Comptes rendus

José Del Pozo, Les Chiliens au Québec. Immigrants et réfugiés de 1955 à nos jours, Montréal, Boréal, 2009, 424 p.[Record]

  • André Jacob

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  • André Jacob
    Professeur retraité, École de travail social, Université du Québec à Montréal

D’entrée de jeu, je dois dire que la lecture du livre de José Del Pozo s’est avérée une expérience agréable et intéressante. Ce livre, comme le veut l’expression populaire, se lit comme un roman. Dans un style simple, direct et clair, il aborde des thèmes variés comme les facteurs qui ont conduit à l’émigration chilienne, l’intégration au Québec, les rapports avec le pays d’origine, la forge de l’identité, etc. La perspective globale ressort d’une façon dynamique parce que l’intérêt repose sur des témoignages très variés et très riches. L’analyse proposée prend toute sa couleur par les propos recueillis comme autant de perles de l’histoire, la grande histoire et celle de simples témoins d’une époque ou d’une situation impliqués dans leur récit de vie situé dans une conjoncture particulière. Des dizaines de personnes ont donc contribué à renforcer chaque thème par leur perception de la relation de leur vécu passé en lien avec le présent autant dans leur analyse que dans les anecdotes qui enrichissent et illustrent bien les analyses de l’auteur. Pourquoi ? Précisément parce que les témoins des centaines de situations vécues relatées dans le livre deviennent les sujets actifs de la trame du livre, en d’autres termes des acteurs-auteurs. Ce livre devient un véritable porte-parole. Il prend vie en donnant à lire la parole d’acteurs de la migration chilienne. En faisant intervenir ces acteurs dans tous les thèmes analysés, José Del Pozo a fait oeuvre de maïeuticien, la maïeutique étant la fameuse méthode de Socrate qui estimait pouvoir accoucher les esprits d’idées ou de connaissances qu’ils possédaient sans le savoir, et ce, à la manière d’une sage-femme, estimait Socrate. En d’autres termes, ce livre sert de référence pour connaître, analyser et comprendre les faits et la dynamique de l’immigration chilienne au Québec. Si nous en soupçonnions les caractéristiques, les détails sont maintenant mis au jour par cette monographie. En ce sens, la portée pédagogique du livre est intéressante et pertinente dans la mesure où son contenu peut être utile autant à des chercheurs qu’à des intervenants ou intervenantes sur le terrain social, politique ou artistique. Le livre témoigne de la nécessité de dépasser les perceptions globales et de comprendre la genèse du déracinement et de l’implantation de différents contingents de Chiliens et de Chiliennes au Québec. Cette rétrospective présente la synthèse d’une expérience hétéroclite qui ressemble d’ailleurs à ce que vivent plusieurs « peuples migratoires ». En ce sens, le contenu n’interpelle pas seulement les Chiliens et les Chiliennes ; en effet, mutatis mutandis, il permet de mieux saisir la dynamique de l’interrelation entre des gens de diverses origines et de différentes régions du monde qui quittent leur pays, volontairement ou non, et qui entrent dans la grande aventure de l’intégration à une société qui leur est étrangère à de multiples points de vue. Paradoxalement, comme le souligne Vincent de Gaujelac en parlant des histoires de vie, le parcours des immigrants – surtout celui des réfugiés – est souvent complexe et surtout jamais établi sur une route linéaire, sans pierre d’achoppement. Les personnes victimes de situations qui les forcent à changer leur vie éprouvent souvent une certaine honte, voire une certaine difficulté à parler de leur vécu : La monographie de José Del Pozo donne la parole à des personnalités chiliennes connues, mais aussi à d’autres personnes qui n’ont peut-être jamais eu l’occasion de se faire entendre. Et cette parole trouve un écho puisqu’elle provoque. Elle se confronte au regard d’autrui dans ce qu’il comporte d’idées toutes faites, de stéréotypes et de peurs. En d’autres termes, José Del Pozo nomme avec minutie et rigueur divers phénomènes migratoires …

Appendices