Comptes rendus

Joseph Vidal-Rosset, Qu’est-ce qu’un paradoxe ?, Paris, Vrin, coll. « Chemins philosophiques », 2004, 120 pages.[Record]

  • Paul Franceschi

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  • Paul Franceschi
    Université de Corse

Vidal-Rosset commence ainsi par présenter un certain nombre de paradoxes de première importance. Il s’attache tout d’abord à décrire les paradoxes ensemblistes, tels que le paradoxe de Cantor et le paradoxe de Russell, ainsi que les solutions récentes qui leur ont été apportées. Il présente ensuite plusieurs paradoxes sémantiques tels que le paradoxe du Menteur et le paradoxe de Grelling. L’auteur s’attache ensuite à décrire en détail les paradoxes de Zénon d’Elée (le paradoxe sur la pluralité, Achille et la tortue, la flèche, et enfin le stade) ainsi que les solutions contemporaines dont ils ont fait l’objet, fondées sur le résultat de l’analyse mathématique moderne, en vertu de laquelle une série infinie peut admettre une somme finie. Vidal-Rosset s’attache également à présenter des paradoxes moins connus tels que le paradoxe de Diodore de Kronos (ou l’Argument dominateur de Diodore), à la lumière notamment de l’analyse qui en est faite par Vuillemin dans Nécessité ou contingence, l’aporie de Diodore et les systèmes philosophiques (Paris, Minuit, 1984). Enfin, il traite de deux paradoxes qu’il considère comme authentiquement philosophiques : l’Âne de Buridan et le paradoxe de la connaissabilité de Fitch. L’auteur fournit ainsi au lecteur un panorama varié des paradoxes philosophiques contemporains, et les paradoxes les plus connus sont ainsi exposés au lecteur, de manière à la fois claire et pédagogique. On peut penser cependant qu’il aurait pu inclure utilement d’autres paradoxes dans sa présentation des paradoxes sémantiques, tels que le paradoxe sorite en particulier. Peut-être aurait-il pu également réserver une place à l’un ou l’autre des paradoxes de Goodman ou de Hempel. Vidal-Rosset cependant, ne se limite pas à fournir une description précise des principaux paradoxes philosophiques et des solutions qui leur ont éventuellement été apportées. Il profite en effet également de l’occasion qui lui est fournie, lors de la description de l’un ou l’autre paradoxe, pour aborder de manière intéressante certaines questions philosophiques générales qui lui sont liées. Cela procure à l’ouvrage une plus grande diversité, en élargissant son champ d’application de manière significative. L’auteur s’intéresse ainsi en particulier à la question de savoir s’il existe plusieurs réponses à un même paradoxe. Pour Vidal-Rosset, la réponse à cette question est certainement affirmative. Il considère ainsi que les paradoxes ensemblistes, les paradoxes sémantiques et les paradoxes de Zénon admettent plusieurs solutions. Il discute cette question de manière intéressante et précise. Cependant, son opinion peut être nuancée d’abord par le fait que l’on ne peut véritablement considérer les paradoxes sémantiques comme résolus, en particulier pour ce qui concerne le Menteur ; et ensuite, parce que les paradoxes comme ceux de Zénon font actuellement l’objet, comme Vidal-Rosset le souligne d’ailleurs lui-même, d’une solution plutôt consensuelle, elle-même basée sur les résultats issus de l’analyse mathématique moderne. Vidal-Rosset s’appuie également sur la présentation des paradoxes pour aborder la question de la distinction entre science et philosophie. Il s’agit de la discussion la plus élaborée de l’ouvrage sur un thème philosophique général, et l’auteur présente ainsi cinq arguments différents en faveur d’une distinction claire entre science et philosophie. L’ouvrage accorde également une place importante – et ce n’est pas là son moindre intérêt – aux idées émises par W. V. O. Quine en matière de paradoxes. Vidal-Rosset s’attache ainsi à détailler, de manière pertinente, la distinction cruciale effectuée par Quine entre trois catégories de paradoxes : les paradoxes disant vrai (veridical), les paradoxes disant faux (falsidical) et les antinomies. Une telle distinction fournit en effet une classification fine des paradoxes, et permet d’éclairer nombre d’aspects essentiels de ces derniers. Muni de la typologie fournie par Quine, l’auteur nous invite à classer les …