Éditorial

Projet de loi contre la pauvreté et l’exclusion socialeNe pas bouder son plaisir ![Record]

  • Gérald Larose

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  • Gérald Larose
    École de travail social
    Université du Québec à Montréal

Faut-il, lorsqu’un désir est comblé, bouder son plaisir ? Un vieux fond judéo-chrétien nous y amène peut-être encore. Après trois ans d’animation pédagogique, de mobilisation citoyenne et de constance revendicative de la part du Collectif pour une loi sur l’élimination de la pauvreté, le gouvernement du Québec présentait non seulement un projet de loi, qui porte le numéro 112 (Gouvernement du Québec, 2002a), mais aussi un énoncé de politique, intitulé Stratégie nationale de lutte contre la pauvreté et l’exclusion sociale (Gouvernement du Québec, 2002b). À chaud, la réaction fut mitigée. À froid, il faut espérer qu’elle se réchauffe. Le 12 juin 2002 devra peut-être être marqué d’une pierre blanche. Les pièces rendues publiques ce jour-là sont d’une importance majeure pour qui, en matière de développement social, promeut une approche globale, intégrée, structurante et s’inscrivant dans la durée. Plus encore, jamais nous n’avons été mis dans une situation où nous pouvons revisiter l’ensemble des programmes gouvernementaux à la lumière d’objectifs de société, eux-mêmes soumis au débat public. Nous avons milité pour créer cette occasion. Maintenant qu’elle nous est donnée, nous ne nous priverons point de la saisir et d’en tirer le meilleur. Tout est sur la table. Le débat est ouvert. Les audiences publiques prévues à cet effet à l’automne 2002 sont à suivre. C’est en 1997 que s’est mise à circuler l’idée qu’on se donne au Québec une loi-cadre sur l’élimination de la pauvreté. Plus tard, à l’hiver 1998, le Collectif pour une loi sur l’élimination de la pauvreté a été fondé. Cette organisation regroupe maintenant tout organisme qui encourage les projets progressistes de société et qui en élabore. Plus largement encore et pour une meilleure assise démocratique, le Collectif a mobilisé plus de 1 500 groupes en provenance de tous les secteurs de la société : action communautaire, économie sociale, mouvement des femmes, mouvement syndical, santé, services sociaux, développement local, municipalités, etc. Pour établir un lien avec eux, le Collectif a regroupé ces derniers en collectifs régionaux. Voilà comment l’idée d’une loi sur l’élimination de la pauvreté s’est structurée ! Et pour cause ! L’idée ne va pas de soi. En 1998-1999, le Collectif lançait une pétition en même temps qu’une trousse d’animation sur une première version d’un projet de loi pas « comme les autres ». L’approche pédagogique visait à susciter le débat et à recueillir de toute part des commentaires et des suggestions. Il y eut 20 000 commentaires et 5 000 suggestions. De quoi produire une deuxième version qui fut, elle, soumise à un véritable débat dans plus de 200 « sessions parlementaires populaires ». À partir du résultat de ces assemblées délibérantes, le Collectif rédigea une troisième et dernière version du projet de loi et le fit ratifier par une assemblée de plus de 2000 personnes le 13 mai 2000. Après s’est engagée la démarche pour que la pétition et le contenu largement débattu du projet de loi pénètrent les lieux officiels de la décision publique. L’approche en fut une non-partisane. Plusieurs lettres furent écrites et plusieurs types de sessions de travail se tinrent. Et tous les partis politiques furent rencontrés. Le 22 novembre 2000, 3 députés représentant chacun leur formation politique déposèrent une pétition de 215 307 signatures. Les signataires demandaient aux parlementaires de faire le travail législatif nécessaire pour qu’existe au Québec une loi-cadre sur l’élimination de la pauvreté. Alors, une résolution fut adoptée par l’Assemblée nationale, elle se lit ainsi : « Que l’Assemblée nationale demande au gouvernement du Québec de procéder à l’adoption d’une stratégie de lutte contre la pauvreté en prenant en considération certains principes de la proposition mise de …

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