, puis de nouveau en 2005 et 2007 avec un taux de réponse de 93 % (l’absence de réponse d’un chef d’entreprise peut conduire à une amende). La dernière date d’observation de la survie étant janvier 2008, la plus longue durée d’observation d’une entreprise est donc au minimum de 66 mois, c’est-à-dire cinq ans et demi.

Les thèmes abordés par les trois vagues de questionnaires portent sur les caractéristiques individuelles de l’entrepreneur (état civil, diplôme et parcours professionnel antérieur), celles du projet entrepreneurial (préparation, contenu, caractéristiques juridiques, financement, aides) et celles concernant les caractéristiques de l’entreprise au jour de l’enquête (organisation, chiffre d’affaires, effectifs selon leur statut). Aucun ne porte directement sur la question de la confiance dans l’entreprise, mais seulement sur des éléments factuels qui ne sont pas sujets à interprétation de la part de l’entrepreneur lorsqu’il remplit le questionnaire, ce qui contribue à la fois à l’exhaustivité et à la qualité des informations recueillies (c’est pourquoi le choix des variables est essentiel et sera expliqué plus loin).

Cette base de données revêt aussi un caractère unique : c’est à ce jour, pour des raisons liées à des exigences de confidentialité et d’éthique, la seule base de données proposant de faire le lien entre des caractéristiques individuelles et entrepreneuriales sur une période aussi longue. Du fait de son ancienneté, elle a par ailleurs l’avantage de proposer des données concernant une période économiquement stable. Il nous semble que, malgré cette ancienneté, compte-tenu du caractère fondamental et stable de la nature du phénomène de la confiance interpersonnelle, les résultats que nous obtiendrons auront une portée qui dépasse la seule période étudiée et apparaitront féconds pour la recherche en management.

Avant traitement, la base était composée de 92 892 entreprises. Notre objectif étant de tester le rôle des différentes formes de confiance interpersonnelle dans les entreprises, il convenait de construire un échantillon homogène (permettant la comparabilité des résultats obtenus) et pertinent (constitué d’individus dont les caractères décrits permettent la compréhension et l’analyse des effets des différents types de confiance envisagés) pour pouvoir considérer ce type de confiance dans toutes ses dimensions.

Nous avons par conséquent choisi de considérer des Très Petites Entreprises (TPE), aussi appelée micro-entreprises selon la définition qu’en donne la Commission Européenne[2], afin de considérer des entités dans lesquelles les enjeux organisationnels et structurels interfèreront le moins possible avec les enjeux strictement liés à la confiance. Comme présenté plus haut, ce focus sur les TPE s’inscrit également parfaitement dans la définition de la confiance interpersonnelle comme étant un concept majeur de ce type d’entités pour qui les questions de développement et de survie sont les plus appropriées.

La confiance ayant été définie comme existant dans le cadre d’une relation établie entre plusieurs personnes, nous avons aussi décidé, à partir de notre échantillon de TPE, de ne conserver que celles qui étaient, à leur démarrage, composées d’au moins deux individus ou plus (en comptant le créateur de l’entreprise et sans que cela n’implique que ces personnes soient rémunérées), réduisant ainsi notre échantillon à 31 570 entreprises.

Enfin, nous avons supprimé celles qui n’étaient pas des créations pures, mais aussi celles qui étaient des franchises ou des filiales, ainsi que celles qui n’étaient pas actives à plein temps. Notre échantillon s’est ainsi finalement établi à un total de 11 922 entreprises.

Variables

Toutes les variables indépendantes de nos modèles sont des variables muettes (prenant la valeur 0 ou la valeur 1). Seule la variable dépendante, qui mesure la durée de vie de l’entreprise, est exprimée en mois (de 1 à 66 pour les entreprises liquidées durant la période d’observation de l’enquête).

La variable expliquée dans ce travail est la durée de survie de l’entreprise. Elle est calculée à partir des dates de naissance et de décès de l’entreprise fournies par la base SINE. La plus longue durée d’observation commune à l’ensemble des entreprises survivantes est de 66 mois, ce qui représente une durée d’observation de 5 ans et demi. En cas de vente de l’entreprise, son statut n’est pas affecté car elle n’est pas liquidée. La matrice de corrélation (en annexe) ne montre aucune corrélation a priori entre la variable expliquée et les variables explicatives.

Les variables exogènes décrivent les caractéristiques de l’entreprise ou du créateur au moment de la création. Nous appuyant sur la littérature entrepreneuriale s’intéressant aux facteurs influençant la survie des entreprises, nous avons intégré à nos modèles une série de variables identifiées comme ayant un effet significatif sur la survie des start-ups en plus des variables visant à mesurer directement l’effet de la confiance ou de l’une de ses dimensions sur la survie. De cette manière, les résultats que nous obtenons concernant la confiance sont isolés d’éventuelles interactions avec des caractéristiques personnelles du créateur, de son parcours, de l’entreprise ou de l’environnement.

graphique 1

Nombre d’entreprises dans l’échantillon en fonction du nombre de personnes employées au démarrage

Nombre d’entreprises dans l’échantillon en fonction du nombre de personnes employées au démarrage

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Les variables liées à la confiance interpersonnelle

À la suite de notre revue de la littérature, nous distinguons dans la confiance interpersonnelle une forme de confiance intentionnelle et une forme de confiance de compétence.

La confiance intentionnelle s’entend comme la confiance réciproque qui existe entre des personnes qui se coordonnent et collaborent durablement à un projet. Cette confiance est celle qui vient le plus spontanément à l’esprit lorsque l’on considère le sujet de la confiance dans une TPE. Nous avons donc choisi de mesurer l’impact sur la survie des TPE de ce type de confiance à partir du mode de direction de l’entreprise et de la proximité entre dirigeants. Partager la direction d’une TPE nécessite une confiance mutuelle solide et une confiance dans la stabilité de la relation au sein de l’entreprise. L’association est véritablement un engagement de confiance qui se concrétise dans ce que les juristes appellent l’affectio societatis : il représente la volonté de s’associer en tant qu’égaux. C’est donc un engagement réciproque qui caractérise la dimension intentionnelle de la confiance placée en chacune des parties et qui à ce titre nous permet de mesurer l’existence d’un lien de confiance intentionnelle et son intensité.

La base SINE nous permet de distinguer les entreprises selon leur système de direction et par conséquent de mesurer les conséquences de cette forme de confiance intentionnelle sur la survie des TPE. La gouvernance de l’entreprise peut reposer sur une direction seul(e) de l’entreprise par son créateur (modalité [DIRseul]) ou sur une direction avec son conjoint [DIRconjoint], un membre de sa famille [DIRfamille] ou encore un(e) associé(e) [DIRassocié]. Les résultats de nos modèles de survie se comprennent par rapport à la modalité de référence, c’est-à-dire dans ce cas, le fait de diriger seul l’entreprise [DIRseul].

Il est fréquent que le conjoint, ou que certains membres de la famille proches ne soient pas rémunérés alors qu’ils participent à la vie de l’entreprise. Afin de prendre en compte l’avantage financier que représente le fait de ne pas avoir à payer une partie de sa main d’oeuvre, nous avons contrôlé par un deuxième modèle l’influence potentielle de profiter d’une aide non rémunérée [AIDEnonrémunérée] au cas où l’avantage pour la survie de diriger l’entreprise avec son conjoint serait dû non pas à la confiance qui existe entre eux, mais à l’avantage économique de ne pas rémunérer une personne qui travaille pour l’entreprise.

La confiance de compétence, quant à elle, revêt une dimension unilatérale : c’est la confiance que l’on choisit d’accorder à quelqu’un du fait de ses compétences professionnelles ou personnelles. Par exemple, c’est la confiance que l’entrepreneur fait à la personne qu’il ou elle recrute (donc dans le cadre d’une relation de subordination, ce qui la différencie de l’association et de la direction conjointe), et c’est aussi la confiance qu’il ou elle fait à la personne à laquelle il s’adresse pour prendre une décision ou construire un projet : c’est une confiance qui se rapporte à une mission (à laquelle s’applique la compétence reconnue) et peut lui être circonscrite. C’est une confiance qui est liée à la qualité du jugement, l’expertise issue de la compétence, que l’on reconnaît à l’autre. Nous l’évaluerons grâce à des variables liées à la phase préliminaire d’élaboration du projet d’entreprise qui peut avoir été menée seul(e) [PRELIMseul], avec le conjoint [PRELIMconjoint], un membre de la famille [PRELIMfamille] ou un employé de l’entreprise précédente dans laquelle l’entrepreneur exerçait ses fonctions [PRELIMemployéentrpréc] ou enfin avec un organisme de conseil [PRELIMorganismeconseil]. La modalité de référence sera ici [PRELIMseul].

Il nous semble en effet que le choix de l’entrepreneur de travailler à son projet d’entreprise avec une personne (qui ne sera pas nécessairement un associé ensuite) relève d’une forme de confiance en l’expertise (ou la qualité du jugement) de cette personne. Comme pour la confiance intentionnelle, la base SINE nous permet de distinguer ces personnes selon leur proximité avec l’entrepreneur et donc d’obtenir des résultats d’une grande finesse.

Les variables de contrôle global

La littérature sur la survie des start-ups montre que le capital humain, le capital financier et le capital relationnel sont des éléments déterminants pour la pérennité de l’entreprise (Rauch et al., 2005; Cressy 1996; Astebro and Bernhardt 2005; Brüderl et al. 1992; Audretsch and Keilbach 2004; Unger et al., 2011; Stam et al., 2014; Boyer et Blazy, 2014). Par ailleurs, la littérature sur la confiance et ses formes montre pour sa part qu’il peut exister, à des degrés différents — qui ne font pas partie du champ de cette étude — des relations entre la confiance (intentionnelle ou de compétence) et les différentes formes de capital identifiées précédemment (Howorth & Moro, 2006).

Afin de tenir compte des interactions possibles entre ces variables, extérieures à notre objet, et celles qui sont au coeur de notre problématique, des variables concernant l’âge de l’entrepreneur, son genre, son niveau d’études, le caractère innovant de son projet, son niveau de financement, son secteur et sa localisation géographique sont intégrées à toutes nos régressions, mais nous ne reproduirons pas leurs résultats dans le corps du texte afin de préserver la clarté de notre propos.[3]

Méthodologie

Du point de vue économétrique, ce travail s’appuie sur des analyses de survie (Cox, 1972; Kiefer, 1988) qui présente l’avantage, par rapport aux logit ou aux probit, de prendre en compte l’influence des variables indépendantes sur la variable dépendante à chacune des occurrences de l’événement analysé. En effet, lorsque l’on utilise un modèle logit ou probit, l’effet du temps n’est pas pris en compte dans la régression, ce qui revient à ne pas différencier l’impact d’une variable explicative selon le moment de l’apparition de l’évènement. Dans le cas d’une régression de Cox, c’est à chacune des défaillances observées que l’effet de nos variables est mesuré, ce qui nous permet d’obtenir des résultats plus précis et conformes à notre objectif qui est la mesure de l’effet de ces variables sur la survie.

Nous appliquons à notre échantillon une équation linéaire formulée selon le modèle de Cox qui nous permet de définir le risque de défaillance sous la forme :

h(t) représente le risque de défaillance à la période t sachant que l’entreprise était vivante à la période t –1, et h0 le risque de référence (ie. quand toutes les autres variables sont nulles), ßj la constante calculée lors de la régression et servant à mesurer l’effet d’une variable xj sur la survie.[4]

Résultats et discussion

Nous commencerons par analyser les résultats des modèles partiels : tout d’abord, celui qui s’intéresse à l’impact de la confiance intentionnelle sur la survie, puis celui traitant de l’impact de la confiance de compétence sur la survie pour enfin analyser le modèle global qui permet de tenir compte des effets croisés de ces différents types de confiance et d’en évaluer les influences particulières. Nous pourrons ainsi discuter les influences des différents types de confiance sur la survie des TPE.

Modèles partiels

Le premier modèle porte sur l’évaluation de l’impact de la confiance intentionnelle sur la survie des TPE.

Notre première régression (modèle CI(a)) a pour variables indépendantes les variables de contrôle générales <et les variables liées au contrôle de l’entreprise. Il apparaît ainsi que l’entreprise qui est dirigée par le créateur ou la créatrice et son conjoint a des chances de survie supérieures de 24 % à celle qui est dirigée par le créateur ou la créatrice de l’entreprise seulement. S’il ou elle dirige son entreprise avec un membre de sa famille ou un associé, les chances de survie sont supérieures de 19 % par rapport à celui ou celle qui dirige son entreprise seul.

Tableau 1

Statistiques descriptives de l’échantillon des TPE analysée

Statistiques descriptives de l’échantillon des TPE analysée

* : variable de référence italique : variable de contrôle

[Effectif total de la base de donnée exploitée : 11 922 entreprises]

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Ce qui ressort de ce modèle est que lorsque le créateur d’une TPE dirige son entreprise avec son conjoint, un membre de sa famille ou un associé, cela a une influence positive sur la survie de son entreprise : cette entreprise a plus de chances de survivre, que celle d’un entrepreneur qui dirigerait seul, ce qui valide l’hypothèse 1a.

D’autre part, notre hypothèse 1b, selon laquelle le niveau de proximité entre le créateur ou la créatrice de l’entreprise et la personne avec qui il ou elle dirige son entreprise est lié à la survie, n’est pas validée par cette régression. En effet, il apparaît que l’influence sur la survie de diriger avec un membre de sa famille ou un associé conduit exactement au même niveau d’amélioration de la probabilité de survie de l’entreprise.

Dans 12 % des entreprises de notre échantillon, l’entreprise profite gratuitement du travail d’un conjoint collaborateur ou d’autre(s) membre(s) de la famille. Il nous a donc semblé nécessaire, dans le cadre de ce premier modèle, de concevoir une variante (modèle CI(b)) qui nous permettrait de prendre en compte l’effet de l’avantage économique que constituerait un apport de travail gratuit. Nous avions en effet imaginé que l’apport à la trésorerie que représente une main d’oeuvre gratuite (par la flexibilité qu’elle permet) pouvait être à l’origine de la surévaluation de l’influence bénéfique de diriger avec son conjoint ou un membre de sa famille (si celui-ci n’était pas rémunéré).

Nos résultats contredisent cependant cette intuition. Le modèle CI(b) montre en effet exactement les mêmes relations (tant en amplitude qu’en significativité) pour les entreprises dirigées avec le conjoint, un membre de la famille ou un associé. Mais il nous permet aussi d’obtenir un résultat annexe intéressant pour les travaux en lien avec les entreprises familiales notamment : une entreprise qui profiterait de l’aide gratuite d’un membre de sa famille, ou de son conjoint, a 15 % de chances de survie de moins que celle qui n’en bénéficierait pas.

S’il paraît raisonnable pour un entrepreneur de choisir, à qualité de travail égale, la personne qu’il rémunérera le moins (et par conséquent en tirer un avantage financier), il n’apparaît pas raisonnable pour une personne susceptible d’être rémunérée pour son travail de choisir de travailler gratuitement (même si l’on peut imaginer qu’il puisse s’agir une forme d’investissement). Ce résultat pourrait donc s’expliquer par le fait qu’une entreprise qui ne rémunère pas la ou les personnes qui travaille(nt) pour elle doit d’abord être considérée comme une entreprise qui n’a pas les moyens de payer son personnel et par conséquent comme une entreprise dont la pérennité est fragile.

Le deuxième modèle porte sur le rôle joué par la confiance de compétence dans la survie de l’entreprise. Dans ce modèle, la confiance est évaluée à travers le choix que l’entrepreneur a fait de recourir principalement aux conseils de son conjoint, d’un membre de sa famille, d’un employé de l’entreprise précédente, d’un organisme de soutien à la création d’entreprise ou de ne recourir aux conseils de personne.

À l’exception du recours aux conseils offerts par les organismes de soutien à la création d’entreprise qui ne semble pas avoir d’impact positif sur la survie, la confiance accordée à son conjoint, un membre de sa famille ou un membre de l’entreprise précédente constitue un avantage pour la survie de l’entreprise. Si cela semble confirmer l’hypothèse 2a, il est toutefois surprenant de ne pas trouver d’impact positif sur la survie de la prise de conseils auprès d’organismes spécialisés alors qu’il existe un impact positif de la prise de conseils auprès du conjoint ou de membres de la famille, qui, s’ils peuvent du fait de leur proximité avec l’entrepreneur être mieux à même de transmettre leur savoir, pourraient ne pas nécessairement être aussi compétents pour ce qui concerne le conseil à la création d’entreprise.

Modèle global

En étudiant d’abord séparément l’impact sur la survie des deux modalités de la confiance interpersonnelle que sont la confiance intentionnelle (modèle CI(a) et CI(b)) et la confiance de compétence (modèle CC), il nous est apparu que la confiance interpersonnelle joue un rôle positif dans le fonctionnement de l’entreprise. Pour autant, la confiance intentionnelle et la confiance de compétence étant deux aspects de la confiance interpersonnelle, il nous a semblé nécessaire de déterminer les parts respectives de chacune en les estimant dans un même modèle.

Ce modèle global permet de dépasser l’incertitude et les interrogations qui restaient après avoir analysé nos modèles partiels. En combinant, dans la même régression, les éléments liés à la confiance intentionnelle et ceux liés à la confiance de compétence, nous pouvons prendre la mesure de la part de chacun de ces types de confiance. Il apparaît ainsi que les résultats tenant compte des interactions potentielles entre les différents types de confiance sont en partie différents de ceux précédemment obtenus.

Tableau 2

Modèles de notre étude

Modèles de notre étude

Les variables de contrôle globales (âge, sexe, diplôme, caractère innovant de l’entreprise, financement, région et secteur d’activité) ont été incluses dans toutes ces régressions. Leurs résultats ne sont pas inclus afin de ne pas alourdir la lecture des tableaux.

Les résultats obtenus pour ces variables sont en accord avec le consensus existant dans la littérature.

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Ces différences ne nous conduisent pas nécessairement à remettre en cause les résultats précédents, mais bien à élaborer de nouvelles interprétations affinant les précédentes ou à valider des intuitions qui n’avaient pas pu l’être alors. Ainsi, notre modèle CI nous avait permis de valider l’hypothèse d’une relation positive entre la survie de l’entreprise et l’existence d’une relation de confiance intentionnelle forte au sein de l’entreprise, mais pas de valider l’idée d’une survie proportionnelle à cette confiance et à la proximité. Toutefois, dans le modèle global, cette relation apparaît clairement sans pour autant disqualifier l’effet bénéfique de la proximité entre associés (+14 %). Le modèle CI ne montrait pas de différence d’effet sur la survie entre le fait de diriger son entreprise avec un membre de sa famille ou un associé, mais notre modèle global nous permet de valider cette hypothèse, puisque le fait de diriger avec un associé n’améliore plus la survie que de 14 %. Cette différence nous conduit donc à valider notre hypothèse 1b.

En joignant dans un modèle global nos variables des modèles CI et CC, nous prenons en compte les interactions qui peuvent exister entre celles-ci. Ceci est d’autant plus important que notre travail considère deux formes de la confiance interpersonnelle, et qu’il est donc nécessaire de prendre la mesure de chacune de ces formes. Ainsi, dans le modèle global, les effets estimés de la confiance de compétence sont sensiblement différents et nous amènent à reconsidérer et préciser notre première analyse du modèle CC. Là où il nous était apparu que la confiance de compétence, quelle que soit la personne à qui elle s’applique (mais pas à une institution), était un facteur positif pour la survie, il apparaît, à travers les résultats du modèle global, que la confiance en la compétence du conjoint ou d’un membre de la famille n’a pas d’impact sur la survie de l’entreprise.

La confiance en la compétence d’un employé de l’entreprise précédente reste un élément positif pour la survie de l’entreprise, ce qui nous conduit à ne pas rejeter l’existence d’un effet positif de la confiance de compétence sur la survie de l’entreprise et donc à ne pas invalider l’hypothèse 2a. En revanche, l’absence d’effet positif de la confiance de compétence sur la survie pour le conjoint et pour un membre de la famille nous semble pouvoir être interprétée de deux manières qui ne s’excluent pas l’une et l’autre.

S’il est raisonnable de considérer que l’on ne choisit pas sa famille et que l’on ne choisit pas son conjoint (qui nous choisit aussi) pour sa compétence professionnelle, il nous semble que le choix de l’entrepreneur de mettre son projet d’entreprise en place avec son conjoint ou un membre de sa famille ne peut être considéré comme reposant essentiellement sur la compétence de celui-ci. Par conséquent, l’effet positif que nous mesurons quant à l’effet de la confiance de compétence pour un employé de l’entreprise précédente et son absence dans le cas d’un membre de la famille ou du conjoint nous semble devoir conduire à considérer que c’est bien plus la compétence —que la confiance en celle-ci— qui a un effet positif sur la survie de l’entreprise. Il convient par ailleurs de noter que nous ne déduisons pas de cette absence d’effet que le conjoint ou les membres de la famille seraient d’une incompétence néfaste à la survie de l’entreprise, puisque l’effet mesuré (nul en l’occurrence) l’est par rapport au fait ne pas avoir mis en place le projet entrepreneurial avec quelqu’un.

L’absence d’effet lié à la proximité avec la personne à qui l’entrepreneur fait confiance dans le cadre de la confiance de compétence peut aussi être considérée en écho à la littérature sur les enjeux spécifiques des entreprises familiales, du point de vue de la théorie de l’agence. Les travaux de Schulze et al. (2001) ou de Carney (2005) notamment montrent les spécificités en matière de gouvernance des entreprises familiales qu’ils considèrent bénéficier à tort d’un a priori quant à leur capacité à limiter les conflits d’agence. Ainsi, ils pointent les risques et les biais socio-affectifs qui peuvent résulter de l’existence de relations familiales au sein de l’entreprise, notamment le népotisme ou la surévaluation des compétences des personnes familialement proches. Ce qui nous conduit à rejeter l’hypothèse 2b.

Si nous ne rejetons pas l’hypothèse selon laquelle la confiance de compétence est un élément positif pour la survie d’une entreprise, c’est parce que la confiance en la compétence de l’autre est l’élément qui en conditionne l’expression. Et c’est l’expression de cette compétence qui a une influence sur la survie. Ainsi, la confiance de compétence doit-elle être considérée comme ayant une influence positive indirecte sur la survie des entreprises, la confiance étant la condition de l’expression de la compétence indispensable à cet effet positif. C’est pour cette raison que nous validons finalement l’hypothèse 2a.

Les résultats du modèle global nous permettent de préciser l’importance de chacun des types de confiance : la confiance intentionnelle y apparaît comme favorable à la survie de l’entreprise et cela d’autant plus que la proximité entre ceux qui se font confiance est grande; tandis que la confiance de compétence —l’autre constituant de la confiance interpersonnelle— n’est qu’indirectement favorable à la survie d’une entreprise car si c’est bien la compétence qui accroit la survie, c’est la confiance en l’existence de cette compétence qui lui permet de s’exprimer.

Conclusion et recommandations

Le rôle de la confiance dans le fonctionnement des entreprises est mis en avant par la littérature en management, qui lui fait jouer un rôle structurant essentiel dans les interactions humaines. Il est donc légitime que les dirigeants de ces entités envisagent d’entretenir la mise en place de formes de confiance relatives aux particularités de leurs organisations. En fondant notre travail sur une approche « qualitative-objective », nous apportons à cette littérature managériale une première étude mesurant, sur un échantillon homogène de très grande taille, les effets respectifs sur la survie des deux formes de la confiance interpersonnelle.

Ces résultats montrent le rôle significativement positif de la confiance interpersonnelle. A la différence des études plus générales développées sur les thèmes de la confiance et de l’entrepreneuriat telles que Boyd & Vozikis (1994), Welter (2012), et autres McGee et al. (2009) par exemple, notre travail permet en effet de conforter les analyses précédemment effectuées en affinant l’analyse de l’influence des différents types de confiances interpersonnelles (intentionnelle et de compétence) dans le développement managérial des organisations, ainsi que leurs interactions respectives. Ainsi, il apparaît que le rôle positif de la confiance intentionnelle sur la survie est d’autant plus important que la proximité entre les personnes est importante. Il semble aussi que cette gradation n’apparaît plus lorsque l’on s’intéresse à la confiance de compétence, celle-ci se trouvant finalement jouer un rôle positif à condition que la personne à qui l’on fait confiance soit effectivement compétente— la confiance s’avérant ici la condition préalable et nécessaire à l’expression de la compétence.

Sur un plan managérial, ce travail apporte un nouveau regard sur la question des risques spécifiques à la création d’entreprise avec un proche (conjoint ou membre de la famille) : alors que les conséquences dramatiques —d’un point de vue personnel— d’une défaillance de l’entreprise sont généralement mises en avant, notre travail montre le rôle positif que cette proximité peut faire émerger sur la survie de l’entreprise. Contrairement à l’intuition qui voudrait que ce soit l’absence de rémunération de ces mêmes proches qui favorise la survie entrepreneuriale, notre étude montre que c’est surtout la confiance accordée à ces derniers dans le cadre d’une activité commune qui est à l’origine d’une survie accrue de l’organisation. Dans la mesure où la confiance affectera inévitablement la nature des nombreuses interactions établies par un entrepreneur avec ses parties-prenantes, nos apports théoriques et opérationnels relatifs au rôle joué par la confiance interpersonnelle dans le développement et la survie d’initiatives entrepreneuriales permettent de fournir des lignes directrices aux entrepreneurs concernant la réussite économique de leurs entités.

Concrètement, et de façon purement opérationnelle, on peut penser que l’information relative au déploiement d’une initiative entrepreneuriale réalisée en collaboration avec un proche puisse davantage faire l’objet de centres d’intérêts exprimés, autour de la problématique de la confiance interpersonnelle et de la compétence, lors de sessions de formations aux entrepreneurs auprès des organismes concernés. De même, on peut ainsi penser que la relation de mentoring, généralement dispensée par un élément externe à l’entreprise de manière à aller dans le sens de l’idée reçue généralement véhiculée dans les incubateurs et autres formations académiques qu’il ne faut pas entreprendre avec un proche/ami pour éviter toute source de problèmes inutiles, puisse désormais être reconsidérée à l’aune des résultats formulés dans notre étude. Il sera notamment ainsi désormais suggéré aux dirigeants de telles unités entrepreneuriales de mieux comprendre pourquoi ils font confiance à certains acteurs de leurs réseaux sociaux et commerciaux, au moment d’envisager l’allocation de leurs ressources dans ces activités managériales.

Cette évolution vers la prise en compte du rôle positif pour la survie des TPE de la co-direction avec un proche pourrait amener à reconsidérer, pour les financeurs, les risques (amoindris) qu’ils prennent et donc à réviser leurs conditions de financement qui sont un des facteurs déterminants de la solidité d’une jeune entreprise. Sur un plan plus académique, notre travail conduit, du fait des résultats qui en sont issus, à accroitre la légitimité des family studies ainsi que de pousser à leur intégration avec les travaux sur l’entrepreneuriat en général.

Par le biais de ces différents éléments, ce travail apporte donc à la littérature un éclairage nouveau, mettant particulièrement en valeur les notions de proximité et de compétence, comme fondements des effets positifs de la confiance interpersonnelle. Comme constaté par Pollack et al. (2017), les modèles de confiance fondés sur la recherche appliquée au domaine de l’entrepreneuriat demeurent encore particulièrement rares, notamment du fait que la plupart des modèles de confiance ont été élaborés dans des contextes de relations existant à long terme, ce qui peut s’avérer compliqué à mesurer dans le cadre de nouveaux processus de création d’entreprises. Grâce à la mise en place de sa méthodologie permettant une étude longitudinale des organisations observées, nous pensons que notre étude contribue au champ de la littérature académique en répondant à cette limite et à l’appel de Li (2013) pour une meilleure « recherche sur la confiance (ayant) le potentiel d’enrichir la recherche en entrepreneuriat dans les domaines associés à la confiance interpersonnelle entre les membres d’une équipe fondatrice entrepreneuriale ainsi qu’entre entrepreneurs et investisseurs » (p.7). En cela, le présent article jette les bases de recherches futures en fournissant des mesures et des échelles qui peuvent être utilisées pour étudier le potentiel des effets directs, modérateurs ou médiateurs de la confiance interpersonnelle dans le contexte du développement et de la survie des entreprises.

À l’avenir, il pourrait s’enrichir par le biais de travaux ultérieurs permettant une meilleure considération des ressorts concrets du développement de la confiance interpersonnelle et de son management dans une entité entrepreneuriale, ainsi que par l’utilisation d’une base de données plus appropriée dans ce sens, menant notamment à une intégration des enjeux liés aux conflits relationnels spécifiques à chaque type d’associé et une mesure encore plus fine de la notion de compétence. Un développement complémentaire autour du construit de confiance en soi pourra par exemple également être réalisé, par exemple par le biais du mode de financement choisi par l’entrepreneur au moment du lancement de son activité entrepreneuriale, en accord avec le concept d’auto-efficacité entrepreneuriale également abordé dans la littérature (Boyd & Vozickis, 1994; Baum et al., 2001; McGee, et al. 2009).