En parcourant l'histoire

L’analyse du travail trente ans après Ombredane et Faverge[Record]

  • Guy Karnas and
  • Pierre Salengros

Paru dans Karnas, G. et Salengros, P. (1986). L’analyse du travail trente ans après Ombredane et Faverge. In R. Patesson (coord.), L’Homme et l’écran. Aspects de l’ergonomie en informatique (p. 331-340). Bruxelles : Éd. de l’Université de Bruxelles.

Ce numéro regroupe plusieurs articles différents, à l’image de la diversité des enjeux liant le travail à la santé. Il est question du métier d’enseignant et des troubles psychosociaux, des accidents occasionnés par une perturbation du mouvement, et de prévention des TMS. La façon dont sont conçus le travail, l’organisation, les espaces de travail, les équipements est à repenser. Regard aussi sur les travailleurs cumulant diverses formes de précarité et ceux devant composer avec une maladie chronique. Quelles formes d’accompagnement sont nécessaires ?

L’analyse du travail d’Ombredane et Faverge avait développé en 1955 une méthodologie originale reliant à la sélection, la formation et la qualification du travail à côté de l’aménagement strict de celui-ci. Les auteurs explicitent trois idées qui ont émergé depuis et qui fondent encore les recherches en la matière : l’analyse du travail doit distinguer entre l’analyse de la tâche et l’analyse de l’activité, ces deux analyses présentent une méthodologie spécifique, et toute analyse du travail doit prendre en charge de nouveaux facteurs qui agissent en interaction soit la prise de pouvoir de l’homme sur son activité sinon sur sa tâche, l’influence de la crise économique et ses retombées et le développement des techniques informatiques et ses dérivées. Voici donc cette année trente ans que les Presses Universitaires de France publiaient l’ouvrage d’OMBREDANE et FAVERGE consacré à l’analyse du travail et qui reprenait pour l’essentiel les conférences données au Séminaire d’Analyse du Travail de l’U.L.B. par Faverge en 1953 et 1954. Dans cet ouvrage qui démontrait surtout la pertinence de la construction d’une méthodologie adaptée à chaque activité professionnelle, on trouvait toutes les bases d’un courant qui, dans les pays de langue française et dans de nombreux pays de l’Est, allait prendre le nom d’ergonomie psychologique en s’opposant aux modèles restrictifs et strictement expérimentalistes de l’human engineering américain et qui allait réconcilier l’analyse de l’homme et celle de son activité, en intégrant la plupart des grands chapitres de la psychologie du personnel soit : Ce sont les finalités essentielles de l’analyse du travail qui rencontrent une difficulté première et que De Montmollin soulignait dans sa conférence inaugurale : l’analyse du travail est en effet à la fois méthode et objet ; elle ne peut donc se concevoir que par référence à un objectif par rapport auquel elle est « méthode ». Les problèmes méthodologiques soulevés par l’analyse du travail ne peuvent se résoudre que par le recours à d’autres méthodes et tous les exposés de cet après-midi tendront à présenter les principales méthodes utilisées avec leurs implications en général et dans le cas particulier de l’informatique. Au point de vue de ces méthodes et en restant aussi près que possible de son texte, Faverge s’en prend assez violemment dans l’Analyse du Travail à ce qu’il appelle la « méthode essayiste », soit l’analyse du travail en termes d’aptitudes par décomposition en opérations, ou encore par seule voie d’enquête auprès des cadres. En opposition à ces pratiques, il indique la nécessité de poser clairement le problème étudié et de définir sans ambiguïté le but de l’étude ; ces deux prémisses déterminent le choix des « critères qui permettront de sanctionner la valeur de la solution proposée pour le problème posé ». La question devient en définitive celle des relations, sous-jacentes à l’analyse du travail, entre l’objectif, le contenu, et la manière (ou encore entre les finalités, l’objet et la technique). En 1955, Faverge met surtout l’accent en ce qui le concerne sur le contenu : l’informatisation, le langage des communications (plus d’un chapitre est consacré à ce sujet et tout l’ouvrage révèle l’importance pour Ombredane et Faverge de l’information, des signaux utilisés dans le travail). C’est ainsi qu’il ressort qu’une bonne part de l’activité de l’analyste du travail sera consacrée à l’explicitation, à la compréhension de ces signaux, du passage de systèmes de signaux à d’autres, etc… Avec « l’adaptation de la machine à l’homme » qui inaugure en 1958 la collection « Le psychologue », Faverge met en place les deux premières démarches de l’ergonomie, la gestuelle et l’informationnelle. C’est après 1972, soit après les recherches soutenues par la CECA …

Appendices