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Des senseurs pour contrôler le style de vie bactérienLe choix entre infection chronique ou aiguëTwo sensors to control bacterial life styleThe choice between chronic or acute infection[Record]

  • Alain Filloux and
  • Isabelle Ventre

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  • Alain Filloux
    CNRS-IBSM-UPR9027,
    Laboratoire d'Ingénierie des Systèmes Macromoléculaires,
    31, chemin Joseph Aiguier,
    13402 Marseille Cedex 20,
    France.
    filloux@ibsm.cnrs-mrs.fr

  • Isabelle Ventre
    CNRS-IBSM-UPR9027,
    Laboratoire d'Ingénierie des Systèmes Macromoléculaires,
    31, chemin Joseph Aiguier,
    13402 Marseille Cedex 20,
    France.

Les bactéries sont largement répandues dans des niches environnementales ou infectieuses. Elles s'y développent essentiellement selon deux modes de vie que l'on appelle planctonique ou biofilm. Alors qu'en mode planctonique elles se déplacent librement sous forme de bactérie isolée, en mode biofilm elles se rassemblent pour former une communauté microbienne englobée dans une matrice d'exopolysaccharides et adhérente à une surface [1]. Parmi les raisons qui poussent les scientifiques à porter un intérêt croissant aux mécanismes moléculaires qui sous-tendent la formation de ces biofilms, il faut mentionner le rôle de ces populations bactériennes dans le développement des infections chroniques chez l'homme [2]. Si un même organisme est capable dans un contexte différent de prendre une décision vis-à-vis du style de vie qu'il doit adopter, c'est-a-dire croissance en biofilm versus croissance planctonique ou infection chronique versus infection aiguë, on doit de se demander ce qui dirige ce choix. Le processus pourrait être contrôlé par un réseau de régulation qui coordonne l'expression dans le temps et dans l'espace d'un ensemble de déterminants associés à la mobilité, l'adhérence ou la production d'exopolysaccharides, tous impliqués dans la formation du biofilm, ou bien, dans le cadre d'infections aiguës, de déterminants qui sont essentiels aux mécanismes associés à la cytotoxicité comme le système de sécrétion de type III (T3SS) [4]. Les bactéries possèdent des systèmes de détection qui permettent de percevoir les variations de conditions dans leur environnement afin de pouvoir en tenir compte pour changer l'expression de leur génome, et permettre ainsi l'induction ou la répression des gènes requis pour la meilleure adaptation au nouvel environnement détecté. Un système de régulation clé dans la mise en place de ce processus est le système de régulation à 2 composants [5]. Le senseur est une histidine kinase, qui possède un domaine de détection variable et spécifique pour un signal, et un domaine qui s'autophosphoryle suite à la détection du signal correspondant (Figure 1). L'information est ensuite transmise sur un régulateur de réponse par transfert du groupement phosphate depuis le senseur vers le domaine receveur du régulateur de réponse. La majorité des régulateurs de réponse ainsi activés vont se lier à des régions d'ADN pour contrôler l'expression d'un panel de gènes appropriés. Nos travaux ont récemment mis en évidence l'importance d'un senseur, LadS (lost adherencesensor) dans le contrôle de l'expression de gènes, comme les gènes pel, qui sont impliqués dans la production d'exopolysaccharides et le développement du biofilm [6, 7]. Une souche de P. aeruginosa dont le gène ladS a été muté, se voit très sévèrement affectée dans sa capacité à former un biofilm (Figure 2A). De façon encore plus remarquable, ce même mutant ladS a un niveau de cytotoxicité augmenté (Figure 2B), corroboré par une forte augmentation de l'expression des gènes qui sont impliqués dans la mise en place de la machinerie de sécrétion de type III et ceux codant les toxines injectées dans la cellule hôte par le T3SS [6]. LadS peut donc être présenté ici comme un switch moléculaire qui dirige la transition entre biofilm et cytotoxicité, et donc infection chronique versus infection aiguë. De façon très remarquable, une étude publiée un peu plus tôt par le groupe du professeur Stephen Lory (Harvard Medical School, Boston, États-Unis) démontrait le rôle d'un autre senseur, RetS, dont l'influence sur les gènes pel et les gènes du T3SS est strictement opposée à celle de LadS [8]. Ainsi un mutant affecté dans le gène retS, voit sa capacité à former des biofilms augmentée (Figure 2A), à tel point que la souche est difficilement cultivable sous sa forme planctonique avec une forte tendance …

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