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Comprendre les neurones glutamatergiques chez les mammifères : un ménage à troisUnderstanding glutamatergic neurons in mammalians: « un ménage à trois »[Record]

  • Étienne Herzog

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  • Étienne Herzog
    Department of Molecular Neurobiology,
    Max-Planck-Institut für experimentele Medizin,
    Hermann-Rein-Strasse 3,
    37075 Göttingen, Allemagne.
    herzog@em.mpg.de

Les neurones communiquent entre eux en libérant dans la fente synaptique des neurotransmetteurs préalablement accumulés dans les vésicules synaptiques de leurs terminaisons. Ces transmetteurs chimiques vont alors agir sur leurs récepteurs situés sur les membranes pré- et postsynaptiques. Selon la nature des récepteurs activés, le signal transmis peut être une excitation (dépolarisation), une inhibition (hyperpolarisation) ou une modulation (cascade de seconds messagers) du neurone cible. En 1952, P. Fatt et B. Katz ont montré que la libération de neurotransmetteurs se fait par « paquets », ou quantums [1], chaque quantum représentant le contenu d’une vésicule synaptique. Pour réaliser la libération quantique, la terminaison met en jeu un système de recyclage, d’une part, des molécules de neurotransmetteurs [2] et, d’autre part, de la membrane vésiculaire [3]. La coordination spatiale et temporelle de cette machinerie est cruciale pour assurer un bon rapport signal/bruit, en particulier lors de stimulations répétées. Acide aminé endogène, le glutamate est un métabolite ubiquitaire du vivant. Dans le cerveau, c’est également le principal neurotransmetteur excitateur utilisé par au moins 30 % des neurones. La neurotransmission par le glutamate (ou glutamatergique) est ainsi la force motrice dans tous les circuits fonctionnels du système nerveux central (régulations autonomes, boucles sensori-motrices, fonctions cognitives). Par conséquent, nombre de maladies neurologiques et psychiatriques font intervenir la transmission glutamatergique. L’absence de marqueurs protéiques spécifiques a cependant longtemps freiné l’étude des neurones glutamatergiques [4]. Récemment, trois sous-types de transporteurs vésiculaires du glutamate (VGLUT1, 2 et 3), de séquences très conservées (plus de 70 % d’identité), ont été isolés et caractérisés (Figure 1) [5-7]. En remplissant les vésicules synaptiques, ces protéines réalisent une fonction clé pour la sécrétion de glutamate. Elles sont également les premiers marqueurs protéiques spécifiques des cellules glutamatergiques [5-10]. Les VGLUT sont enchassés dans la membrane des vésicules synaptiques par dix domaines transmembranaires (Figure 1B). Les trois VGLUT ont des propriétés biophysiques et pharmacologiques de transport vésiculaire extrêmement proches [5-10]. De plus, des expériences de transfection de cellules ou de neurones non glutamatergiques ont permis d’établir sans ambiguïté que l’expression de VGLUT1 ou de VGLUT2 suffisait pour induire une libération de glutamate [5, 7, 8]. Bien que probable, l’implication directe de VGLUT3 dans la libération de glutamate reste encore à démontrer [7, 10]. En revanche, leur répartition dans le cerveau est très complémentaire (Figure 1C). VGLUT1 est exprimé principalement dans les régions les plus corticales du cerveau, qui sont le siège des fonctions cognitives et d’apprentissage moteur, alors que VGLUT2 est localisé dans les neurones glutamatergiques sous-corticaux, qui sont principalement impliqués dans les circuits sensorimoteurs et de régulation autonome de l’organisme. Chez l’adulte, VGLUT1 et VGLUT2 délimitent donc deux territoires qui couvrent l’ensemble des neurones glutamatergiques historiquements décrits [4]. Au cours du développement, VGLUT2 est présent très précocement et couvre en partie le territoire de VGLUT1, alors que ce dernier ne l’occupe qu’au bout de trois semaines de vie postnatale [11]. VGLUT3 (que nous avons identifié à l’Inserm U. 513) présente une expression restreinte à quelques sous-populations de neurones classiquement considérés comme cholinergiques, sérotonergiques ou même GABAergiques. VGLUT3 semble donc définir un système glutamatergique de type modulateur tout à fait inattendu [10]. Si les trois VGLUT sont localisés dans des populations distinctes de neurones, leurs propriétés de remplissage des vésicules synaptiques sont peu différentes et les raisons fonctionnelles de cette diversité restent à déterminer [7]. Le gène codant pour VGLUT1 a récemment été invalidé (VGLUT1-/-) dans les laboratoires de R. Edwards (UCSF, San Fransisco, USA) et de N. Brose (Max-Planck-Institut für Experimentele Medizin, Göttingen, Allemagne) [12, 13]. Chez les animaux VGLUT1-/-, nous avons montré …

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