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L’ordonnance 2004-604 du 24 juin 2004 portant réforme du régime des valeurs mobilières émises par les sociétés commerciales a introduit les actions de préférence dans le Code de commerce (art. L228-11 et suivants). Celles-ci visent à remplacer les titres de capital avec des régimes particuliers, telles que les actions à dividende prioritaire sans droit de vote ou les actions de priorité (titres en voie d’extinction), en permettant aux sociétés par actions d’émettre des titres de capital de nature à fidéliser les actionnaires, tout en maintenant les équilibres politiques au sein des organes sociaux de la société.

Il est admis que l’ordonnance de 2004 n’a pas modifié la loi n° 47-1775 du 10 septembre 1947 portant statut de la coopération, ni pour y introduire les actions de préférence, ni pour en supprimer les titres de capital spécifiques aux coopératives, telles que les parts à intérêt prioritaire sans droit de vote ou les parts à avantages particuliers. Ces deux catégories de parts sociales ont été introduites dans la loi de 1947 par la loi n° 92-643 du 13 juillet 1992 relative à la modernisation des entreprises coopératives [1], en vue de permettre à ces dernières d’augmenter leurs fonds propres, notamment par l’admission d’associés non-coopérateurs. La doctrine s’est interrogée sur la possibilité pour une coopérative d’émettre des actions de préférence [2].

L’objet du présent article est de livrer l’analyse d’un praticien du droit coopératif ayant conduit une coopérative à émettre des actions de préférence [3] par une application distributive des dispositions du Code de commerce et de la loi de 1947, selon laquelle les règles spéciales dérogent aux règles générales [4]. Pour ce faire, seront examinés d’abord les dispositions du Code de commerce régissant les actions de préférence, puis les principes coopératifs que ces actions devront respecter.

Le régime juridique du Code de commerce

Les sociétés peuvent émettre les titres de capital prévus par les dispositions légales. Il appartient à chacune, y compris les coopératives, de sélectionner les titres qu’elle veut émettre en les stipulant dans ses statuts.

La base légale des actions de préférence

Les actions de préférence sont régies par les articles L228-11 à L228-29-7 du Code de commerce, intégrés dans le chapitre VIII, « Des valeurs mobilières émises par les sociétés par actions », dudit code. Toutes les sociétés par actions, à savoir les sociétés anonymes, les sociétés en commandite par actions ou les sociétés par actions simplifiées, peuvent émettre des actions de préférence. Il en résulte que pour cela une coopérative doit revêtir l’une des formes sociales précitées.

En revanche, les coopératives constituées sous forme de société à responsabilité limitée ou de société en nom collectif, de même que celles à forme sociale civile ou agricole, voire sans forme sociale, ne pourront pas émettre de telles actions.

La variabilité du capital

Au terme de l’article L231-1 du Code de commerce, les coopératives peuvent avoir un capital variable [5]. L’ensemble des titres de capital émis par la coopérative, qui a opté pour les articles L231 et suivants du Code de commerce, sont donc soumis au régime de la variabilité du capital social, tout comme les actions de préférence.

Les actions de préférence seront émises par souscription des associés ou admission de nouveaux associés et rachetées dans les conditions fixées par les statuts. Ces opérations peuvent être effectuées sans frais pour le titulaire. Celles de souscription et de rachat, y compris pour les actions de préférence, sont effectuées sous le contrôle de l’organe désigné par les statuts de la coopérative pour que celui-ci puisse vérifier que le capital social n’atteigne pas un seuil déterminé, qu’il s’agisse à la hausse du montant maximum du capital social, si c’est prévu dans ses statuts, ou à la baisse d’un plancher en capital au dessous duquel le capital de la coopérative ne saurait varier [6].

La limitation des actions de préférence à 50 % du capital social

Conformément à l’article L228-11 du Code de commerce, les actions de préférence sans droit de vote ne peuvent pas représenter plus de la moitié du capital social, toute action émise au-delà de cette limite étant susceptible d’être annulée.

De son côté, la loi de 1947 prévoit que les parts à intérêt prioritaire sans droit de vote et les certificats coopératifs d’investissement ne doivent pas non plus dépasser la moitié du capital social (article 19 tervicies[7]. Il n’existe pas d’incompatibilité entre la limitation applicable aux actions de préférence sans droit de vote et les dispositions de la loi de 1947 qui impose également ce type de limitation pour les titres de capital sans droit de vote. Il n’y a pas doute que, si une coopérative émet ces trois catégories de titre de capital, ils ne devront pas dépasser ensemble la moitié du capital social de la coopérative.

L’assemblée spéciale des titulaires d’actions de préférence

Au terme de l’article L225-99 alinéa 2 du Code de commerce, les titulaires d’actions de préférence sont réunis en assemblée spéciale pour l’approbation d’une modification de leurs droits particuliers, ainsi que dans le cas d’une fusion (art. L228-17), ou pour donner mission à l’un des commissaires aux comptes de la société d’établir un rapport sur le respect par la société des droits particuliers attachés aux actions de préférence (art. L228-19). En l’absence de dispositions contraires dans la loi de 1947, il ne fait pas de doute que les détenteurs d’actions de préférence dans une coopérative peuvent solliciter le commissaire aux comptes de la coopérative pour concevoir un tel rapport.

La loi de 1947 prévoit que se réunissent en assemblée spéciale les porteurs de parts à intérêt prioritaire sans droit de vote (art. 11 bis [8]) et les titulaires de certificats coopératifs d’investissement (art. 19 octodecies, al. 2 [9]). Ces assemblées spéciales approuvent, à la majorité des deux tiers des porteurs présents ou représentés, les modifications apportées aux droits des titulaires des parts sociales ou des certificats coopératifs d’investissement.

S’agissant des porteurs de parts à intérêt prioritaire sans droit de vote, la compétence de leur assemblée spéciale est plus large, car elle peut également émettre un avis avant toute décision de l’assemblée générale, y compris l’assemblée générale ordinaire d’approbation des comptes annuels. Cet avis est porté à la connaissance de l’assemblée générale et consigné à son procès-verbal.

Il résulte de ce qui précède que les coopératives sont familiarisées avec la pratique des assemblées spéciales, ce qui leur permettra de convoquer l’assemblée spéciale des titulaires d’actions de préférence dans les hypothèses précitées des articles L225-99, 228-17 et L228-19 du Code de commerce.

Compte tenu du silence du Code de commerce et de la loi de 1947 à cet égard, les associés coopérateurs peuvent modifier les statuts de la coopérative pour permettre aux titulaires d’actions de préférence de rendre un avis avant toute décision de l’assemblée générale et, le cas échéant, de le consigner dans le procès-verbal de cette assemblée.

La conversion des actions de préférence

En vertu de l’article L225-14 du Code de commerce, les actions de préférence peuvent être converties en actions ordinaires ou en actions de préférence d’une autre catégorie par l’assemblée générale extraordinaire. L’unanimité des actionnaires est requise pour l’adoption de ces délibérations.

La loi de 1947 ne prévoit pas de modalité de conversion des parts sociales en actions de préférence ou inversement (une fois les actions émises). Il n’est pas interdit de proposer de telles conversions à l’adoption par l’assemblée générale extraordinaire à la majorité des deux tiers, mais elles nécessiteront pour la coopérative d’obtenir l’accord individuel de chaque associé [10]. Pour que le conseil d’administration ou le directoire puisse imposer aux associés la conversion des parts sociales ou des actions de préférence, une clause statutaire sera nécessaire et elle devra préexister à la souscription des parts concernées.

Les opérations de souscription et de rachat sont effectuées à la valeur nominale des titres de capital. Si celle-ci est identique pour tous les titres, il n’est pas nécessaire de prévoir un rapport de conversion. En revanche, si elle est différente pour chaque catégorie de titre, un rapport de conversion devra être prévu. Les associés qui par application de ce rapport d’échange ne recevront pas un nombre entier de parts percevront le nombre entier de parts immédiatement inférieur et pourront obtenir le remboursement de leurs droits formant rompu sur la base de la valeur des parts telle que retenue pour la détermination du rapport d’échange.

La conversion de certificats coopératifs d’investissement en actions de préférence apparaît théorique, dans la mesure où leurs titulaires seraient amenés à renoncer au droit sur l’actif net – dans la proportion du capital qu’ils représentent – dont ils bénéficient, en vertu de l’article 19 duovicies de la loi de 1947, alors que les actions de préférence ne sauraient conférer de droit sur l’actif net (voir infra).

La conversion de parts ordinaires d’une coopérative en actions de préférence ne pourra pas priver les associés coopérateurs de leur droit de vote, ce qui signifie que les actions de préférence devront être émises avec un tel droit.

A l’inverse, la conversion de parts à intérêt prioritaire sans droit de vote en actions de préférence ne pourra aboutir à conférer à leurs titulaires un droit de vote dont ils ne disposaient pas en vertu des parts souscrites à l’origine.

Les actions de préférence avec ou sans droit de vote

Au terme de l’article L228-11 du Code de commerce, les actions de préférence peuvent être émises avec un droit de vote ou sans.

La question de savoir si une coopérative souhaitant émettre des actions de préférence peut choisir de le faire avec ou sans droit de vote se pose, et elle est d’importance, car, à la différence des sociétés de capitaux où chaque action confère un droit de vote, les coopératives sont des sociétés dans lesquelles ce droit est exercé selon la règle « Un homme, une voix », conformément à l’article 9 de la loi de 1947. Le droit de vote est un principe coopératif qui permet d’affirmer la gestion démocratique et égalitaire par les associés coopérateurs. La loi de 1992 a toutefois introduit des titres de capital sans droit de vote. Ainsi, au terme de la loi de 1947, une coopérative peut émettre trois titres de capital différents.

Des titres de capital avec un droit de vote

Telles les parts sociales ordinaires, les parts à avantages particuliers (art. 11), étant précisé que ces parts sociales ne peuvent être souscrites que par des associés (qu’ils soient associés coopérateurs ou non-coopérateurs), à l’exclusion des tiers non associés, sont des titres de capital avec droit de vote.

Des titres de capital sans droit de vote

Les titres de capital sans droit de vote représentent une exception, compte tenu du principe ci-dessus évoqué : il s’agit des parts à intérêt prioritaire sans droit de vote (art. 11 bis) et des certificats coopératifs d’investissement (art. 19 sexdecies). Il est à remarquer que ces titres peuvent être souscrits uniquement par des associés non-coopérateurs.

Des titres de capital avec un droit de vote limité

Les parts d’associés non-coopérateurs se voient limités à 35 % du total des droits de vote (art. 3 bis). Pour une coopérative, il est donc concevable d’émettre des actions de préférence avec ou sans droit de vote. Lorsque les actions de préférence sont proposées à la souscription d’associés non-coopérateurs, leurs droits de vote peuvent se trouver limités par l’application des dispositions de l’article 3 bis. La limitation du droit de vote tient en effet plus à la qualité d’associé non-coopérateur qu’à la nature des titres de capital, qui peuvent donc être soit des parts d’associés non-coopérateurs de l’article 3 bis, soit des parts de préférence proposées à la souscription d’associés non-coopérateurs.

Le régime juridique de la loi de 1947

Les titres de capital émis par une société coopérative anonyme, s’ils sont régis par le Code de commerce, comme évoqué ci-dessus, le sont également par le droit coopératif, qui peut donc, en qualité de règle spéciale, déroger au Code de commerce, en qualité de règle générale. Les actions de préférence peuvent présenter des avantages financiers ou politiques, qui devront néanmoins respecter les principes coopératifs, de la même manière que les parts à avantage particulier, conformément à l’article 11 de la loi de 1947.

Les avantages politiques

Au terme de l’article L225-122 du Code de commerce, chaque action donne droit à au moins une voix. L’article L225-123 précise qu’un droit de vote double peut être conféré à l’actionnaire lorsqu’il détient ses actions depuis au moins deux ans. L’article L228-11 prévoit que le droit de vote peut être suspendu ou supprimé, à titre temporaire ou définitif.

Le droit de vote

Les dispositions précitées du Code de commerce ne sont pas applicables à une coopérative. Au terme de l’article 9 de la loi de 1947, le droit de vote est en effet exercé selon la modalité « Un homme, une voix ». Il s’agit d’un grand principe coopératif qui permet d’affirmer la gestion démocratique de ces entreprises.

S’agissant d’actions de préférence proposées à la souscription d’associés coopérateurs, il n’est pas envisageable d’altérer, temporairement ou définitivement et sous une forme ou sous une autre, le droit de vote qu’ils détiennent, d’une manière intangible de l’article 9 de la loi de 1947 : ni en supprimant le droit de vote, ni en en conférant un double.

Quant aux actions de préférence proposées à la souscription d’associés non-coopérateurs, elles ne pourront conférer de droit de vote que dans la limite du nombre maximum de droits de vote que l’article 3 bis permet de détenir. L’octroi d’un droit de vote à des associés non-coopérateurs est très encadré par la loi de 1947, que ce soit au titre des parts d’associés non-coopérateurs (art. 3 bis) ou à celui des parts à intérêt prioritaire sans droit de vote (art. 11 bis). L’existence de ces dispositions légales ne permet pas de les reproduire dans les statuts de la coopérative pour stipuler l’avantage conféré à des actions de préférence.

Il en résulte que les actions de préférence ne sauraient ni supprimer ni doubler le droit de vote lorsqu’elles sont proposées à la souscription d’associés coopérateurs et ne conférer de droit de vote que dans le respect du nombre maximum admis pour les associés non-coopérateurs.

Les autres droits politiques

La doctrine a énuméré sans exhaustivité d’autres droits politiques que les actions de préférence sont susceptibles d’offrir à leurs détenteurs [11]. Sont transposables à une coopérative :

  • le droit d’information renforcé, portant sur les budgets, les situations comptables intermédiaires, les projets d’investissement ;

  • le droit de contrôle spécifique de la gestion ou des comptes confié à un expert selon des modalités prédéfinies ;

  • la représentation au conseil d’administration des titulaires d’actions de préférence.

Cette possibilité est d’autant plus intéressante s’il s’agit d’actions de préférence sans droit de vote proposées à la souscription d’associés non-coopérateurs. Le montant souscrit au capital social peut en effet être non négligeable, et, si les associés peuvent utiliser les services de la coopérative [12], le chiffre d’affaires en résultant peut également être conséquent, d’où il découle in fine que le conseil d’administration peut être amené à les prendre en compte dans l’orientation de la stratégie de la coopérative.

Dans ces conditions, une représentation des titulaires d’actions de préférence sans droit de vote peut s’avérer souhaitable et leur assemblée spéciale pourra désigner des candidats à l’élection, par l’assemblée générale des associés coopérateurs, au mandat d’administrateur de la coopérative. N’apparaissent pas transposables à une coopérative :

  • l’instauration d’un régime particulier de transmission des actions de préférence, dans la mesure où leur souscription et leur rachat sont de toute manière effectués selon les modalités stipulées dans les statuts ;

  • l’octroi d’avantages d’ordre commercial, dans la mesure où l’affectio cooperatis ne réside pas dans la réalisation de bénéfices par la coopérative et que tout excédent provenant des opérations commerciales a vocation à être restitué aux associés coopérateurs au prorata de leurs opérations avec la coopérative, et ce au moyen de la ristourne (loi de 1947, art. 15).

Les avantages financiers

Les fonds propres d’une coopérative sont soumis à différentes contraintes, dont l’objet est de pérenniser la coopérative alors que l’affectio cooperatis ne réside ni dans la réalisation de profits, même si une coopérative doit en réaliser, ni dans le partage de bénéfices, puisque la ristourne a pour objet de restituer aux coopérateurs l’excédent réalisé.

Il en résulte que l’avantage financier attaché aux actions de préférence devra respecter les principes coopératifs suivant et concernant tant la rémunération servie au capital et la valeur nominale des actions de préférence que l’impartageabilité des réserves et l’affectation du boni de liquidation.

La rémunération des actions de préférence

Au préalable, il convient d’observer qu’il existe pour les sociétés de capitaux, sous réserve de l’interdiction du dividende fictif, une liberté dans la fixation du montant du dividende qui ne se rencontre pas pour les coopératives. Au terme de l’article 14 de la loi de 1947, les coopératives ne peuvent en effet servir à leur capital qu’un intérêt dont le taux est déterminé par leurs statuts, au plus égal au taux moyen de rendement des obligations des sociétés privées publié par le ministre de l’Economie.

Par ailleurs, l’article 19 vicies impose de verser aux titulaires de certificats coopératifs d’investissement une rémunération au moins égale à celle versée aux parts sociales.

La limite de l’article 14 est applicable à l’ensemble des titres de capital avec ou sans droit de vote émis par la coopérative.

Il résulte de ce qui précède que la rémunération des actions de préférence doit obéir à cette contrainte. Ces dispositions contraignent les coopératives à maintenir la rémunération de leur capital à un niveau moins élevé que celle permise aux autres sociétés commerciales.

Toutefois, il n’apparaît pas impossible que les actions de préférence bénéficient d’une rémunération supérieure à la limite de l’article 14, dès lors que la rémunération servie au capital pris dans sa globalité respecte cette limite et que l’égalité de rémunération des titulaires de certificats coopératifs d’investissement est également assurée.

La rémunération des actions de préférence peut être stipulée dans les statuts. Dans ce cas, au terme de l’article 17 de la loi de 1947, les statuts peuvent prévoir qu’en cas d’insuffisance des résultats d’un exercice, les sommes nécessaires pour parfaire l’intérêt statutaire afférent à cet exercice seront prélevées soit sur les réserves, soit sur les résultats des suivants, sans aller au-delà du quatrième.

De même, les statuts de la coopérative peuvent stipuler une rémunération progressive en fonction de la durée de détention des actions de préférence, étant précisé que cette rémunération doit rester dans les limites globales fixées pour la rémunération du capital. Il y a donc là différentes possibilités d’octroyer de véritables préférences.

La valeur nominale des actions de préférence

Conformément à l’article 18 de la loi de 1947, l’associé qui se retire ou qui est exclu a droit, dans le cas où il peut prétendre au remboursement de ses parts, au remboursement de leur valeur nominale. Il en résulte que les opérations de souscription et de rachat de parts sociales sont effectuées à leur valeur nominale stipulée dans les statuts : c’est une conséquence pratique de l’impartageabilité des réserves d’une coopérative affectant les titres de capital (voir infra).

La généralité de cette disposition la rend applicable à l’ensemble des parts sociales émises par une coopérative, tant les ordinaires et celles à avantages particuliers souscrites par les associés coopérateurs que celles à intérêt prioritaire et les autres parts souscrites par les associés non-coopérateurs. Dès lors, cette disposition est applicable aux actions de préférence et l’avantage financier de ces actions ne peut donc pas consister en une dérogation à ce régime.

L’incorporation des réserves aux actions de préférence

L’article 16 de la loi de 1947 prévoit que les réserves peuvent être incorporées au capital, soit en relevant la valeur des parts, soit en en distribuant des gratuites. Cela s’applique à l’ensemble des parts sociales émises par la coopérative, qu’elles soient souscrites par des associés coopérateurs ou des associés non-coopérateurs. Il n’est donc pas interdit que ces derniers bénéficient d’un droit sur les réserves au moyen d’une incorporation.

Dans la mesure où la valeur nominale des parts sociales peut être différente, il est possible d’incorporer aux actions de préférence un montant de réserves plus important que pour les autres parts sociales. De même, il n’est pas interdit de distribuer un nombre d’actions de préférence gratuites supérieur au prorata de leurs droits dans le capital ancien. L’incorporation des réserves peut donc donner lieu à une préférence qui peut bénéficier aussi bien à des associés coopérateurs qu’à des associés non-coopérateurs.

L’affectation du boni de liquidation aux titulaires d’actions de préférence

Au terme de l’article L237-29 du Code de commerce, le boni de liquidation est réparti entre les associés à proportion de leurs droits dans le capital, sauf disposition particulière des statuts.

Une telle disposition n’est pas transposable à une coopérative. L’article 19 de la loi de 1947 impose en effet la dévolution du boni de liquidation d’une coopérative, soit à d’autres coopératives, soit à des oeuvres d’intérêt général ou professionnel. Il s’agit de l’application du principe coopératif d’impartageabilité des réserves.

La seule exception à ce principe est octroyée aux titulaires de certificats coopératifs d’investissement, qui ont un droit sur l’actif en proportion du capital qu’ils détiennent (art. 19 duovicies). En l’absence de dérogation expresse au profit des actions de préférence, il n’est donc pas envisageable de conférer un droit quelconque dans le boni de liquidation d’une coopérative aux titulaires d’actions de préférence.

Conclusion

Emises avec un droit de vote et proposées à la souscription des associés coopérateurs, les actions de préférence viennent en doublon des parts à avantages particuliers, qui peuvent se voir octroyer des avantages politiques ou financiers de même nature. Dans cette hypothèse, les actions de préférence ne représentent pas véritablement un nouvel outil d’augmentation des fonds propres d’une coopérative.

Emises sans droit de vote et souscrites par des associés non-coopérateurs ou des tiers non associés, le cas échéant utilisateurs des services de la coopérative, elles représentent un nouvel outil d’augmentation des fonds propres des coopératives et les avantages politiques ou financiers qui peuvent leur être accordés ne sont pas négligeables.

Associés coopérateurs, associés non-coopérateurs et tiers non associés se retrouvent désormais sur un pied d’égalité, pour ce qui concerne l’avantage particulier ou la préférence qui peuvent leur être respectivement octroyés. Qu’il s’agisse d’avantage particulier ou de préférence, leur nature pourra être identique et devra, en tout état de cause, respecter les principes coopératifs.