Intitulé Le retour de l’Utopie, un premier chapitre installe un fil conducteur qui lie entre eux les suivants et propose de concevoir l’utopie comme une invitation au changement. À travers un détour historique, l’auteur soutient que le progrès existe depuis toujours en symbiose avec la pensée utopique. C’est parce que nous avons cru au progrès que le monde est ce qu’il est aujourd’hui. À une ère de richesse et de surabondance, il se dissocie de la vision peu ambitieuse de la société contemporaine qu’il explique par l’impression que l’amélioration est impossible. Ne nous cachons pas que le monde est meilleur que ce qu’il a toujours été, nous dit-il, mais il faut continuer de se demander comment les choses pourraient encore s’améliorer et ne pas cesser d’espérer mieux. Tandis que le monde d’aujourd’hui est l’utopie d’autrefois, l’auteur nous amène à constater la face cachée de ce monde d’abondance et à croire en de nouvelles utopies. Si pour plusieurs, le projet de mettre fin à la pauvreté en donnant de l’argent aux pauvres semble une idée absurde et farfelue, le deuxième chapitre, Pourquoi il faut donner de l’argent à chacun, porte à croire que « l’argent gratuit, ça marche » (p. 34) et que l’histoire du progrès est prête à accueillir le projet autrefois utopique d’un revenu pour tous et sans contrepartie. De l’exemple de la petite ville manitobaine qui faillit éradiquer la pauvreté, à celui du projet de loi proposé sous le gouvernement Nixon en 1970, ce chapitre déconstruit les discours dominants qui soutiennent que les pauvres sont paresseux et révèle les avantages méconnus qui entourent le projet d’un revenu de base. Dans le troisième chapitre, La fin de la pauvreté, Bregman précise que « la pauvreté n’est pas un manque de caractère », mais plutôt « un manque d’argent » (p. 73). Il s’appuie sur l’explication proposée par la psychologie de la rareté (Mullainathan et Shafir, 2013) pour soutenir que de nombreuses problématiques perçues comme à l’origine de la pauvreté sont en réalité des conséquences de celle-ci et que les inégalités constituent un facteur qui contribue largement à leur expansion. En ce sens, il appelle à combattre la pauvreté et l’itinérance plutôt que leurs symptômes et démontre qu’il s’agit d’un objectif réalisable. S’il semble désormais évident qu’il est possible de résoudre le problème de la pauvreté, ce chapitre met en lumière les avantages économiques d’un tel projet. Le quatrième chapitre, L’étrange conte du président Nixon et de son projet de loi sur le revenu de base, raconte le rôle qu’a joué la loi de Speenhamland dans la distinction que l’on opère encore aujourd’hui entre les pauvres méritants et les pauvres non méritants et qui constitue un obstacle majeur à un monde sans pauvreté. Bregman y explique que le mythe de Speenhamland « scella le destin de la première tentative de transfert d’argent » (p. 91). Il invite à faire usage de cette leçon d’histoire pour éclairer le recul de l’État-providence au profit d’un État de surveillance plus coûteux et cloîtrant les gens dans une pauvreté persistante. Dès les premières pages du cinquième chapitre, De nouveaux chiffres pour une nouvelle ère, Bregman affirme que le PIB, « critère ultime » censé évaluer le progrès de la société, est un outil de mesure inefficace dans la quête du bien-être social. Partant du principe que « chaque époque a ses idées sur ce qui définit la richesse d’un pays » (p. 108), l’auteur lance la discussion sur des critères alternatifs pour penser autrement le progrès d’une société moderne. S’il est difficile de nier l’utilité du PIB en temps de …
Appendices
Bibliographie
- MULLAINATHAN, Sendhil, et Eldar SHAFIR (2013). Scarcity: Why having too little means so much, Henry Holt & Company, 304 p.