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Regards sur les chiroptèresGlance on chiropters[Record]

  • Dominique Labie and
  • Simone Gilgenkrantz

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En Occident, depuis des siècles, les chauves-souris ont hanté l’imaginaire des hommes. Perçues comme des bêtes diaboliques au Moyen Âge, elles entraient dans la pharmacopée des sorcières, on les clouait sur les portes des granges et, pour sortir la nuit, les filles se couvraient la tête afin qu’elles ne s’incrustent pas dans leurs cheveux. Avec les coquecigrues et les loups garous, ces étranges « oiseaux » nocturnes devenaient des vampires. Les légendes de Transylvanie se sont répandues en Europe puis dans le monde. On en trouve la trace encore aujourd’hui dans des romans et des films à succès. Et même la malédiction de Toutankhamon, surgie après la mort de plusieurs archéologues ayant pénétré dans les tombes des pharaons, fut attribuée à leur pouvoir maléfique. Dans le Nouveau Monde aussi, elles étaient redoutées et adorées. On trouve chez les Mayas des représentations de Camazotz, ce seigneur des chauves-souris, maître de la pénombre et assoiffé de sang. Mais, dans ce continent, les hommes ont des raisons de les craindre, car les chiroptères d’Amérique comptent trois espèces hématophages : du Mexique au Chili et au Nord de l’Argentine, elles s’attaquent aux petits animaux, et même au bétail. Grâce à leurs incisives acérées, elles leur infligent des morsures par où s’écoule le sang dont elles se nourrissent en le léchant (et non pas en le suçant) d’autant mieux que leur salive a des propriétés anticoagulantes. Ce faisant, elles peuvent transmettre la rage aux troupeaux. C’est pourquoi les paysans cherchent à les détruire en brûlant et dynamitant les grottes où se trouvent leurs gîtes. En Europe, la modification des espaces ruraux, l’utilisation des insecticides et des pesticides depuis des décennies (destruction des insectes, imprégnation des charpentes) provoquent des empoisonnements directs ou indirects. Leur nombre se raréfie. C’est pourquoi elles sont classées comme « vulnérables » et désormais protégées par des lois (statut de protection de la faune, voirhttp://www.onf.fr/foret/faune/chauves-souris/bio_1.htm). Après les rongeurs, elles forment l’ordre le plus important des mammifères. Il se divise en deux sous-ordres : Avec 916 espèces connues, elles représentent 20 % des mammifères vivant aujourd’hui [1]. Leur régime alimentaire est diversifié : rarement hématophages, comme nous l’avons vu, elles sont surtout insectivores et frugivores. Quelques rares espèces, de même que les papillons, les abeilles ou les colibris, se nourrissent de nectar qu’elles aspirent grâce à leur langue étroite et effilée. Comme chez tous les mammifères, les femelles allaitent leurs petits. Leurs capacités reproductrices sont faibles (pour la plupart des espèces en Europe, elles n’ont guère plus d’un petit par an). En revanche, elles ont une belle longévité : dans un clocher du sud de la France, un Petit murin (Myotis blythi) a été retrouvé 33 ans après avoir été bagué. Peut-être l’entrée en léthargie des chauves-souris dans la journée et plus longtemps parfois en hiver économise-t-elle leur capital de vie. Hétérothermes, elles ont le pouvoir d’abaisser leur température, ce qui leur permet de conserver leurs réserves et de diminuer leur consommation d’oxygène de 25 % à 30 %. Mais surtout, elles sont, de tous les mammifères, les seules à être capables de voler. De ce fait, elles ont une morphologie très particulière. Le premier, sans doute, à les regarder avec curiosité et envie, fut Léonard de Vinci qui caressait pour l’homme le rêve de s’élever dans les airs et qui s’inspira de leur aile pour créer ses premiers modèles de machines volantes. Une membrane, le patagium, relie les phalanges écartées, permettant à l’animal de planer, mais aussi de s’envelopper dans ses ailes (famille des Rhinolopes). En l’absence de queue, la chauve-souris doit battre des ailes en permanence, mais …

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