Abstracts
Résumé
Quelle est la portée du droit à l’autonomie de la personne depuis l’arrêt Carter c. Canada ? L’arrêt a conclu que les dispositions du Code criminel qui prohibaient de façon absolue toute aide à mourir sont inconstitutionnelles en ce qu’elles portaient atteinte de façon injustifiée à l’article 7 de la Charte canadienne des droits et libertés. La présente contribution analyse le concept d’autonomie qui sous-tend les motifs de la Cour.
Dans un premier temps, les trois modèles théoriques d’« autonomie » reconnus en contexte biomédical et leurs fondements philosophiques seront décrits, à savoir l’autonomie idéale objective, l’autonomie idéale subjective et l’autonomie « non idéale » subjective (autrement qualifiée de « libre-choix »).
Dans un deuxième temps, nous démontrerons que le concept d’autonomie développé dans Carter possède une véritable portée normative substantive correspondant aux principes philosophiques identifiés. La définition du droit à la vie excluant un « droit à la mort » correspond à une norme universelle compatible avec un modèle d’autonomie idéale objective. Lorsque l’autonomie est saisie sous le prisme de l’atteinte au droit à la liberté, c’est alors le modèle de l’autonomie idéale subjective qui est retenu par les juges, lequel vise à permettre à un individu de se gouverner selon l’ensemble de ses valeurs et de ses convictions quant à la conduite générale de sa vie.
En définitive, nous concluons que le concept d’autonomie tel que consacré par l’arrêt Carter revêt une dimension normative dont le respect en pratique pourra — voire devra — justifier des exigences juridiques comme éthiques allant au-delà du simple « libre-choix ».
Abstract
What is the scope of the right to personal autonomy since Carter v. Canada? The case concluded that the provisions of the Criminal Code prohibiting assistance in dying are unconstitutional in that they unjustifiably infringe section 7 of the Canadian Charter of Rights and Freedoms. This article analyzes the concept of autonomy underpinning the Court’s reasons.
First, the three theoretical models of “autonomy” recognized in the biomedical context and their philosophical foundations will be described. These models are objective ideal autonomy, subjective ideal autonomy, and subjective “non-ideal” autonomy (also called the “free choice” model).
Second, we will demonstrate that the concept of autonomy developed in Carter carries a truly substantive normative scope corresponding to the philosophical principles identified above. The definition of the right to life as excluding a “right to die” corresponds to a universal norm compatible with a model of objective ideal autonomy. When autonomy is understood as an infringement to the right to freedom, the model of subjective ideal autonomy is that retained by judges. This model seeks to allow individuals to self-govern according to the values and convictions that guide the way they lead their life.
We conclude that respecting the normative dimension of the concept of autonomy laid down in Carter may justify—if not demand—legal and ethical requirements going beyond simple notions of “free choice”.