Le dossier : L’action syndicale à la croisée des chemins

L’action syndicale aujourd’hui[Record]

  • René Charest and
  • Jacques Rhéaume

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  • René Charest
    Conseil central du Montréal Métropolitain (CSN)

  • Jacques Rhéaume
    Département de communication sociale et publique, Université du Québec à Montréal

Lorsque nous avons pris la décision de présenter un dossier de Nouvelles pratiques sociales (NPS) sur les pratiques syndicales, nous vivions, alors au Québec, dans un contexte politique particulier en ce qui concerne la présence du mouvement syndical québécois. Le gouvernement libéral de Jean Charest en était à son premier mandat et son objectif clairement avoué était de s’attaquer au prétendu monopole syndical sur les réalités politiques québécoises. Dans la mesure où NPS s’intéresse particulièrement aux enjeux démocratiques au Québec et ailleurs, l’avenir du mouvement syndical s’avérait une question pertinente à poser. Le dossier que nous présentons est une contribution modeste, mais tout de même pertinente pour examiner les perspectives d’avenir du mouvement syndical en considérant les enjeux autour de la démocratie. Il va de soi que les perspectives démocratiques déterminantes pour l’avenir du mouvement syndical ne peuvent s’observer uniquement à l’intérieur du mouvement syndical. Plusieurs acteurs influent sur les perspectives du mouvement syndical : 1) l’État ; 2) les employeurs privés ; 3) les mouvements sociaux ; 4) la société civile. Et c’est dans ce rapport conflictuel et coopératif avec ces différents acteurs que le mouvement syndical pourra se renouveler sur des bases démocratiques. Mais, tout d’abord, il faut rappeler que le syndicalisme, à partir de ses origines, à la fin du xixe siècle, et jusqu’à aujourd’hui, a évolué sous le double signe de la démocratie, à la fois comme mode spécifique d’organisation interne et comme type d’institution publique. En effet, la création d’un syndicat relève de l’associatif et du communautaire. C’est un regroupement volontaire de travailleurs et de travailleuses qui veulent défendre leurs droits au travail et promouvoir les conditions d’exercice d’un travail plus sain et satisfaisant. Même si les modalités structurelles d’une organisation syndicale peuvent varier considérablement, on y retrouve en général l’assemblée souveraine des membres, l’élection des dirigeants et des officiers syndicaux, l’autofinancement au moyen des cotisations, en tout ou en partie, l’autonomie des mandats et de la programmation de l’action. C’est en principe une organisation sans but lucratif. Ce sont bien là des caractéristiques de base d’une organisation communautaire ou associative. Toutefois, les syndicats ne sont pas comme tels des « organismes communautaires » et se retrouvent plutôt du côté des associations professionnelles, au sens le plus large du terme, qui visent à promouvoir et à défendre les intérêts professionnels des membres. De plus, les syndicats sont définis dans un cadre législatif propre, incluant les lois du travail, un « code du travail » où sont précisément reconnus le droit d’association et toute une série de mesures relatives aux droits et devoirs d’établir avec les employeurs des contrats collectifs, locaux, sectoriels, nationaux touchant les conditions de travail. Cette institutionnalisation de l’action syndicale définit un cadre plus large où le législateur intervient directement, ce qui soutient et contraint tout à la fois les organisations syndicales. Un syndicat constitue la « partie » représentative des travailleurs et travailleuses face à une autre « partie », celle de la direction d’une entreprise ou d’une administration, publique ou privée, et cela, à différents niveaux : locaux, nationaux, internationaux. Les membres d’un syndicat sont aussi des employés d’une entreprise et l’existence même du syndicat dépend de ce statut d’employé. C’est là une distinction radicale par rapport au statut de membre d’une organisation communautaire « autonome » ou celui d’autres associations professionnelles libérales qui ne sont pas définis dans un rapport de subordonné ou de contractuel, d’employé face à un employeur. Ce schématique rappel du cadre sociojuridique du syndicalisme ne rend pas justice à une autre lecture, plus sociologique, que l’on pourrait faire de l’histoire de l’action syndicale. Ce mouvement …

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