Éditorial

Travailler le social : pour une redéfinition[Record]

  • Jean Carette

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  • Jean Carette
    École de travail social
    Université du Québec à Montréal

NDLR

Le texte de Jean Carette que nous publions comme éditorial a été rédigé au printemps 1999, à l'occasion de la tenue d'une journée d'étude que le Département de travail social de l'UQAM avait organisée pour mettre à jour sa définition de l'objet d'étude du département, soit le travail social. L'ancienne définition avait été élaborée à la fin des années 1970 ; 20 ans plus tard, les membres de l'assemblée départementale trouvaient qu'elle avait besoin d'un certain rajeunissement. La version que nous publions a reçu un accueil chaleureux de l'assemblé départementale. À la direction de la revue NPS, nous considérons que ce texte de notre collègue Carette mérite d'être diffusé de façon plus large ; d'où notre décision de le publier comme éditorial dans ce numéro qui a pour dossier le « nouveau » travail social.

YvesVaillancourt

Directeur

C'est à travers cette triple action qu'il peut construire son identité, en contrôlant ou en transformant la situation qu'il vit, en devenant le sujet de son histoire. S'il n'y parvient pas, il sera plus ou moins marginalisé ou exclu, plus ou moins exploité sans retour et plus ou moins dépendant-dominé. C'est d'abord pour et avec ce dernier, seul à seul ou en s'appuyant sur ses divers groupes d'appartenance, que le travailleur social intervient, comme un tiers facilitateur et médiateur. Dans son analyse des situations comme dans ses interventions, le travailleur social considère les conduites de l'individu, ses choix et ses impasses, ses atouts ou ses difficultés, ses attitudes et ses comportements, comme des conséquences, des effets, positifs ou négatifs, nouveaux ou cumulatifs, produits ou reproduits tout au long du cycle de sa vie, de ses positions diverses dans les rapports sociaux de classes, de sexes, de cultures, de générations. C'est en travaillant le social – et non en le « servant » –, en se situant avec la personne qu'il rencontre dans les rapports sociaux, qu'il visera à rétablir et développer la capacité d'action des individus, groupes et collectivités sur : Le travail social a pour objet d'étude les pratiques d'intervention sociale réfléchies et mises en oeuvre pour outiller les acteurs, individus, groupes ou collectivités, en vue de comprendre, gérer et si possible résoudre (améliorer ? atténuer ? contrôler ?) les problèmes sociaux (et améliorer les conditions de vie ?) qu'ils vivent et subissent. Réflexion et mise en oeuvre s'activent, se nourrissent et s'appuient mutuellement dans un même mouvement dynamique et dialectique. Le travailleur social est un professionnel dont la fonction consiste à intervenir auprès des individus, familles, groupes et collectivités, et avec eux, dans et sur les relations sociales et les rapports sociaux dans lesquels ils sont engagés. Il n'est pas un psychologue, même s'il emprunte à la psychologie des outils d'écoute, d'analyse et d'intervention. Il n'est pas un juriste, même s'il travaille à la défense et à la promotion des droits individuels et collectifs. Il n'est pas un moraliste, même s'il fait siennes les valeurs d'égalité, de justice et de solidarité. Il n'est pas un animateur culturel, même s'il utilise des techniques d'animation pour mobiliser des individus et des groupes. Il n'est pas un agitateur politique, même s'il travaille pour qu'il y ait plus de démocratie réelle. Il n'est pas un sociologue, même s'il se sert des méthodes de lecture sociologique pour faire et renforcer son analyse des problèmes sociaux. Il n'est pas un éducateur, même s'il met en oeuvre des démarches pédagogiques pour informer et former des acteurs sociaux. Il n'est pas un simple technicien de l'aide, même s'il utilise divers outils dans son intervention sociale. Le travailleur social doit travailler avec l'ensemble des individus et collectivités dans le cadre de ses mandats, mais il donne priorité aux personnes ou groupes exposés à la marginalité ou à l'exclusion, à la pauvreté et aux injustices, à la dépendance et à la subordination ainsi qu'aux minorités. Il s'appuie sur les acteurs sociaux, individus ou groupes solidaires des préoccupations et revendications de ces individus et groupes prioritaires. Il privilégie, suscite et renforce les alliances avec les groupes populaires et communautaires, avec les syndicats et groupes de défense des droits, avec les individus et les collectifs innovateurs et porteurs d'alternatives sociales. Travaillant le social, il ne peut ignorer les acteurs qui cherchent à concilier les exigences du social et de l'économique et met sa formation et son expérience professionnelle à leur disposition, en particulier dans le champ de l'économie sociale ou solidaire. Dans une période de remise en cause et de …