L’utile mise au point proposée par Yann Le Bossé articule la catégorie d’empowerment à certaines de ses conditions de fonctionnement théorique. Il s’agit, en effet, de situer aussi précisément que possible une catégorie qui, de plus en plus usuelle et très généralement appréciée, reste cependant sous-entendue, maniée comme une évidence allant de soi. Ce travail d’éclaircissement est la dimension qui m’a le plus intéressé dans cet article. En esquissant, à mon tour, quelques ponctuations critiques, je voudrais contribuer à un débat aussi ouvert que possible, auquel Y. Le Bossé nous invite. Ambition qui ne va guère de soi, au demeurant, comparativement à l’excès de consensus et d’évitements divers dont souffre souvent le travail de recherche, cela privant les intervenants sociaux de ressources stratégiques dans la conduite de leur pratique. Partons d’un constat : si la catégorie d’empowerment connaît une diffusion certaine dans de multiples domaines, chaque fois, elle revêt un caractère positif, constructif, stimulant, au point que son absence complète ou partielle est supposée réduire d’autant les marges de manoeuvre des individus et des groupes confrontés à des situations difficiles… Il ne semble pas exister d’empowerment négatif. Ou, ce qui revient au même, la seule négativité est celle d’un empowerment insuffisant, ou carrément absent. Nous devrons interroger, plus loin, cette indéfectible excellence. Pour ce faire, examinons de plus près les champs d’investissement de cette catégorie. Il ne suffit pas, en effet, de constater sa forte diffusion dans différents champs, encore faut-il souligner la particularité d’un de ces champs : celui des pratiques sociales. Si ce dernier est un exemple parmi d’autres, un cas, il représente en même temps une occurrence privilégiée, paradigmatique. Domaine par antonomase, en fait. C’est au sein des pratiques sociales ou en lien avec elles que la catégorie d’empowerment déploie l’ensemble de ses attributs ; est là son lieu propre. Même la diversité d’acceptions de cette catégorie, répertoriée par Yann Le Bossé, prend bien racine, vise ou sous-entend le champ des pratiques sociales. C’est pourquoi nous pouvons, dès à présent, formuler l’hypothèse que leurs destins théoriques et pratiques sont liés. La nécessité se fait donc pressante de caractériser aussi précisément que possible ce qu’on peut entendre par pratiques sociales. Pour y parvenir, Yann Le Bossé distingue les pratiques sociales d’une de leurs modalités : les pratiques d’intervention sociale, telles qu’elles sont accomplies, notamment par les intervenants sociaux ou travailleurs sociaux. Celles-ci constituent une déclinaison de celles-là. Il ne s’agit nullement de synonymes interchangeables, et ce, à l’encontre de l’usage courant, qui a fortement tendance à rabattre la formule générale sur l’une de ses déclinaisons : il est habituel que le syntagme « pratiques sociales » désigne un abrégé de cette modalité particulière que sont les pratiques d’intervention sociale. Assimilation compréhensible puisque tout syntagme vit dans des univers contextuels, sa signification lui vient des conditions de son utilisation, et non seulement du sens dont il serait porteur en lui-même, par essence. Mais nous parlons d’usage courant parce que cette assimilation des pratiques sociales aux pratiques d’intervention sociale n’est nullement exclusive des seuls praticiens de l’intervention sociale. Il est habituel que des praticiens tels les médecins, les sociologues, les psychologues ou les linguistes se représentent le social comme l’objet réservé des intervenants sociaux. Ce faisant, ils rejoignent la vox populi. Les raisons ne manquent pas. On peut en effet considérer que les pratiques d’intervention sociale renferment quelque chose du noyau dur des pratiques sociales en général, de leur nature, de leur portée et, bien entendu, de leurs limites. Comprendre ce que le travail social met en jeu dans ses pratiques, partant, la mobilisation théorique …
Appendices
Bibliographie
- Karsz, Saül (2005). Pourquoi le travail social ? Définition, figures, clinique, Paris, Dunod.