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Au coeur de l’Y humainInside the human Y chromosome[Record]

  • Simone Gilgenkrantz

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L’histoire du chromosome Y humain est pleine de frustrations. D’abord passé inaperçu (car trop petit) dans les premières mitoses observées, il contribua, après sa découverte, à fixer à 48 le nombre des chromosomes dans l’espèce humaine. En 1950, alors que ce chiffre erroné de 48 perdurait, la recherche, très attendue, d’une transmission père-fils sembla se concrétiser: le nombre des gènes liés à l’Y - dont le plus spectaculaire était sans nul doute celui de l’hypertrichose des oreilles - s’éleva à 17. Il fallut bientôt déchanter: le caryotype humain n’avait que 46 chromosomes et les 17gènes n’étaient qu’illusion ! La découverte des anomalies des gonosomes (syndrome de Klinefelter: 47,XXY, syndrome de Turner: 45,X) concéda au chromosome Y une fonction essentielle, celle de déterminer la différenciation masculine. Mais les études phylogénétiques soulignèrent la désertification progressive qu’il avait accomplie au cours des millénaires: ce chromosome égoïste s’était délesté de tous les gènes portés par le chromosome ancestral que l’X, en revanche, avait soigneusement conservés. L’Y ne pouvait donc plus s’apparier, échanger avec lui, sauf dans des parties communes situées aux extrémités. Comment en était-il arrivé là ? Le séquençage de la région non recombinante pouvait nous fournir de précieux renseignements sur son évolution et sa maintenance. Il vient d’être réalisé par l’équipe de David Page [1], mais là encore, le chromosome Y s’est révélé frustrant: ce travail qui, a priori, ne devait pas poser problème s’est avéré extrêmement laborieux en raison de l’accumulation de séquences répétées, en particulier de palindromes, très difficiles à assembler. En 2001, une carte physique à haute résolution de la région non recombinante (NRY) comprenant 95% du chromosome Y avait été publiée [2]. Le séquençage de cette région, appelée désormais MSY (male specific) en raison de sa constitution, a été réalisé à partir de 220 BAC (bacterial artificial chromosome) provenant d’un seul et même individu, afin de mettre en évidence les variations de séquences mineures survenant au sein de copies dupliquées sur un même chromosome. Cette séquence d’environ 23 Mb constitue donc une référence. Elle correspond à la totalité de la région MSY (à l’exception de deux segments, d’environ 50 kb d’après l’hybridation in situ, qui n’ont pas été explorés), et comprend 8 Mb sur le bras court et 14,5 Mb sur le bras long. Sa composition est riche en enseignements sur la constitution de l’Y humain moderne et de ses gènes. Le chromosome Y est constitué de la façon suivante (Figure 1): Les segments jonctionnels de toutes les régions hétérochromatiques ont été analysés. Ils comportent six variétés de séquences répétées. Le séquençage de la région euchromatique MSY a permis de trouver 156 unités transcriptionnelles. Vingt-cinq d’entre elles semblent appartenir à 24 familles spécifiques de la région MSY. Les gènes codant pour des protéines se divisent en deux groupes: ceux qui sont ubiquitaires et ceux dont l’expression est essentiellement ou exclusivement testiculaire. Il est intéressant de voir comment ils sont répartis dans l’euchromatine. Il en existe trois catégories. La connaissance de cette structure MSY suscite de nombreuses réflexions. Tout d’abord, la méthodologie utilisée pour organiser les séquences palindromiques pourra servir de guide dans l’analyse d’autres séquences répétées du génome. Car la découverte de gènes spécifiques du testicule enchâssés dans les palindromes démontre l’importance de l’analyse de régions analogues dans les autosomes. Puisque cette structure MSY, qui mérite bien son nom, a sélectionné de tels gènes, on peut se demander s’ils n’ont pas protégé et développé la fertilité masculine. Pour la survie de l’Y, ne peut-on imaginer un mécanisme alternatif à l’absence d’échanges X-Y? Dans les structures palindromiques, des recombinaisons entre les bras peuvent se …

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