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Patched est un « récepteur à dépendance »Patched is a dependence receptor[Record]

  • Patrick Mehlen

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  • Patrick Mehlen
    Centre de Génétique Moléculaire et Cellulaire,
    Apoptose-Différenciation,
    Cnrs UMR 5534,
    Université Lyon 1,
    43, boulevard du 11 Novembre 1918,
    69622 Villeurbanne, France.
    mehlen@univ-lyon1.fr

Il est classiquement admis qu’un récepteur ne devient actif qu’après son interaction avec son ligand. Au cours des dernières années, cependant, un nouveau concept a peu à peu émergé suggérant que certains récepteurs dits « à dépendance » peuvent délivrer deux messages: en présence de ligand, ces récepteurs transduisent un signal positif classique, stimulant par exemple une voie de différenciation; en l’absence de leur ligand en revanche, ils induisent la mort de la cellule par apoptose [1] ((→) m/s 2001, n°6-7, p.744). Un article récemment paru dans la revue Science, émanant d’un travail collaboratif entre notre groupe et celui de N. Le Douarin, révèle que le récepteur de Sonic Hedgehog (Shh), Patched (Ptc), fonctionne selon ce schéma et que les deux actions de Ptc participent à la mise en place de la moelle épinière [2]. L’activité pro-apoptotique de ces récepteurs en l’absence de leur ligand laisse supposer: (1) que ces récepteurs pourraient posséder une activité suppresseur de tumeur en éliminant les cellules tumorales qui se développeraient en dehors des zones d’expression normale du ligand ; (2) qu’un excès de mort cellulaire devrait survenir chez des animaux dont on aurait éliminé expérimentalement le ligand physiologique de ces récepteurs. Or, le récepteur Ptc répond à ces deux caractéristiques, ce qui explique notre intérêt pour cette protéine. Ptc est une protéine à douze domaines transmembranaires qui est le récepteur spécifique de Shh, une molécule centrale lors du développement, en particulier parce qu’elle induit le programme de détermination-différenciation des neurones présents dans le tube neural, un tube s’étendant selon l’axe antéro-postérieur des vertébrés à l’origine de la moelle épinière et du cerveau. Pourtant Ptc pourrait aussi être un suppresseur de tumeur impliqué dans différents carcinomes. De plus, N. Le Douarin et al. avaient montré que, chez le poulet, le retrait expérimental de Shh conduisait à une mort massive des neurones formant le tube neural [3]. Ce dernier résultat avait alors été interprété par une communauté scientifique très dogmatique, comme la conséquence de l’absence d’un signal adéquat de différenciation conduisant à la mort de ces cellules. Cependant, notre étude montre que le récepteur Ptc induit spontanément la mort des cellules tant que son ligand Shh n’est pas présent. Cette induction d’apoptose semble passer par un clivage du dernier domaine intracellulaire de Ptc par les protéases centrales de l’apoptose que sont les caspases. Par ailleurs, grâce à l’utilisation d’une forme mutante de Ptc qui agit comme un dominant négatif de l’activité pro-apoptotique de Ptc, nous avons pu montrer que lors du développement du poulet, on peut bloquer la mort des cellules du tube neural induite par le retrait expérimental de Shh. De plus, l’action de ce dominant négatif ne se limite pas à bloquer la mort, mais conduit également à un développement partiel du tube neural. Cette observation est conceptuellement alors très intéressante car elle suggère que la mort induite « expérimentalement » par l’absence de Shh n’est pas la simple conséquence d’une absence de différenciation mais révèle en fait un mécanisme actif de modelage du tube neural par l’apoptose. On peut alors postuler que le développement du tube neural contrôlé par Shh passe à la fois par un mécanisme positif de détermination-différenciation des neurones, mais aussi par l’inhibition d’un mécanisme négatif qui conduirait à la mort des neurones se développant dans un contexte inapproprié.

Appendices