Article body

Jacques Racine, professeur à la Faculté de théologie et des sciences religieuses de l’Université Laval, offre dans Rebâtir l’avenir une analyse de la crise financière qui a débuté en 2007 et qui, selon certains, se poursuit encore aujourd’hui avec les derniers soubresauts de la péripétie grecque. Celle-ci lui est rapidement apparue, raconte-t-il en introduction, comme une « véritable crise morale liée à la dépréciation de la personne humaine » (p. 9). À la suite d’une conférence qu’il a donnée sur le sujet en tant que président d’un comité de retraite, des auditeurs l’ont encouragé à « pousser plus loin » son travail et à « mettre en ordre » ses réflexions et ses analyses.

Dans son premier chapitre, Racine identifie les « rouages » (p. 11) de la crise et jette le blâme sur la « dérèglementation » comme « source première » de la crise financière. Selon lui, les politiciens auraient abandonné « leur pouvoir sur le monde financier et leur capacité d’intervenir » (p. 33). Au deuxième chapitre, il offre un portrait des « grands perdants » de la crise, dont les chômeurs, les pauvres, les retraités et la planète Terre. Dans le troisième chapitre, qui clôt la première partie du livre, Racine étudie les différentes « sorties de crise » réalisées dans quelques pays, dont le Canada, pour conclure que les choix de stratégies en la matière « tiennent plus de la singularité des systèmes politiques et de leurs dirigeants » (p. 133).

La deuxième partie du livre est consacrée aux « leçons et défis » qui attendent l’humanité. Racine dénonce ce qu’il appelle le « fléau de l’impunité », celle des banquiers qui n’auront pas à répondre de leurs actes (p. 142). Il plaide pour un « retour à la mission première des banques » (p. 144) et évoque une réforme des agences de notation. Il discute aussi longuement de la possibilité de l’avènement d’un « gouvernement mondial » (p. 159), formulant le souhait que « l’on arrivera à se donner un gouvernement apte à mieux coordonner les efforts de l’humanité pour prévenir les crises systémiques ». Racine termine en soulignant que tous ces défis « ne renvoient pas seulement à des problèmes de structures et d’institutions » ; ils mettent en exergue des « questions relatives à l’éducation des personnes » (p. 207). Il soulève aussi au passage d’autres défis auxquels fait face le monde, comme « le développement de la génétique » et « les études climatiques [qui] nous amènent à craindre pour la survie des humains sur la planète Terre » (p. 153).

L’ouvrage est manifestement destiné aux néophytes, mais il ne pourra, croyons-nous, totalement les éclairer, puisque le professeur Racine n’est lui-même pas un spécialiste de la question financière. Même si aucune erreur majeure n’est commise, aucune analyse particulièrement éclairante de la crise n’est non plus offerte. L’auteur, qui avoue avoir utilisé Wikipédia (p. 52), offre plutôt une succession de tableaux très sommaires d’une foule de sujets qu’il a manifestement du mal à maîtriser. Au terme de sa section sur la Grèce, Jacques Racine conclut, un peu simplement, que la crise a « offert une première occasion aux opérateurs de marchés de spéculer sur l’euro » (p. 42). Plus loin, il trouve « fort étonnant » que le dollar américain soit demeuré une monnaie de réserve, malgré la crise (p. 50). Sa conclusion sur la dérèglementation, comme source première de la crise, manque tout autant de sophistication et est éminemment prévisible. Mais, comme le reste, elle manque cruellement de substance. Une étude plus nuancée et mieux ciblée, produite à l’aide d’un schéma théorique éloquent, aurait vraiment permis d’éclairer autant les événements que les lecteurs.