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La dyskératose congénitale : qui est coupable ?Dyskeratosis congenita, who is guilty?[Record]

  • Christophe Dez,
  • Michèle Caizergues-Ferrer,
  • Yves Henry and
  • Anthony Henras

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  • Christophe Dez
    Laboratoire de Biologie Moléculaire Eucaryote du Cnrs,
    118, route de Narbonne,
    31062 Toulouse cedex 04,
    France.

  • Michèle Caizergues-Ferrer
    Laboratoire de Biologie Moléculaire Eucaryote du Cnrs,
    118, route de Narbonne,
    31062 Toulouse cedex 04,
    France.

  • Yves Henry
    Laboratoire de Biologie Moléculaire Eucaryote du Cnrs,
    118, route de Narbonne,
    31062 Toulouse cedex 04,
    France.

  • Anthony Henras
    Department of Chemistry and Biochemistry,
    UCLA Box 951569,
    607 Charles E. Young Drive East,
    Los Angeles CA 90095-1569,
    États-Unis.
    henras@chem.ucla.edu

La dyskératose congénitale (DC) est une maladie humaine héréditaire dont les symptômes apparaissent dès l’enfance et qui conduit au décès entre 16 et 50 ans. Elle se caractérise par des atteintes cutanées (troubles de la pigmentation de la peau), une dystrophie des ongles (réduction du volume des ongles ou leur absence), la présence d’ulcérations buccales précédant l’apparition de plaques de leucokératose (plaques blanchâtres) pouvant devenir cancéreuses. Les complications incluent une fibrose pulmonaire, des atteintes intestinales, une aplasie souvent à l’origine du décès, et l’apparition fréquente de cancers (peau, muqueuses, oesophage, lymphomes). La DC touche donc essentiellement des tissus à renouvellement rapide ((→) m/s 2000, n°4, p.562 et 2002, n°1, p. 39). Plusieurs formes de transmission de la maladie ont été décrites. La forme la plus courante, qui est aussi la plus sévère, est due à des mutations du chromosome X. Il existe également des formes à transmission autosomique, dominante ou récessive. Le gène du chromosome X qui est affecté code pour la protéine dyskérine [1]. L’orthologue de la dyskérine chez la levure de boulanger (S. cerevisiae), la protéine Cbf5p, a été caractérisé en tant que composant de petits complexes formés d’ARN et de protéines, dénommés «snRNP H/ACA» [2]. Chaque complexe contient un petit ARN dit de type «H/ACA», l’appellation désignant deux éléments de séquence conservée appelés boîtes H et ACA. Ce petit ARN est associé à quatre protéines, Cbf5, Gar1, Nhp2 et Nop10. Selon la nature de leur composant ARN, ces complexes jouent des rôles divers. La plupart catalysent la conversion d’uridine en pseudo-uridine au sein des ARN ribosomiques alors que d’autres sont requis pour certaines étapes de maturation du pré-ARN ribosomique conduisant à la libération des ARN ribosomiques matures. Ces données ont initialement conduit à la conclusion que la dyskératose est due à un défaut quantitatif et qualitatif de production des ribosomes. Cette hypothèse a toutefois rapidement été remise en cause essentiellement par les travaux de l’équipe de K. Collins à l’université de Californie à Berkeley. Cette équipe a tout d’abord mis en évidence que la télomérase humaine est en fait apparentée aux particules de type H/ACA [3]. La télomérase est un complexe d’ARN et de protéines qui assure la réplication des extrémités des chromosomes, les télomères, lors de la division des cellules ((→) m/s 2000, n°4, p.473 et p.481). Une partie de la région amont du composant ARN (dénommé hTR) de la télomérase est utilisée comme matrice pour la synthèse d’un brin d’ADNc ajouté aux extrémités télomériques. L’équipe de K. Collins a proposé que la partie aval de hTR adopte la structure canonique des petits ARN de type H/ACA. Cette équipe a en outre démontré que cette partie de hTR contient les boîtes H et ACA, dont l’intégrité est requise pour l’accumulation normale de hTR, et qu’elle est associée à la protéine dyskérine (Figure 1). La majorité des cellules somatiques saines sont dépourvues de télomérase active. En revanche, une forme active de la télomérase est synthétisée dans certaines cellules de tissus à renouvellement rapide, ces tissus mêmes qui sont atteints chez des patients souffrant de DC. Les données obtenues par K. Collins et al. les amenèrent donc à suggérer que la dyskératose est avant tout due à un déficit de télomérase active engendré par des modifications de la dyskérine, et non pas à un défaut de synthèse des ribosomes. De fait, l’équipe de K. Collins a ensuite montré que dans des cellules issues de patients souffrant de DC, la quantité à l’équilibre des petits ARN H/ACA testés et des ARN ribosomiques matures 18S et 28S n’est pas altérée. De même, la …

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