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Cet ouvrage traite de la question de l’hébergement et du logement en santé mentale, plus précisément autour du principe du rétablissement. Il constitue une version écrite des différentes conférences qui ont eu lieu dans le cadre d’un colloque du 76e Congrès de l’Association francophone pour le savoir-Acfas en mai 2008, à Québec, sur le thème suivant : « Hébergement, logement et rétablissement en santé mentale : pourquoi et comment faire évoluer les pratiques? ». En plus de rendre compte des pratiques en oeuvre au Québec, l’ouvrage propose un aperçu de ce qui est mis de l’avant dans d’autres pays occidentaux. Le modèle du rétablissement se précise et se complexifie grâce aux différents apports critiques des conférenciers. Au coeur des différentes analyses, la question du logement en santé mentale se révèle être un enjeu crucial et complexe qui doit être appréhendé sous plusieurs angles pour bien comprendre sa globalité. Comme le mentionne le Dr André Delorme dans son allocution, le colloque « devrait permettre aux partenaires en santé mentale d’échanger savoirs et expériences afin de s’influencer mutuellement au plan des bonnes et meilleures pratiques axées sur le rétablissement » (Delorme, 12). Justement, à la fin de chaque conférence, un temps a été accordé pour les questions et les discussions, ce qui enrichit encore davantage le contenu de l’ouvrage. Par ailleurs, pour bien faire progresser les réflexions et les discussions, le colloque (et donc le volume) a été divisé en deux parties.

Dans la première partie, la notion du rétablissement est introduite et expliquée comme nouveau cadre d’orientation des pratiques d’hébergement en santé mentale. En premier lieu, Thomas A. Kirk et Paul J. Di Leo, du Connecticut, présentent les résultats de leur expérience de logements axés sur le rétablissement, en soulignant que le rétablissement doit passer d’abord et avant tout par l’individu. En ce sens, le logement est perçu comme le point de départ du rétablissement et il doit permettre à l’individu de développer son empowerment. À plus grande échelle, ils expliquent que le rétablissement implique de travailler différemment, surtout par rapport à la gestion des budgets. Il importe avant toute chose d’orienter les fonds vers l’achat et la construction de logements. De son côté, John Trainor, chercheur et professeur à l’Université de Toronto, dresse un portrait concis et pertinent de l’évolution des pratiques d’hébergement en santé mentale au Canada, afin de mieux situer la notion présente du rétablissement. Il illustre ensuite en quoi le rétablissement et les pratiques d’hébergement y étant associées permettent d’offrir un continuum résidentiel mieux adapté aux besoins et aux aspirations des individus. Auparavant axées sur les services médicaux, les pratiques sont maintenant orientées en fonction de l’individu et de ses besoins.

À titre de transition entre la première et la deuxième partie, une table ronde a été organisée pour permettre à trois personnes en rétablissement de s’exprimer sur leur vécu et leur réalité. Ces témoignages permettent de mieux situer les pratiques concrètes axées sur le rétablissement, tout en alimentant la discussion entre les participants du colloque.

La deuxième partie ouvre sur la santé mentale dans sa globalité, en introduisant d’autres enjeux. Tout d’abord, Shulamit Ramon, professeure et chercheuse, explique les dynamiques de discrimination et d’exclusion vécues par les individus ayant un problème de santé mentale au Royaume-Uni. Elle précise comment les pratiques du rétablissement permettent à ces individus d’utiliser leur potentiel dans la réalisation de différentes activités valorisantes. Ensuite, les textes de Geoffrey Nelson et de Jean-François Pelletier viennent situer le rétablissement dans une perspective plus large par une analyse globale de la société. Le texte de Nelson souligne l’importance du bien-être subjectif des individus en insistant sur les notions de choix, de qualité de vie et d’environnement. De son côté, le texte de Pelletier propose que « la santé mentale soit véritablement arrimée à la promotion de la santé avec la notion même de rétablissement » (Pelletier, 106). Aussi, le rétablissement y est décrit comme « un processus dynamique, ininterrompu, plutôt que le résultat d’une intervention typiquement professionnelle » (Pelletier, 113), qui permet à l’individu d’être l’acteur de son cheminement. La deuxième partie de l’ouvrage se poursuit avec la présentation du cadre de référence pour le soutien communautaire en logement social par Claude Roy et Odette Perron. Les auteurs expliquent quels sont les enjeux et les dynamiques autour de la collaboration des divers acteurs engagés dans la gestion des différentes formes d’habitations, notamment entre les acteurs du milieu institutionnel et du milieu communautaire.

À titre de conclusion, une dernière table ronde a été effectuée pour permettre aux différents acteurs du colloque de se prononcer dans un mot de la fin collectif. Si le modèle du rétablissement a permis de mieux centrer l’attention sur les besoins réels des individus, les conférenciers précisent qu’il reste encore beaucoup de travail à faire. Lutter contre la stigmatisation, travailler avec les communautés, développer un réseau de qualité, remettre en question le modèle traditionnel de réadaptation et changer la loi sur l’aide sociale sont autant de perspectives qui ont été avancées lors de cette table ronde.