Faits et chiffresFeatures and Figures

Médecine des voyagesTravel medicine[Record]

  • Olivier Bouchaud

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  • Olivier Bouchaud
    Consultation de Médecine Tropicale et des Voyages,
    Hôpital Avicenne,
    Bobigny, France et
    Institut de Médecine et d’Épidémiologie Africaines,
    Faculté de Médecine Xavier Bichat,
    16, rue Henri Huchard,
    75870 Paris
    Cedex 18, France.
    olivier.bouchaud@avc.ap-hop-paris.fr

Médecine des voyages: What’s that? C’est en effet la réaction fréquente de son interlocuteur lorsque qu’un médecin des voyages décline son activité. La même remarque a dû être entendue lors de la création de la médecine du travail. Ces deux disciplines ont d’ailleurs des similitudes: elles sont d’existence récente (la médecine des voyages n’existe formellement que depuis une vingtaine d’années) et s’intéressent plus particulièrement, mais non exclusivement, au champ de la prévention. Pourquoi une médecine des voyages? Une façon indirecte de répondre est de donner quelques chiffres qui soulignent l’importance que revêt le voyage dans nos sociétés. Il suffit également de se pencher un peu sur notre histoire pour réaliser que le voyage fait partie de l’homme, qui aurait très bien pu s’appeler Homo vagans [1]. L’Organisation Mondiale du Tourisme estime qu’il y a actuellement 5 milliards de « voyages » par an dans le monde. Parmi ces « voyages », près de 700 millions intéressent actuellement des voyageurs internationaux. En 1950, on ne comptait que 25 millions de mouvements internationaux; en 2020, leur nombre atteindra 1,5 milliards, l’accroissement annuel étant de 4,3 %! [2]. Pour ce qui est de la France, pays le plus visité au monde (73 millions d’entrées en 2000, nombre supérieur à celui des habitants), 23 millions de nos concitoyens partent à l’étranger annuellement dont 3 à 4 millions dans des pays à risque (zones tropicales ou pays en développement). Ces voyages ont bien évidemment un but touristique, mais ce sont également des voyages d’affaires et des migrations, aussi bien dans le sens « sud-nord » que « nord-sud » (2 millions de Français vivent à l’étranger dont beaucoup dans des pays « tropicaux »). Sur le plan économique mondial, l’industrie du voyage est l’un des tous premiers pôles: elle engendre directement 11 % de l’emploi mondial et 500 millions d’emplois indirects pour 450 milliards de dollars US de recettes annuelles. En 2020, il est prévu que les voyageurs dépenseront quotidiennement 5 milliards de dollars US [2]. Sur le plan médical, l’existence d’une médecine des voyages se justifie largement. Là encore quelques chiffres peuvent situer le problème (Tableau I): la proportion des voyageurs se plaignant d’un problème de santé, quel qu’il soit, est de l’ordre de 60 % avec des écarts qui varient de 15 à 78 % selon les études, et la fameuse diarrhée du voyageur, la turista, touche près de un voyageur sur deux [3-6]. En revanche, certaines maladies typiquement tropicales, particulièrement redoutées par les voyageurs, sont relativement rares voire très rares: 2 à 3 % pour le paludisme, 3/100000 pour la fièvre thyphoïde et 3/1000000 pour le choléra. Des problèmes de santé beaucoup moins « exotiques » sont plus fréquents et souvent graves: 1/3 des rapatriements sanitaires sont justifiés par des accidents traumatiques, 1/3 par des accidents cardio-vasculaires et près de 1/10 par des décompensations psychiatriques [3, 7]. Cet aspect quantitatif global de l’évaluation des risques ne rend pas compte de la diversité des situations. Ainsi, pour chaque type de voyageur, on peut définir des risques et donc des besoins qui lui sont propres: La diversité des facteurs d’exposition, dont les variations dans l’évaluation de risques notés plus haut sont probablement le témoin, nécessite un gigantesque travail épidémiologique qui reste à entreprendre. Ces études sont difficiles à réaliser du fait du nombre important de voyageurs à inclure, nécessaire pour identifier et évaluer des risques dont la probabilité de survenue reste faible. Ainsi, dans deux études maintenant anciennes, mais qui servent encore de référence faute de données équivalentes plus récentes, Steffen et al. ont inclus respectivement 10000 et 20000 personnes [4, …

Appendices