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C’est avec beaucoup de fébrilité que nous vous présentons ce numéro de l’automne constitué de sept contributions originales. Nous vous rappelons que la revue publiera deux autres numéros avant de cesser définitivement ses parutions. Nous sommes d’ailleurs toujours à la recherche de personnes désireuses de poursuivre la mission de PISTES : n’hésitez pas à manifester votre intérêt.

Dans un premier article, Sylvie Gravel, Jessica Dubé et Carole Sylvestre présentent un outil d’apprentissage à la gestion de la santé et de la sécurité du travail basé sur les coûts. L’article présente la phase de développement de l’outil ainsi que des premiers résultats de son utilisation auprès d’une population d’étudiant.es. Les résultats suggèrent que l’outil suscite en général les apprentissages anticipés, ce qui conduit les autrices à suggérer son utilisation pour la formation continue et qualifiante. Jean Larbaigt, Céline Lemercier et Irène Gaillard nous présentent quant à eux un papier sur un cas de prise en compte de l’adoption technologique dès le stade de la conception dans le secteur de la viticulture. Constatant un phénomène de sous-utilisation des technologies, dont la conception est trop souvent peu adaptée à l’activité des futurs utilisateurs, les auteurs documentent les apports d’une intervention ergonomique menée dans un projet de conception technologique à partir d’une pratique réflexive. Par son action d’ajustement sociocognitif sur les représentations de l’activité des utilisateurs, dès la phase de conception, les auteurs concluent que ce type d’intervention ergonomique peut agir en faveur de l’adoption technologique.

Une troisième contribution a pour but de proposer un modèle de prédiction de l’intention de départ des sapeurs-pompiers volontaires français, en articulant cette problématique avec celle de la conciliation des sphères de vie. Impliquant 183 sapeurs-pompiers volontaires d’un Service départemental d'incendie et de secours français, l’étude de Marina Burakova confirme que les déséquilibres des sphères de vie relatifs à la tension et au temps ont des effets sur l’intention de départ de ces travailleurs. L’épuisement et la satisfaction à l’égard du métier sont identifiés comme variables médiatrices. L’autrice discute d’éventuelles pistes d’action.

Pour leur part, Gaymard et ses collègues ont effectué une enquête sur la relation entre l’utilisation du téléphone au volant et les risques d’accident chez une population de commerciaux français hommes et femmes. Les résultats apportent des informations nouvelles sur les risques routiers professionnels. Les auteurs observent des aspects différentiels en fonction du sexe comme l’utilisation des infrastructures routières et la gestion des aspects vie professionnelle/vie privée, les répondants ayant des difficultés à séparer ces deux sphères s’exposant à plus de risques sur la route. Plusieurs mesures préventives sont identifiées pour réduire ces risques.

Anne Raspaud et Pierre Falzon, à partir du cadre théorique d’Amartya Sen, s’emploient à préciser les conditions et les moyens d’une intervention capacitante sur l’organisation à partir d’un cas dans le secteur hospitalier. Dans cette approche dite constructive, la démarche de l’ergonome cherche à activer des facteurs permettant de convertir les capacités individuelles et collectives en capabilités effectives. La conclusion aborde les conditions de la généralisation de la méthode et les rôles de l’ergonome dans cette intervention ergonomique capacitante.

Dans cette contribution de Virginie Althaus et ses collaborateurs, l’usage de substances psychoactives constitue le point de départ pour étudier les liens entre chômage et santé. Plutôt que d’aborder l’usage des substances comme une pratique déviante – l’approche dominante – l’étude met l’accent sur le sens que les personnes donnent à leurs consommations. À partir de l’analyse du discours de 21 chômeurs, l’analyse thématique des entretiens met en évidence plusieurs fonctions recherchées à travers les usages (anesthésiante, stimulante, sociale). Il en ressort que c’est la fonction anesthésiante des substances qui prédomine dans le discours des participants, et ce, afin de résister aux effets du chômage.

Une dernière contribution de Lucie Reboul, Catherine Delgoulet, Corinne Gaudart et Sonia Sutter s’intéresse à la digitalisation de la relation de service des agents d’une compagnie aérienne en matière de conséquences sur la santé et les parcours de ces agents. Dans une visée exploratoire, l’étude cherche à comprendre en quoi les parcours des agents de service aux clients sont mis à l’épreuve dans le flux de transformations multiples et continues qui tendent à s’accélérer au cours de ces dernières années. Les analyses de l’activité de cinq agents de service aux clients mettent en évidence une intensification du travail, par le cumul de contraintes industrielles et marchandes dans la relation de service ainsi qu’une modification de la « coproduction » de service dans les situations « digitalisées ». Alors que les autrices constatent une diminution de leur marge de manœuvre, les résultats questionnent plus largement les possibilités pour ces personnels vieillissants de tenir dans le métier, dans un contexte où la vie professionnelle s’allonge.

Le comité éditorial vous souhaite, malgré la situation difficile que nous vivons, une rentrée automnale conviviale. Bonne lecture.