Des pratiques à notre image

L’impact du conflit armé sur l’intégration des femmes immigrantes et réfugiées francophones en Ontario[Record]

  • Nathalie Plante,
  • Angèle Bassole,
  • Hoori Hamboyan,
  • Michèle Kérisit and
  • Marta Young

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  • Nathalie Plante
    Le Mouvement ontarien des femmes immigrantes francophones (MOFIF)

  • Angèle Bassole
    Le Mouvement ontarien des femmes immigrantes francophones (MOFIF)

  • Hoori Hamboyan
    Le Mouvement ontarien des femmes immigrantes francophones (MOFIF)

  • Michèle Kérisit
    Le Mouvement ontarien des femmes immigrantes francophones (MOFIF)

  • Marta Young
    Le Mouvement ontarien des femmes immigrantes francophones (MOFIF)

C’est au printemps de 2003 qu’a débuté pour nous, chercheures, une expérience transformatrice : le Mouvement ontarien des femmes immigrantes francophones (MOFIF), encadré par un regroupement d’organismes communautaires de Toronto, de Hamilton et d’Ottawa ainsi que de femmes ayant vécu la guerre, initiait une recherche intitulée « L’impact du conflit armé sur l’intégration des femmes immigrantes et réfugiées francophones en Ontario ». Nous devions mener cette recherche et ne savions pas si les femmes ayant vécu la guerre dans leur pays d’origine allaient vouloir partager avec nous leurs expériences. Nous avons été vraiment touchées par leur besoin de parler, de raconter, de partager leur histoire afin que d’autres femmes ayant aussi vécu des conflits armés et se trouvant maintenant au Canada puissent bénéficier de leurs expériences et ainsi s’intégrer plus facilement à leur société d’accueil. Nous voulons dans cet article rendre compte des recommandations qui ont émané d’abord de nos rencontres avec des femmes, 23 au total, ainsi que de groupes focus auprès d’intervenantes et d’intervenants travaillant avec des femmes ayant vécu des conflits armés. Ces recommandations, qui se trouvent dans le rapport de recherche, ont aussi été retravaillées lors d’un forum de validation de la recherche réunissant plus de 60 participantes, soit des représentantes d’organismes communautaires et des femmes de la communauté. Les recommandations que nous allons présenter ici portent davantage sur l’intervention directe alors que le rapport et le compte-rendu du forum de validation proposent aussi une série de recommandations portant sur le démarchage politique pour modifier, par exemple, les lois sur l’immigration et la réunification familiale, pour faire augmenter les prestations d’assistance sociale et faciliter la reconnaissance des diplômes. Notre souhait est que la voix de ces femmes soit entendue et ait un impact réel sur leur vie au Canada et sur l’intégration d’autres femmes comme elles. À une exception près, les femmes rencontrées dans le cadre de cette recherche étaient originaires d’Afrique centrale (Rwanda, Burundi et République démocratique du Congo – RDC). C’est leur témoignage que nous relevons ici, car elles ont, pour la plupart, vécu des conflits caractérisés par une violence extrême et continue et par la perpétration d’atrocités inimaginables. Certaines sont, par exemple, rescapées du génocide rwandais. L’impact causé par cette violence se vit sur différents plans, physique, psychologique ou affectif. Alors que certaines femmes rencontrées portaient les séquelles physiques des sévices vécus, dont des problèmes gynécologiques dus à des viols parfois répétés, toutes portaient des cicatrices psychologiques et affectives. Une souffrance profonde est ressentie face aux pertes personnelles, familiales et sociales. Pour beaucoup, un sentiment de culpabilité d’avoir survécu se conjugue avec une profonde solitude. Pour certaines aussi, la perte du pays natal, à travers les conflits et l’exil, crée des blessures identitaires, une nostalgie très difficile à supporter. Les parcours des femmes rencontrées sont jalonnés de deuils multiples et de séparations familiales. Des êtres chers n’ont pas survécu ou ont été assassinés, alors que d’autres ont disparu sans que l’on sache où ils sont : ils ne sont peut-être pas en sécurité, ils ont souvent besoin d’aide financière. La réunification d’avec les membres de leur famille restés au pays est souvent difficile pour de multiples raisons, celle en particulier des barrières légales et financières imposées par la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés et son règlement. Leurs pertes se situent également sur le plan social. Alors que la plupart étaient des femmes actives et professionnellement impliquées dans leur propre société, elles doivent, une fois arrivées au Canada, « repartir à zéro », comme dit l’une d’entre elles. Elles ont alors à négocier avec des aides gouvernementales, l’aide sociale par …

Appendices